Entretien avec un ancien collaborateur de Gérard Lopez, l’un des potentiels repreneurs des Girondins de Bordeaux

    (Photo by Aude Alcover/Icon Sport)

    Gérard Lopez s’était déjà intéressé aux Girondins de Bordeaux par le passé, avant que le club ne soit vendu à GACP/King Street par M6. L’entrepreneur s’était alors rabattu sur le LOSC, avec le succès sportif qu’on lui connait, mais également une mauvaise image de sa gestion financière, qui nous rappelle évidemment ce que l’on vient de vivre ces trois dernières années. Faisant partie des quatre (ou cinq ?) candidats au rachat du FCGB, il a été le premier à dégainer lundi soir, en formulant une première offre à la Banque Rothschild, qui l’aurait même d’ailleurs invité à se mettre sur les rangs pour racheter le club.

    Pour autant, que connaissons-nous du projet de Gérard Lopez ? Pas grand-chose, puisqu’il s’est fait très discret, son nom étant même le dernier apparu dans la liste des potentiels repreneurs. Mais ce n’est pas pour autant qu’il chôme, croyez-nous, même si nous ne pouvons pas vous en dire plus à l’instant T… Si les premiers retours que nous avons eu ont été bons – pour ne pas dire très bons – nous avons voulu en savoir plus sur son passage au LOSC, ce qu’il pourrait reprendre aux Girondins de Bordeaux, et sur l’homme lui-même. Pour cela, nous avons contacté l’un de ses anciens collaborateurs, qui va nous décrire de A à Z qui est Gérard Lopez. A vous, après ça, de vous faire votre propre avis. Entretien avec une personne qui le connait depuis des années, et qui a souhaité garder l’anonymat.

     

    Quel regard portez-vous sur Gérard Lopez, votre ancien collaborateur ?

    C’est un réel plaisir de pouvoir m’exprimer sur cette personne qui m’a marqué lors de notre collaboration. Lors de son arrivée, j’étais très sceptique, comme tout le monde j’avais lu qu’il investissait dans le monde du sport et que cela n’était pas forcément une réussite à tous les niveaux. Je n’étais pas en contact direct avec le terrain mais de par ma position, j’ai pu vivre et assister aux premières loges et pendant presque 4 ans à la vie d’un homme d’affaires mondialement reconnu. Du trading de joueurs, tel était son plan afin de faire évoluer le LOSC, un peu à l’image de l’AS Monaco quelques années plus tôt, et qui était en réussite. D’après mes informations, il voulait Marseille ou Bordeaux mais à cette époque seul Michel Seydoux, ancien actionnaire du club nordiste, a accepté sa proposition.

    Avant l’arrivée de Gérard Lopez au club, le LOSC était un club stable, profondément ancré dans ses valeurs, plutôt familiales, et qui savait réaliser des coups comme l’atteste le doublé Coupe-Championnat en 2011. Pour moi aujourd’hui, Gérard Lopez a fait changer de dimension le LOSC. Le club était plutôt bon au niveau national et aujourd’hui il commence à être reconnu en Europe. Je pense qu’au niveau sportif c’est l’une des choses les plus difficiles à faire, faire changer de standing un club en quatre ans et de plus après une première année catastrophique. Justement, c’est ça qui est très fort, avoir su rebondir aussi vite après avoir échappé de peu à la relégation. L’avantage de Gérard Lopez c’est qu’il sait s’entourer de personnes de très haute qualité, compétentes, que ce soit au niveau sportif mais également au niveau financier. Quel coup de tonnerre quand nous avons su qu’il venait avec Marcel Bielsa et Luis Campos, de vraies références dans le milieu.

