L’analyse du premier mercato de l’ère Gérard Lopez aux Girondins de Bordeaux

    Des dirigeants compétents

    Tout au long de ce mercato, nous avons pu nous apercevoir du professionnalisme, des compétences, des aptitudes et surtout la confirmation d’une maitrise parfaite d’Admar Lopes et son réseau de scouts sur les caractéristiques de chaque joueur, à chaque poste, que ce soit au Brésil, au Portugal, en Allemagne, ou en Turquie…

    En fonction d’un budget important ou limité, il dessine les contours de sa stratégie après avoir réalisé au préalable une étude précise sur les forces et carences de son groupe.

    Sans argent et avec l’obligation de vendre avant d’acheter, il a commencé par la base et il s’est attelé dans un premier temps à redonner des couleurs à des couloirs droit et gauche se sentant quelques peu délaissés depuis le départ de Mariano (à droite) et Benoit Tremoulinas (à gauche).

    Timothée Pembélé, Gideon Mensah, Ricardo Mangas, trois jeunes profils qui renouent avec la tradition bordelaise des arrières fougueux, des arrières portés vers l’avant et techniquement fiables.

    Fini (enfin, on l’espère) les carences de placements ou de concentrations de Youssouf Sabaly (et ses blessures à répétitions), la lenteur d’un Loris Benito (pas vraiment arrière gauche) et des remplaçants comme Maxime Poundjé, vrai amoureux du club mais dont le niveau ne fut malheureusement pas toujours, justement, au niveau des exigences d’une entité ou d’une histoire comme la nôtre.

    Bien entendu, le début prometteur de nos jeunes pousses demandera une confirmation dans le temps. Si tel est le cas, notre jeu devrait être plus varié, moins prévisible et la côte de ces joueurs pourrait alors s’envoler bien au-delà du montant de leur option d’achat.

    Ensuite, remontant doucement le terrain, il était temps de s’occuper de l’entrejeu, un lieu où Bordeaux avait tellement été piétiné, écrasé la saison passée qu’il aurait fallu être fou pour repartir de la sorte !

    Avant le début du mercato, l’apport d’Issouf Sissokho a considérablement changé le visage apeuré du milieu bordelais. Par sa présence physique, sa densité, son insatiable envie de courir et d’harceler, il a rabattu les cartes dans une zone trop dépendante jusqu’à lors de son brésilien Otavio.

    Pour les accompagner ou leur permettre de souffler, le recruteur bordelais a ajouté le jeune lillois Junior Onana et si on y ajoute Tom Lacoux, ce secteur n’a jamais été aussi fourni depuis bien longtemps. Une concurrence saine pourrait tirer vers le haut le reste de l’équipe.

    Pour entourer cette jeune garde par son expérience, stabiliser le milieu et faciliter la transition avec les attaquants, les dirigeants ont choisi Fransérgio. On espère également plus de régularité chez ce joueur que chez le croate Toma Basic, trop souvent transparent ou en retrait malgré un talent indéniable. Il devra se faire violence pour franchir un pallier à la Lazio.

    24h de folie

    Dans les derniers jours du mercato, il était temps de s’intéresser à cette attaque en berne lors du précédent exercice. Alberth Elis avait lancé l’opération quelques jours avant la clôture du mercato mais tout le monde avait bien compris que d’autres mouvements allaient suivre. Malgré la priorité d’un 9, Bordeaux continuait ses emplettes avec un nouveau défenseur central (pas du luxe après les 9 buts encaissés en 4 rencontre), le rapide et rugueux Stian Gregersen et le virevoltant néerlandais Javairô Dilrosun. Dans l’après-midi, la rumeur enfle ! Ce n’est pas un mais deux buteurs qui arrivent pour pallier le départ de Josh Maja et Hwang Ui-Jo. Beto, le grand et puissant joueur de Portimonense et Mostafa Mohamed.

    On connait la fin de l’histoire et elle ressemble aux difficultés girondines dans ce mercato.

    Une file d’attente interminable et des questions

    Des transactions terminées, des accords avec le club et le joueur et pourtant aucune signature.

    Vitinho, Raul Gustavo, Jackson Porozo… devant l’incapacité de vendre, Bordeaux a fini par faire capoter de jolis coups et nous pouvons également en tirer plusieurs réflexions.

