InterviewG4E. Marama Vahirua : « J’ai toujours voulu jouer aux Girondins lorsque j’étais professionnel »

    (Photo by Aude Alcover/Icon Sport)

    Né à Papeete, c’est au FC Nantes en 1997 que Marama Vahirua a débarqué, en provenance de Tahiti. Plusieurs années plus tard, et bien qu’il soit passé également par Nice, Lorient, Nancy ou encore Monaco, c’est vraiment à Nantes que tout le monde l’identifie. Celui qui avait pour habitude de célébrer ses buts par plusieurs coups de pagaie, a croisé à de nombreuses reprises les Girondins de Bordeaux lors de sa longue carrière européenne qui s’acheva en Grèce (Panthrakikos) en 2013. Aujourd’hui âgé de 39 ans, il est bien évidemment retourné sur son Île, mais garde toujours sa passion pour le football. Avant la rencontre entre le FC Nantes, où il a terminé sa formation, et les Girondins de Bordeaux, nous nous sommes entretenus pendant plusieurs minutes. Une interview intéressante, d’autant plus que Marama a plusieurs anecdotes avec le FCGB, et même avec un joueur actuellement aux Girondins. Interview.

     

    Vous avez aujourd’hui 39 ans et vous continuiez de jouer il y a peu avec l’AS Dragon Papeete, club de première division à Tahiti, dont vous étiez le Président. Comment fait-on pour durer dans ce métier ? A Bordeaux, la saison dernière, Jaroslav Plasil jouait encore par exemple, à l’âge de 37 ans…

    C’est l’amour du sport, tout simplement, c’est la passion. Tant qu’il y a la flamme dans le cœur, c’est bon. Personnellement, c’est ce qui me maintient dans le foot. Et au grand dam de ma femme, ça va durer jusqu’à ma mort. Le football, c’est ma vie. Aujourd’hui, je suis passé de l’autre côté. J’ai démissionné de l’AS Dragon mais je continue à jouer et à prendre du plaisir. Ça a été mon métier pendant presque 17 ans, aujourd’hui, ce n’est que du plaisir, la passion a repris le dessus. Maintenant, je suis plus dans la transmission qu’autre chose. C’est-à-dire dans les matches, ou quand je coache des équipes, j’ai cette flamme-là, cet amour que je transmets aux futures générations.

     

    Vous avez donc été Président de club et on imagine que vous vous intéressez à la gestion des clubs. Est-ce que vous suivez comment sont gérés les clubs de Ligue 1 ?

    Oui et non. Le monde amateur en France est complètement différent de celui du monde professionnel, alors je ne vous raconte pas ici, le monde amateur, à 20 000 km de la France, c’est pire ! J’ai toujours un regard sur la France et particulièrement sur mes anciens clubs, comme le FC Nantes. Comme je le disais tout à l’heure, ça va être jusqu’à la fin, je vais suivre tout, à chaque saison le championnat français.

     

    En France, de nombreux clubs se sont fait racheter par de grosses entreprises ou des fonds d’investissement, notamment les Girondins de Bordeaux. Est-ce que ça vous parle ce type de transaction ?

    Le football moderne est devenu un football business, ça fait bien longtemps que c’est le cas. C’est bien, parce que grâce à ça, on peut se permettre de faire venir des joueurs comme Neymar en France, ce qui aurait été impossible il y a une dizaine ou une vingtaine d’années, à mon époque. Il n’y avait tout simplement pas d’argent en France. Aujourd’hui, grâce à ça, on arrive à faire venir des stars et on intéresse le monde du football. C’est bien, mais je vois beaucoup de clubs rachetés par des richissimes mais qui coulent derrière. Il faut donc essayer de faire un bon mix entre le business et ceux qui gèrent le terrain. C’est-à-dire qu’un patron de société, il ne sera pas forcément bon sur le terrain, en gestion d’hommes. On sait tous qu’un patron de société, il dit « tu fais ce que je te dis car je suis le patron ». Sur le terrain, ou du moins, dans un club de foot, ce n’est pas la même chose. La communication est complètement différente. On est une équipe et non « les employés de », il y a donc un dialogue à adapter.