    Malgré le regard qui lui est donné dans les médias et la réussite financière, Gérard Lopez est quelqu’un de profondément humble, plutôt introverti et calme. J’ai souvenir de lui qu’il était plutôt bienveillant et très passionné. Le LOSC n’était pas son objectif prioritaire mais à peine arrivé et en discutant avec lui, j’ai pu reconnaitre qu’il connaissait déjà le passé du club lillois et qu’il avait tout fait pour s’imprégner de l’histoire des Dogues. Il se renseignait énormément sur les groupes de supporters, il reconnaissait l’importance de ces derniers et prenait une attention toute particulière à vouloir communiquer avec eux. Il se voulait rassurant et c’est tout à son honneur… Il aimait bien le football « populaire » malgré sa position de financier. Ce supporter du Barça garde également intérêt profond aux valeurs, aux couleurs du club, il ne voulait rien changer de tout cela, juste faire progresser et embellir… Quand il venait au domaine du Luchin, centre sportif magnifique du club, il était très apprécié, il allait toujours saluer l’ensemble des employés, avait un mot pour certains d’entre eux, il était profondément respecté et l’ambiance était paisible, calme, et tout le monde était déterminé à réussir. Il venait à l’improviste avec sa superbe Ferrari mais il ressemble à monsieur tout le monde, toujours le sourire léger et le comportement sûr et très posé, même au plus profond de la crise lors de sa première année. D’ailleurs à ce sujet, lors de cette horrible première année, je n’arrivais pas à comprendre le calme qu’il dégageait malgré la crise. Mais c’est quelqu’un qui garde tout, qui déteste perdre le contrôle, et donc ne montre rien. Là où il m’a également surpris, c’est dans sa capacité à connaitre le football. Venant de la F1 il m’a bluffé à plusieurs reprises, il tenait largement la discussion avec Luis Campos ou Marcelo Bielsa sur le fonctionnement sportif. Il n’est pas simplement un investisseur ramenant une enveloppe, il est complet et maitrise l’ensemble des sujets englobant le management d’un club football professionnel européen.

    En quatre ans, et j’insiste là-dessus, il a réussi à partir de très loin, d’une position de reléguable, pour aller jusqu’au titre de Champion. La première année lui a mis une vraie claque et c’est là où tout a changé, où sportivement il a compris qu’il devait renforcer l’équipe de façon très efficace et les moyens ont étés mis. Pour donner de l’ambition à un club, une institution ou une quelconque entité, il est très fort puisqu’il est très ambitieux et très soutenu. C’est là où cela peut être dangereux, cela dépend de quel côté de la barrière nous ressentons la chose, mais si Bordeaux désire un actionnaire afin de pérenniser le club dans les années futures avec comme objectif le ventre mou ou légèrement mieux, ce n’est pas l’homme de la situation. Par contre, du fait qu’il soit très ambitieux, il n’hésitera pas à prendre des risques financiers par le biais de prêts ou même de sa fortune personnelle, afin de construire une équipe très compétitive. Il fait énormément confiance à ceux qui l’entourent et ne va pas passer par quatre chemins s’il fallait sortir quelques millions de plus. Cependant l’obligation de résultats devient fondamentale, voire vitale. Cela peut être dangereux, il aime les risques, mais quand on regarde l’ensemble des gros clubs de Ligue 1, hormis le PSG, et encore… les prêts sont légions, mais l’important est d’accrocher au minima une place européenne. Gérard Lopez viendra pour cela, il ne viendra pas pour jouer les bas-fonds.

    Nous sommes tous étonnés de voir dans quelle position financière le LOSC est aujourd’hui, il a réussi à garder cela très secret… Ca a été un choc énorme pour l’ensemble des collaborateurs, un vrai coup de massue. Le club est aujourd’hui très endetté malgré le nombre incalculable de ventes à prix fort mais c’est un financier avant tout, il fait rentrer, il fait sortir, inlassablement. Il aime le risque. Il est capable d’accepter de vendre un joueur même indispensable à l’équipe au bout d’un an, comme Victor Osimhen acheté une dizaine de millions, et vendu l’année d’après à Naples pour 80 millions d’euros.

