InterviewG4E. Milan Gajić : « On entend souvent qu’il n’y a pas de pression à Bordeaux, je suis d’accord avec ça »
Arrivé sous « l’ère Sagnol », Milan Gajić n’aura jamais pu s’imposer à son poste. A peine 40 matches en trois ans et demi, le jeune serbe n’aura eu que très peu sa chance sous les couleurs des Girondins de Bordeaux, quel que soit le coach assis sur le banc. Avec l’arrivée de Sergi Palencia l’été dernier, son avenir était encore plus bouché cette saison. Cet hiver était donc celui du départ pour lui, qui a choisi de revenir dans son pays natal, à l’Etoile Rouge Belgrade plus précisément. Afin d’acter en beauté son départ du club au scapulaire, nous avons décidé de le contacter pour aborder certains points de sa carrière ainsi que différents sujets sur le club dans sa globalité. Amis lecteurs, voici l’interview.
Milan, tu arrives à Bordeaux en 2015. Comment juges-tu ces 3 saisons et demie aux Girondins de Bordeaux ?
« J’ai vécu trois saisons et demie avec du bon et des moins bonnes choses. Quand je suis arrivé, j’étais un peu plus jeune pour cette grande équipe qui est Bordeaux. Au fur et à mesure, je crois que je me suis bien adapté. Malheureusement, il y avait trop de changements de coaches. C’est vrai qu’il y avait de l’inconstance dans mon jeu, mais dans toute l’équipe aussi. Je retiens que de bonnes choses, que des moments magiques que l’on a vécus ensemble avec les supporters, dans le nouveau stade notamment. Dans l’ensemble, ce sont de bonnes saisons pour moi ».
De notre point de vue, on peut dire que tu n’as jamais réellement eu ta chance. Est-ce que c’est ton ressenti aussi ?
« On peut dire ça aussi. Honnêtement, dans les moments où j’ai eu ma chance et j’ai fait des bons matches, mais il n’y a pas eu cette continuité et je n’ai pas eu la chance d’enchaîner les matches lorsque j’étais bon. C’est un choix de coach, et de ce point de vue, on ne peut rien faire mis à part retourner le temps. C’est comme ça, je ne suis pas content pour ça, mais je ne peux qu’apprendre de ça ».
Tu as connu de nombreux entraîneurs aux Girondins. Que retiens-tu d’eux, qui ne t’ont jamais vraiment donné ta chance ? On se souvient d’ailleurs de Willy Sagnol qui a été très dur avec toi, surement parce qu’il évoluait au même poste…
« J’ai essayé de prendre le meilleur d’eux. Surtout de Willy Sagnol, qui me fait venir à Bordeaux, qui jouait ce poste-là, j’ai vraiment essayé de prendre le meilleur. Après, c’est vrai qu’il était un peu plus dur. C’est un choix de coach, on ne peut que le respecter. On peut être d’accord ou pas, il faut respecter ça. Ensuite, avec Jocelyn Gourvennec, j’ai vécu une saison et demie quasiment parfaite pour moi. Ce n’était pas le mieux pour l’équipe à la fin, pour moi non plus. Mais dans l’ensemble, je peux dire qu’il a été le meilleur coach pour moi. J’ai appris pleins de choses lorsqu’il était là. L’histoire se termine avec ce duo Ricardo-Bédouet donc. Je ne vais pas dire que c’est grâce à eux que je ne suis plus aux Girondins, mais il y a un peu de ça aussi ».
Cet été, Sergi Palencia arrive alors que tu étais déjà en poste avec Youssouf Sabaly. Comment as-tu vécu cette arrivée ?
« On ne m’a pas du tout prévenu. Seulement le 27 ou 28 août, un membre du staff est venu et m’a dit que Sergi arrivait et que je n’aurais pas trop de temps de jeu. Comme c’était la fin du mercato, je ne pouvais plus trouver de bonne solution et une porte de sortie. Cela m’a choqué un peu, j’étais surpris. J’ai continué de bosser jusqu’au bout, de rester sérieux à l’entrainement, et de peut-être gratter un peu de temps de jeu. Cela ne s’est pas fait, c’était logique pour moi de partir. On ne peut que respecter le choix. Je ne peux pas trop en dire non plus à ce sujet, car il s’est passé vraiment des choses inexplicables ».
Plus globalement, as-tu des regrets, ou des choses que tu aurais dû mieux faire pour t’imposer à Bordeaux ?
« Je n’ai jamais de regrets, je regarde toujours vers l’avant. Cela ne sert à rien de penser au passé. Si j’avais la possibilité de rentrer à Bordeaux, je ferais la même chose ».
Tu n’as joué qu’un match cette saison et malgré des sélections avec la Serbie, tu manquais de temps de jeu. Pourquoi n’avoir pas été avec la réserve pour gagner en temps de jeu ?