     

    Dans une interview, vous parliez de votre volonté de vouloir travailler avec un club de Ligue 1 pour créer un pont entre la métropole et Tahiti et donner l’opportunité à des jeunes de votre île d’avoir la même carrière que vous. Est-ce toujours d’actualité ?

    Plus que jamais. Je travaille depuis que je suis revenu de Polynésie sur ce partenariat, mais je cherche un partenariat intelligent. Aujourd’hui, les clubs en France, je sais qu’ils sont à la recherche de ce type de partenariat, mais j’ai envie de le rendre vraiment pertinent. Il faut que ce soit gagnant-gagnant. Nous sommes une petite île, on ne parle pas de millions de joueurs, mais il y a de la qualité technique, tactique, qui nous sauve parce qu’on est loin. Mais lorsque l’on arrive à faire des tests en France, on est là.

     

    Et est-ce que travailler avec un club comme les Girondins correspondrait aux valeurs que vous défendez en termes de formation, d’accompagnement ?

    Les Girondins de Bordeaux que je connaissais il y a 15 ans, je vous dirais oui, de suite. Maintenant, je ne sais pas qui y travaille encore, je ne les connais peut-être pas, ou plus. Mais en tout cas, si le club est resté dans cette mentalité de formation que je connais d’il y a une quinzaine d’années, ça sera avec plaisir. Ça serait pour moi, pas une sorte de revanche, mais j’ai toujours voulu jouer aux Girondins lorsque j’étais professionnel, notamment lorsqu’il y avait Elie Baup. J’ai failli, mais… bref, ça a toujours été un souhait pour moi donc oui, j’aimerais beaucoup travailler avec les Girondins sur un partenariat.

     

    De façon plus générale, quelle image avez-vous du club de Bordeaux ?

    Je garde toujours en souvenir un grand club. Depuis mes débuts en formation à Nantes, ils nous rendaient la vie difficile sur le terrain. J’ai toujours eu énormément de respect pour ce club parce qu’il y a eu de très grands joueurs qui y sont passés. C’est un club qui a une histoire énorme, notamment en Champions League. Il y a eu de grands noms comme Zidane et compagnie. Respect !

     

    Marama Vahirua
    Photo Icon Sport

     

    Vous souvenez-vous de l’équipe de Girondins de Bordeaux 2008-2009 qui a été Championne de France ?

    Oui, il y avait Yoann Gourcuff, qui venait de Milan à l’époque. Je m’en souviens parce que j’étais au FC Lorient avec son père et on parlait beaucoup de lui, car j’étais proche de Christian. Je me souviens même être venu voir un match de Champions League la saison suivante, je ne me souviens plus contre qui par contre. On avait fait le déplacement avec Pierre Ducasse, de Lorient à Bordeaux. Pierre, c’était un super pote ! J’ai toujours gardé des contacts avec Bordeaux en tout cas, de près ou de loin.

     

    Dans votre carrière, vous avez marqué trois buts face aux Girondins de Bordeaux, dont notamment une frappe de 30m de volée, avec Nice… Vous vous souvenez de ce but ?

    Oui, je me souviens de ce but, bien sûr. Et pour l’anecdote, il y avait Faubert qui était à côté de moi quand je marque et que je fais la pagaie… Il était, comment dire, véner (rires).

     

    A Nice, vous avez évolué avec un attaquant des Girondins de Bordeaux, Lilian Laslandes. Comment était votre entente et quel souvenir gardez-vous de lui ?

    Un super gars, sur et en dehors des terrains. C’est le partenaire parfait sur un terrain. Après, on est parti une fois en vacances ensemble et on avait fait un tennis ballon. On a gagné avec Cyril Rool contre lui et un autre pote. Et voilà, c’était Lilian, mauvais perdant (rires). Je lui disais : « c’est bon, ce n’est qu’un tennis ballon », mais non, il fallait absolument qu’il gagne. C’était marrant, on a éclaté de rire avec Cyril car il était à fond, tout le temps.