    Beaucoup de choses sont sorties dans les médias, il s’est fait écarter, c’est très long à expliquer le pourquoi du comment, et cela ne nous avancera pas. Mais connaissant bien le personnage, il a appris de ses erreurs et je pense qu’à l’heure actuelle, s’il revenait dans le football, je pense qu’il mettrait en pratique tout ce qu’il a appris au fil des années. Je pense que l’ensemble des supporters lillois au fond d’eux savent où Gérard Lopez les a amenés. Je n’ai pas la prétention d’écrire son autobiographie mais il attire le regard, l’intérêt et la reconnaissance. Il y a beaucoup de choses à dire sur lui. Pour moi, il est un vrai gage de réussite mais comme souvent il y a le revers de la médaille. Cependant, vous avez pu constater à quelle vitesse le club lillois a été vendu, cela voulait dire que le club n’était pas en si mauvaise position qu’on le dit, autrement la cession aurait été beaucoup plus difficile. Pour l’intérêt de tous, il a été évincé et nous sommes passés à autre chose sans faire de bruit ou presque. La saison prochaine, pour le LOSC, c’est la Ligue des Champions avec encore une équipe très compétitive, croyez-moi. Les médias aiment trouver le diable partout, il faut en prendre et beaucoup en laisser, et je sais de quoi je parle… Cela ne tient qu’à moi mais pour Bordeaux, s’il vient avec son équipe et son soutien financier, vous pouvez avoir confiance, c’est un grand monsieur et pour rebâtir c’est celui qu’il vous faut.

     

    Son modèle sera probablement axé sur la dette. Est-ce inquiétant, sachant que Bordeaux est déjà dans une situation complexe sur le plan économique ?

    Oui en effet, mais Bordeaux a-t-il réellement le choix ? Et puis à part certains clubs d’une puissance inouïe, la plupart des clubs de renom fonctionnent ainsi, des dettes avec des paiements échelonnés. Nous avons tendance à minimiser l’influence de la crise sanitaire qui a mis des clubs en difficulté financière, même de très grands clubs qui aujourd’hui doivent calculer… Pour la Ligue 1, les droits TV non payés par Mediapro, la crise sanitaire, l’absence de spectateurs dans les stades… Tout cela a beaucoup joué dans l’éviction de Gérard Lopez qui avait misé sur ces ressources financières pour rembourser les dettes, il n’y a pas que cela mais ça a beaucoup joué, lui-même vous le dira.

    Maintenant, il faut comprendre les supporters bordelais qui ont passé trois ans avec GACP/King Street, sans parler des dernières années M6, qui voient leur club sans cesse crouler sous les dettes. Et le gouffre s’agrandit d’année en année. Tout ce qui est investisseurs, prêts, dettes, ce sont des mots que les supporters ne veulent plus entendre. Nous n’allons pas revenir sur les erreurs faites dans tous les secteurs – erreurs de recrutements, incompétence des gens en place, erreurs de casting, salaires mirobolants pour des joueurs plus que moyens, restructuration ratée etc – mais aujourd’hui s’ils désirent revoir un peu de lumière, il ne faut pas avoir peur du modèle axé sur la dette. Il va falloir reconstruire une équipe en misant malin. Après, cela dépendra également de la hauteur de la dette des Girondins, parce que cela va impacter l’enveloppe de reprise… Quel sera le montant réservé pour reconstruire l’équipe ? Je n’ai pas tous les tenants et aboutissants du budget avec lequel Gérard Lopez viendra, mais une grosse partie sera réservée au sportif et à l’achat de joueurs. C’est sa façon de procéder. Le sportif avant tout, et le reste viendra…

    Cela ne tient qu’à moi, il y a une époque où j’aurais crié au loup pour un plan misé sur la dette. Mais quand je vois la réussite sportive que cela génère, cela m’a fait changer d’avis. Je ne vais peut-être me faire l’avocat du diable mais en tant que supporter, doit-on réellement regarder la dette ? Contrôler cela ? Essayer de comprendre où part l’argent etc… ? Je pense que le rôle du supporter ne se situe pas à ce niveau… Il y a des gens compétents pour cela, mais chacun sa place et justement c’est la place parfaite pour Gérard Lopez. Ayez confiance, s’il n’y avait pas eu autant d’éléments variables impossibles à anticiper, il serait encore à la présidence du LOSC à préparer son équipe pour la Ligue des Champions, avec des ventes, des achats et des dettes… mais tout en haut de l’affiche.