« J’ai discuté avec mon agent et les personnes autour de moi, et l’on a pris cette décision de ne pas jouer avec la réserve car il y avait un risque de blessure. On ne voulait pas prendre plus de risque. En plus de ne pas jouer avec les pros, il y avait des risques supplémentaires de se blesser ou quoi que ce soit. On a pensé que c’était la meilleure décision à prendre. Je commence à jouer ici, à Belgrade, maintenant, donc c’est bien ».
Finalement donc, tu pars à l’Etoile Rouge de Belgrade, un club phare en Serbie. As-tu été réellement en contact avec les deux clubs de Belgrade ? On parlait à un moment donné d’un échange avec un joueur que tu connais, était-ce vrai ?
« Il y avait des contacts avec les deux clubs en effet. Personnellement, j’avais contact avec l’Etoile Rouge. Pour le Partizan, c’était mon agent qui discutait avec eux. Mon cœur et toute ma famille sommes fans de l’Etoile Rouge. Je n’ai jamais douté de ma destination. J’ai vite décidé de mon nouveau club et pour l’instant mon choix est payant ».
Avais-tu d’autres propositions de clubs que ces deux-là ? En France, ou dans un autre championnat ?
« J’ai eu des propositions pour aller aux Pays-Bas, et plus loin au Kazakhstan ou à Chypre. J’ai décidé que de rentrer au pays était le meilleur choix à faire. Je connais parfaitement la maison. Même si je n’ai jamais joué dans ce club, je connais le championnat et les gens me connaissent. Jouer au foot chez vous et aux cotés de votre famille, et pourquoi pas gagner des titres avec cette équipe, c’est une chose géniale ».
Plus globalement, comment expliques-tu, avec du recul et ta connaissance du club, le fait que les Girondins aient chaque saison des difficultés, et fassent des saisons en dents de scie ?
« Je ne veux pas trop parler des gens dans ce secteur sportif. Mais je pense qu’il manque un peu de personnes qui connaissent mieux le football, qui sont des techniciens, qui font des différences sur le terrain. Il nous manque des coachs, des adjoints, toutes les personnes autour des joueurs, qui peuvent faire des différences et qui mettent les joueurs dans de bonnes conditions sur le terrain. Il manque d’abord ça. Et ensuite, on entend souvent qu’il n’y a pas de pression à Bordeaux, que l’on vit une vie tranquille. Je suis d’accord avec ça. Il manquait un peu d’envie de victoires, de prendre des points, de se battre pour être le meilleur. On rentre dans la suffisance à Bordeaux. Pendant mes quatre années à Bordeaux, chaque année, on a fait la même chose. On commence bien, on finissait mal, ou l’opposée. Il faut des stars à Bordeaux, des joueurs qui ont déjà joué dans des grands clubs, et qui peuvent aider les jeunes ici, parce qu’il y a trop de jeunes en ce moment à Bordeaux ».
Penses-tu que l’arrivée des investisseurs américains à la tête du club va changer quelque chose ?
« J’espère. Du plus profond de mon cœur, j’espère que les Girondins seront un jour Top 2 ou Top 3 en France en Ligue 1. Parce que la ville et tous les Girondins méritent ça. Mais il faut qu’ils prennent des décisions fortes au vu de la situation sportive qui n’est pas top. Il faut des joueurs qui savent être dans la pression, gagner des matches et faire la différence. Je crois qu’il manque des stars qui peuvent aider les jeunes. Dans quelques années, je crois que Bordeaux peut devenir un club stable qui peut jouer la Champions League ».
Vukasin Jovanovic a été longtemps dans ta situation, à ne pas jouer. Finalement, aujourd’hui il remplace parfaitement Pablo. Penses-tu que sa carrière est désormais lancée ?
« Je suis complètement d’accord. Je sais qu’il a été patient, qu’il bossait bien au quotidien, qu’il attendait sa chance. Je crois qu’il est devenu un titulaire indiscutable maintenant s’il continue les performances comme ça. Il remplace parfaitement Pablo. J’espère qu’il continuera de faire la même chose sur le terrain encore longtemps. Il a lancé sa carrière parfaitement, j’espère qu’il va continuer ».
Enfin, est-ce que tu aurais un message à faire passer à tes anciens supporters désormais ?
« J’ai que des bons souvenirs des supporters. On a vécu pleins de choses, des bonnes et des moins bonnes. Je ne retiens que le positif. Le stade rempli contre les adversaires, toutes les victoires dans les derbys. Cette ambiance que l’on avait aussi à chaque match que l’on a joué. J’espère qu’ils vont continuer de supporter cette équipe comme ça. J’espère que nos routes vont se croiser à un moment donné, parce que j’ai envie de rentrer à Bordeaux un jour ».
Un grand merci à Milan pour le temps qu’il nous a accordé ainsi que pour sa gentillesse. Nous te souhaitons le meilleur pour la suite de ta carrière, du fond du cœur !