     

    Marama Vahirua et Laurent Koscielny
    Photo Icon Sport

     

    A Lorient, vous avez vu débuter un certain Laurent Koscielny, qui est aujourd’hui aux Girondins de Bordeaux. Quel souvenir gardez-vous de lui à l’époque ?

    Quand je l’ai vu arriver, je m’en souviens encore. J’ai une anecdote là-dessus : la saison précédente, le coach vient me voir, car comme je disais, j’étais proche de Gourcuff. Et il me dit : « Écoute, la saison prochaine, on va essayer de viser mieux, on va faire des recrues, etc… » et cette même saison, on joue Tours en Coupe de France, et je me souviens que ma première rencontre a été difficile avec Lolo. Je pars en profondeur, il me met un coup d’épaule et il me met K.O en fait. A tel point que j’ai eu des saignements. La saison suivante, je vois qu’il signe à Lorient et je vais voir le coach et je lui dis : « Coach, vous me dites qu’on va jouer mieux la Ligue 1 et vous prenez des joueurs de Ligue 2. Ça va être difficile encore, on va jouer le maintien… ». Et puis la saison est passée et voilà ! Déjà, on s’est rapproché, c’est un super garçon avec une super mentalité. C’est devenu un pote. Tellement on s’apprécie, je suis allé lui rendre visite, il y a deux ans à Londres. C’était de superbes souvenirs et il a fait la carrière qu’il a faite derrière.

     

    Depuis son arrivée aux Girondins, il a stabilisé la défense bordelaise et il apporte toute son expérience au groupe. Que pensez-vous de sa venue à Bordeaux ?

    J’ai été surpris de le voir partir d’Arsenal, mais il est vrai qu’avec l’âge, à un moment donné, les clubs vont chercher des plus jeunes. C’est sûr qu’avec son expérience et ses qualités, il va apporter énormément au club. Mais je ne suis pas étonné du tout. Maintenant, il faut un équilibre autour, j’ai vu les derniers résultats, c’est un peu compliqué. C’est sûr qu’il a une expérience de l’international qui est incontestable. Par contre, là, il faut que les jeunes autour s’adaptent à son niveau d’exigence et lui il le sait, pour avoir joué en Equipe de France, etc… Les jeunes doivent l’écouter et s’il peut apporter un plus, c’est là, il faut les calmer et leur dire en même temps que leur insouciance peut servir.

     

    vahirua

     

    Dimanche, Bordeaux accueille Nantes pour ce qu’on appelle « le derby de l’Atlantique ». Aujourd’hui, cette rivalité est un peu perdue mais est-ce qu’il y avait à votre époque cette rivalité entre les deux clubs ?

    Ah oui ! Je crois que je n’ai jamais gagné contre Bordeaux, quand je jouais à Nantes ou du moins je n’ai pas beaucoup gagné. La seule fois, c’est peut-être quand on a été Champions de France. Ça a toujours été des matches très compliqués. Un de ems premiers matches contre Bordeaux, lorsque j’étais au FC Nantes, il y avait en face, un petit joueur pas du tout connu, sorti d’on ne sait où, qui s’appelait Pedro Miguel Pauleta. Il nous a mis 3 buts, il nous a tués. On s’est demandé, « mais c’est qui lui ?! ». Et il nous l’a montré, qui il était !

     

    Actuellement, Nantes est 2ème du championnat. Bordeaux 8ème. Qu’est-ce que vous pensez que ça va donner ?

    Bonne question ! Nantes a fait un super début de saison et là ils commencent un peu à baisser de rythme, mais Bordeaux n’est pas non plus au top du top. Ça peut être tout ou rien. Mais j’espère que les Canaris vont remonter la pente car ils ont besoin de points.

    Un grand merci à Marama pour le temps accordé et ce du bout du monde ! @ bientôt ! 🙂