    Le dernier titre de Champion des Girondins date de 2009, une Coupe de France en 2013 et depuis ? Plus rien… Et pourtant les dettes se sont accumulées… Gérard Lopez en arrivant va rassurer les différents protagonistes. Le sportif reste pour lui en haut de tout, il va acheter et il va vendre. Il peut remettre le club en place… J’ai vu les différents repreneurs pour Bordeaux, et c’est le seul qui pour moi en est capable. Il connait le milieu et il connait les portes où il doit taper…

    Le supportes des Girondins doivent également comprendre, toujours en prenant connaissance des éventuels repreneurs, que ces derniers espèrent tous que le club soit rétrogradé en N3, et cela serait la mort du club. Je ne connais pas la situation financière de Bordeaux, je sais qu’elle est très inquiétante et qu’elle a tendance à repousser les investisseurs. Mais je pense que la Banque Rothschild, qui a été mandatée pour la reprise des Girondins, a fait appel à Monsieur Lopez parce qu’il a justement le profil pour reprendre efficacement et durablement le club dans une position où il devrait être, c’est-à-dire dans les places fortes du championnat de Ligue 1. Devant la pauvreté des repreneurs et la complexité de leurs moyens transitant par différentes sources de revenus, il était plus convaincant pour eux de taper à la porte de quelqu’un qui a les moyens et l’ambition de répondre favorablement à leurs attentes. Pour Gérard Lopez, cette dette ne lui fait pas peur, il est très intelligent et sait où il va… C’est un homme de challenges et je dirais même qu’il apprécie énormément ce genre de mission. Il reste amer sur son départ du LOSC qu’il garde profondément dans son cœur et s’il vient à Bordeaux, il repartira avec les même ambitions, avec l’expérience en plus, ce qui est un avantage énorme pour le club des Girondins. Nous risquons de voir une belle réussite avec les côtés négatifs en moins puisqu’il a beaucoup appris. J’en suis convaincu.

     

    On sait que les relations avec Luis Campos sont tendues, ce dernier ayant expliqué qu’il ne travaillait plus avec l’ancien Président du LOSC. C’est donc impossible de revoir ce duo à Bordeaux ?

    Bonne question ! Qui me fait réellement sourire. Je pense que les deux sont indissociables. Oui, les relations ont étés tendues pour différentes raisons que je ne peux exprimer parce que tout d’abord je ne connais pas tout, et que de plus ça leur appartient. Mais je pense que Luis Campos sera toujours là pour Gérard Lopez, il y a comme un petit côté fraternel entre les deux, une relation de confiance. Il faut mettre un peu les choses dans leur contexte. Il y avait Gérard Lopez qui était l’actionnaire, Luis Campos qui n’était pas directeur sportif mais plutôt le conseiller du Président… Marc Ingla le directeur général et Patrick Robert le président de l’association LOSC, cela fait beaucoup de personnes tout en haut quand il fallait prendre des décisions, et souvent il y avait des désaccords.

    Luis Campos… c’était… Il prenait toute la place, il était extrêmement charismatique et avait parole d’évangile dés qu’il parlait. Il était extrêmement respecté et croyez-moi, il prenait le contrôle de tout ! Malgré cela, il s’entendait très bien avec Christophe Galtier. Mais celui qui décidait était Luis Campos ! Revoir ce duo à Bordeaux sera tout de même difficile parce que l’ancien « directeur sportif » du LOSC est infiniment sollicité par les plus grands et la marge de manœuvre sera pour lui largement plus avantageuse, donc plus lucrative. Mais cela n’empêche qu’il conseillera toujours Gérard Lopez, pas officiellement, mais je n’ai aucun doute quant à sa participation à la reconstruction des Girondins si Gérard Lopez venait à la tète du club. A Tottenham, quand Mourinho était encore le manager, ses adjoints venaient tous du LOSC et étaient envoyés par Luis Campos. Il a fait pareil à Monaco, il sème toujours là où il a été et restera toujours le conseiller privilégié de Gérard Lopez.

     

    Quelle a été sa politique avec le centre de formation du club ?

    Gérard Lopez accorde également une attention et une très grande importance à la formation. Point essentiel à la reconstruction. Pour lui, un grand club doit posséder un centre de formation digne de ce nom et se doit également d’être performant. Il était assez proche des jeunes, vis-à-vis d’eux il se mettait en retrait quand il passait les voir évoluer, mais il les suivait et se mettait au courant de leurs performances et leur évolution. Les mauvaises langues disaient que ces joueurs étaient une future manne financière et même s’il en était ainsi, cela n’empêchait aucunement le fait qu’il s’y intéressait grandement.

