Alain Giresse : “Ah, ce 8 juillet… Je ne suis pas dans un état normal…”

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    Cela fait déjà 40 ans. Le 8 juillet 1982, eut lieu ce fameux France-Allemagne, qui se solda par une défaite de l’Equipe de France aux tirs au but (3-3, 4-5 aux TAB). L’ancien meneur de jeu des Girondins de Bordeaux, Alain Giresse, se souvint dans L’Equipe de ce jour, et de sa préparation pour cette échéance.

    “Ah, ce 8 juillet… Je ne suis pas dans un état normal. Mon sommeil n’a pas été serein. Des flashes de jeunesse ont défilé dans mon cerveau, des histoires familiales, des souvenirs de la Coupe du monde 1970 suivie à la télé, d’un match amical contre le Bayern… Je me dis : « Arrête de cogiter !» À presque 30 ans, je ne veux pas gâcher cette occasion. Une demi-finale mondiale, c’est le must absolu. Depuis le premier jour du stage de Font-Romeu, je suis en mission. Nous sommes tous pareils. Une énergie exceptionnelle nourrit cette équipe. Je vérifie mes chaussures. J’en ai sept ou huit paires. J’ai mis de côté celle de la défaite face aux Anglais. Avec la paire suivante, tout s’est bien passé. Alors elle jouera contre l’Allemagne. Par la fenêtre de ma chambre, je regarde la plaine couverte de brume de chaleur. Dehors, il doit faire 35-38 °C. Un âne est attaché sous un arbre. Je lui parle: «Ah toi, ce soir, tu ne joues pas, tu ne te casses pas la tête !» Cet animal est mon repère, j’en ai besoin. Je tourne en rond dans le lit, je m’assoupis un peu, je me lève pour aller le regarder. D’habitude, je dors une grosse heure sans problème. Aux alentours de 19 heures, nous partons pour le stade. C’est une libération. Les motards ouvrent la route, ça klaxonne. Puis la campagne défile par la fenêtre, j’ai le regard dans le vide. Quand on arrive en ville, l’excitation grimpe. Je suis hors du temps, hors du monde. Tout le monde est extrêmement concentré, pas un bruit”.

    Puis arrive l’arrivée au stade, jusqu’à l’hymne national.

    “Enfin, on pénètre dans le stade…On a droit à un vestiaire à l’ancienne situé sous les gradins, sans ouverture extérieure. Mais la décoration, je m’en fous. Je suis là pour combattre… Je me fais strapper les deux chevilles. Je suis déjà dans mon match. Je sprinte pour faire monter le cardio. Je me sens frais, tellement à l’aise. Rien ne pollue mon esprit. Breitner, Förster, Kaltz sont un peu plus loin. Ce sont vraiment eux avec tous leurs titres… J’ai plus de frissons que d’habitude. L’émotion est profonde. Quand leur hymne retentit, je me rends compte que je le connais. Dans tous les sports, les Allemands gagnent tellement de médailles d’or…”.