Philippe Poutou : “La catastrophe immédiate, ce n’est pas la rétrogradation du club en National 2. Ce sont les licenciements”
Pour Dialectik-football, le membre du Nouveau Parti Anticapitaliste, et conseiller municipal sous l’étiquette “Bordeaux En Luttes”, Philippe Poutou, a réagi à la rétrogradation administrative en National 2 des Girondins de Bordeaux.
“C’est mitigé. D’un côté, il y a de la nostalgie en souvenir des grands moments que le club des Girondins avait permis de vivre, surtout quand on est fan de football. Et de l’autre, on relativise, on se dit que cela n’est pas si grave, qu’il s’agit de sport et que dans l’actualité il y a bien plus grave ou préoccupant, comme les situations sociales, de logement ou d’accès difficile aux soins, à l’alimentation, pour une grande partie de la population. Le seul vrai problème, c’est le sort des salarié(e)s du club, avec un nouveau plan de licenciements qui se profile”.
Et pour lui, la Métropole devrait aussi et surtout aider à ce niveau-là.
“C’est là que la ville comme la Métropole devrait assumer leurs mauvais choix des années précédentes. La catastrophe immédiate, ce n’est pas la rétrogradation du club en National 2. Ce sont les licenciements des salarié(e)s du club qui devraient arriver dès la rentrée. Les pouvoirs publics comme les collectivités devraient mettre en place des réponses sociales, des mesures de protection. La solution pourrait être de municipaliser le club et ainsi de sauver et maintenir les emplois. Derrière il y a aussi la question du centre de formation à préserver, des jeunes qui y sont sous contrat. Cela peut relever d’une politique de la ville et de la Métropole. Cela signifie réfléchir à une politique du sport municipal. C’est une réflexion sur les services publics de proximité qu’il est urgent de reconstruire, sur le principe de développer des régies municipales. Cela concerne les transports en commun, le logement, la santé mais aussi le sport et la culture. C’est un débat que nous avons régulièrement avec les majorités ville-métropole, sur l’importance d’un service public municipal, mais bizarrement la “gauche” bordelaise n’y est pas si sensible que cela. Donc sauver le club, ce n’est pas se plaindre maintenant de Lopez ou de la fatalité, ce n’est pas balancer des idées en l’air comme « une nouvelle gouvernance du sport » sans donner les moyens de la concrétiser. Les collectivités locales ont la possibilité d’agir de manière volontariste pour aller dans le sens d’une politique publique du sport, amateur et professionnel. Dans la situation actuelle cela passe par une municipalisation du club, en s’appuyant sur les salariés du club, sur ses supporters, sur les habitant(e)s qui se sentent concerné(e)s. Il serait important de faire cette première expérience pour la généraliser ensuite. C’est une idée qui vaut le coup d’y réfléchir. En tout cas, cela a commencé puisque des groupes de supporters et autres fans de foot ont relancé la perspective d’un club en gestion collective avec un actionnariat populaire, possiblement sous la forme d’une SCIC, ces coopératives qui permettent de sortir d’une gestion privée et entrepreneuriale. Au lieu de défendre des intérêts capitalistiques, il s’agirait, en mettant le club sous autorité démocratique et collective, de tenir compte des volontés des salarié(e)s du club, de ses supporters, des habitant(e)s. Il y a pas mal d’expériences ces dernières années, en Angleterre (Liverpool, Wimbledon, Exeter, Manchester), en Allemagne (Sankt Pauli), en Espagne ou Italie. On trouve ces expériences dans le livre de Mickael Correïa Une Histoire populaire du football, ou dans des articles des revues So Foot ou Socialter ou même dans le magazine sportif L’Équipe”.