    Après, cela ramène une fois de plus à Luis Campos qui avait carte blanche sur la politique de recrutement des jeunes joueurs. Il y avait une énorme voire même une colossale arrivée de nouveaux joueurs venant de tous les pays. A savoir que la cellule de recrutement des joueurs, souvent à partir de 16 ans, était gigantesque en nombre. Ils couvraient quasiment tous les pays du globe, une véritable nébuleuse, ils couvraient tout ! Cela arrivait de tous les pays. Ca bougeait énormément ! Certains restaient deux jours, d’autres davantage, ils étaient testés, repartaient puis revenaient…

    Le côté formation était au centre de la pierre angulaire : il fallait comprendre que c’était des actifs, des futures valeurs marchandes mais attention, c’était fait plutôt sainement, ils n’étaient pas pris pour du bétail mais ils avaient des explications sur l’institution, ils étaient pris en charge parfaitement, des traducteurs étaient à leurs côtés… Tout était fait pour qu’ils réussissent, rien n’était laissé au hasard, parfois même les parents ou la famille venaient avec et eux aussi étaient pris en charge, logés, nourris… J’étais admiratif devant cette façon de faire, pour moi c’était le football d’avenir, une vraie évolution et une révolution ! Chacun avait une fiche de suivi très stricte et très détaillée.

    J’ai vu travailler beaucoup de clubs professionnels et cette façon de faire était vraiment au-dessus de tout et dans des conditions d’infrastructures à la pointe. Sachez qu’ils continuent à travailler ainsi avec d’autres personnes extrêmement compétentes. Depuis des années, le LOSC obtient de bons résultats dans sa formation même si je trouve qu’il n’y a pas encore assez la culture de la gagne dans l’éveil et la préformation… Cela commence vraiment à partir des U17 Nationaux où il y a l’obligation de résultats. La plan de Lopez et Campos était de recruter beaucoup de jeunes mais cela avait créé des bouchons et des postes multipliés, ce qui a engendré d’aller chercher des clubs satellites dont un à proximité. Par moment c’était trop, mais les chances augmentaient de trouver la perle rare.

    A voir le directeur sportif qui viendra, et quel positionnement il aura sur cet aspect. Un gros travail sera à faire à Bordeaux même si la base est présente. Gérard Lopez prendra du plaisir et je pense qu’il voudra prendre la même méthode qu’au LOSC. Il lui arrivait d’aller les voir, je me souviens de la qualification contre Chelsea en Youth League : il était fou de joie, un vrai supporter, il a « checké » tout le monde. Ce côté-là a été amusant, on a ressenti toute la passion d’un gagnant. C’était plaisant, un grand souvenir ! Pour moi, il continuera à travailler dans ce sens s’il reprend Bordeaux, nul doute qu’il ne changera pas cela et je pense qu’il va mettre le paquet aussi sur cet aspect.

     

    Gérard Lopez n’a pas grand-chose à voir à première vue avec les Girondins de Bordeaux. Saura t-il s’adapter ? Et quelle est l’importance pour lui des valeurs, de l’histoire du club ?

    Oui et c’est le doute que j’ai… Parce qu’il a vraiment le LOSC dans le cœur. Il a vraiment l’impression d’avoir construit ce club alors que non, ce club avant lui avait une histoire et une belle, en plus ! Maintenant, je pense, connaissant son caractère, qu’il est largement capable de partager et d’aimer autant… et justement Bordeaux pourrait lui donner une seconde vie. Il saura s’adapter parfaitement et pour connaitre les deux régions, je pense même qu’il parait davantage « bordelais » de par ses réactions. Je le vois vraiment bien dans cette région. Je trouve que ce club lui irait bien. Ce côté bourgeois, plutôt sobre, ça colle fortement !

    Gérard Lopez est un professionnel hors norme. De plus, vous serez surpris par l’implication qu’il mettra. Je ne serais pas étonné qu’il rencontre les représentants des supporters assez rapidement, s’il ne l’a pas déjà fait. Pour lui, les valeurs et l’histoire, c’est la base invariable d’un club. Je pense que le logo changera très rapidement et il sera à l’écoute des supporters sur ce domaine parce qu’il leur déplait… Ensuite, il est très connaisseur en histoire de football, ce n’est pas un novice, il connait le club et je vous rappelle que les Girondins étaient visés bien avant le LOSC. Le changement de logo du LOSC venait de Campos, nul doute qu’il a regardé cela plutôt de loin…

    Son objectif sur cet aspect sera avant tout de préserver les fondamentaux et je ne doute pas un seul instant qu’il consultera les représentants des supporters bordelais s’il veut changer quelque chose… Mais tout ceci n’est pas du tout son objectif prioritaire. Pour lui, c’est très important de ne pas toucher ce que les supporters ne veulent pas qu’on touche… Il laisse les valeurs, les respecte parfaitement et stop ! Son regard est plutôt porté sur d’autres choses comme le sportif ou la formation. Ce domaine, il le laisse aux supporters mais il sera à l’écoute si quelque chose devait évoluer à leur demande.

     

    Quelle est justement sa relation avec les supporters ? Quelle image garde-t-il auprès des salariés du LOSC ?

    Gérard Lopez porte une très grande importance aux supporters. Il est souvent enclin à accepter de rencontrer les groupes ou ses représentants. Il est très à l’écoute et prend en compte tous les avis. C’est un personnage avec beaucoup d’empathie qui ne se cache jamais. J’insiste bien là-dessus.

    Lors de la première saison à la tête du LOSC, celle où le club a failli être rétrogradé, l’année a été très éprouvante. Les groupes de supporters mettaient une pression énorme et j’ai encore en mémoire le jour où le stade allait exploser avec l’émeute d’individus venant agresser les joueurs sur la pelouse. Je me souviens du visage profondément marqué de Gérard Lopez, on sentait qu’il souffrait mais jamais il ne se cachait. Beaucoup à sa place se seraient refugiés en coulisses et auraient sauté dans le premier taxi. Le souvenir que j’ai, c’est qu’il voulait discuter avec les supporters alors que tout était en train d’imploser complètement. Il ne se cache pas, n’a pas peur d’affronter les problèmes…

    Depuis son départ du LOSC nous avons l’impression que les supporters des Dogues lui en veulent, pensent qu’il est un arnaqueur et qu’il s’en est mis plein les poches. Ils font un peu comme tout le monde, ils écoutent les médias, les réseaux sociaux. Et se font une idée. C’est comme partout, il y en a qui arrivent à prendre du recul et sont reconnaissants envers la personne, sur ce qu’elle a accompli, et d’autres qui ne voient que le côté sombre… C’est le jeu. Nous parlons quand même d’un club qui a été deux fois en Ligue des Champions, qui a gagné le championnat, et tout cela en seulement quatre ans. Mais il faut accepter cela et il le sait, il n’a aucune amertume envers tout ce qui entoure le club, il comprend et assume, et passera à autre chose. Que les supporters lillois lui en veulent, cela ne concerne pas le sportif. Ils ont plutôt l’impression d’avoir été floués, qu’il se soit servi dans la caisse, mais c’est comme une séparation amoureuse… C’est difficile, on s’en remet toujours, et on cherche chez l’autre les pires défauts pour passer à autre chose plus facilement… C’est la loi du foot.

    Mais aujourd’hui je pense que Gérard Lopez est prêt à rééditer ce qu’il a créé au LOSC, il a ce sentiment d’inachevé. S’il débarque à Bordeaux c’est qu’il a un plan bien précis, qu’il voudra mettre en place la même configuration de réussite qu’il a vécue à Lille. Il voudra une fois de plus s’entourer des meilleurs. Il faut voir de où part le club des Girondins. Si c’est si catastrophique que cela, il va penser à combler avant tout afin de rassurer et de repartir sur des bases saines tout en priorisant également l’effectif professionnel. Il y aura également une très grosse refonte des dirigeants et des éducateurs. Exit Frédéric Longuépée, Jean-Louis Gasset et Alain Roche, il viendra avec des hommes à lui, choisis surement par Luis Campos. La direction de la formation va également changer, tout comme beaucoup d’éducateurs du club : il y aura d’énormes changements. Bordeaux va avoir un nouveau visage.

    Ambition, formation et les valeurs du club, sont ses principaux axes. Pour moi, il est celui qu’il faut pour remettre le club bordelais là où a toujours été. Lui et lui seul.