    • Malgré une volonté évidente, les caisses semblent bien vides et alors que nous sommes au début d’un projet, la question de la solidité financière de ces derniers fait débat. Au début de son aventure lilloise, Gérard Lopez avait les moyens de lancer la machine en déboursant des sommes plus importantes. Sans moyens, il a eu plus de difficultés à Mouscron et Boavista. Mais le dirigeant bordelais a surtout justifier cela par évidemment les demandes de la DNCG, et aussi le “nouveau monde” : “Les prêts avec option d’achat fonctionnent comme les achats normaux, c’est-à-dire que c’est très rare qu’on paye un joueur en une seule fois. Faire ou activer une option d’achat, c’est activer un tiers, un quart, ou un cinquième du prix. A partir de là, si parmi les joueurs qu’on a pris – et on espère que ce sera le cas pour tous – ils réussissent à apporter ce qu’ils doivent apporter au club, ce sera un investissement d’un quart ou d’un cinquième de la valeur du joueur. Chose que Bordeaux pourra faire. C’est comme ça qu’on a monté le projet, tout simplement parce que cette année c’est très compliqué d’aller dépenser de l’argent pour acheter des joueurs comme ça ».
    • Investir sur des joueurs comme Vitinho, Beto, Burak Kapakac… semblait plus à même de multiplier nos chances de démarrer au mieux sportivement et à moyen terme de capitaliser dans l’optique du trading. Mais encore une fois, le mercato n’est pas terminé, et il reste une place d’extra-communautaire de libre pour cet hiver…
    • Notre absence d’argent et notre incapacité dans l’ensemble à vendre nos joueurs, dont la côte a dégringolé en même temps que le club, donnent une impression bizarre de notre effectif. Si Bordeaux veut consolider son groupe l’année prochaine avec ses nouvelles recrues, Gérard Lopez devra débourser entre 20 et 30 millions d’euros pour lever les options d’achat, il faudra y rajouter le montant de la dette et du prêt. Cet effectif est bâti pour un an et non pour plusieurs années et du résultat de cette saison dépend de la survie de ses membres. N’oublions pas cependant que le déficit déminue du fait de la baisse de la masse salariale (on parle de près de 10M€, voire plus), et également la balance positive de ce dernier mercato estival.
    • Un double sentiment anime les supporters bordelais. Le plaisir d’avoir été sauvé de la relégation sportive puis judiciaire, et la délectation du départ de Frédéric Longuépée. La venue de Gérard Lopez a apporté un formidable enthousiasme et l’énergie de ce dernier est contagieuse, mais les résultats des 4 dernières rencontres (surtout ce 4-0 à Nice) et l’impression que le club est sur un fil avec un paquebot de plus de 40 joueurs sous contrat, commencent à devenir anxiogène. Il faudra vite gagner pour enclencher la machine.

    Conclusion – Un mercato animé, mitigé par les échecs de dernière minute, mais bon vu le contexte

    8 nouvelles têtes et un vrai renouvellement de l’effectif. Un véritable engouement pour ce mercato, nous n’avions plus l’habitude. Une équipe dirigeante, enfin, avec des idées.

    Un questionnement légitime sur les finances du club et la capacité de Gérard Lopez à faire face si les résultats ne sont pas rapidement au rendez-vous. C’est aussi pour cela que devant l’incertitude sportive, et même si Bordeaux s’est renforcé à tous les postes, que l’objectif de la première partie de tableau est maintenu.

    Une équipe avec de nombreux joueurs en prêt et en fin de contrat à l’issue de la saison, comment tous ces joueurs se comporteront si le club végète encore dans le ventre mou du classement en mars ou avril, quelles implications pour un club qu’ils s’apprêteront à quitter ?

    Espérons que la mayonnaise prenne rapidement, espérons que Hwang Ui-Jo ou Josh Maja puissent nous faire oublier l’absence de ce numéro 9 tant espéré.

    Enfin, n’oublions pas où nous étions il y a encore quelques mois et même si des doutes subsistent, accordons notre confiance (pas aveugle) à cette nouvelle équipe qui a au moins le mérite de connaître le sport dans lequel ils investissent.

    Le récap’

    Arrivées:

    • Gideon Mensah (Prêt, OA, Red Bull Salzbourg)
    • Ricardo Mangas (Prêt, OA, Boavista)
    • Alberth Elis (Prêt, OA, Boavista)
    • Timothée Pembélé (Prêt, OA, PSG)
    • Fransergio (Achat, Braga) -> 4.5M €
    • Jean Onana (Achat, Lille) -> 2M€
    • Stian Gregersen (Achat, Molde, SUE) -> 2M€
    • Javairö Dilrosun (Herta Berlin, ALL)
    • Yacine Adli* (Milan, ITA)

    Départs:

    • Nicolas De Préville (Libre)
    • Maxime Poundje (Libre)
    • Youssouf Sabaly (Libre)
    • Vukasin Jovanovic (Libre)
    • Loïc Bessile (Charleroi, BEL)
    • Alexandre Lauray (Le Mans, FRA)
    • Toma Basic (Lazio, ITA) -> 7M€
    • Yacine Adli (Milan AC, ITA) -> 10M€
    • Thomas Carrique (Celta Vigo, ESP)
    • Hatem Ben Arfa (Libre)
    • Jean Michael Seri (Retour de prêt)

    Prêts:

    • Raoul Bellanova (Cagliari, ITA)
    • Ismael Sow (Mouscron, Prêt sans OA, BEL)

    Résiliations:

    • Loris Benito (Libre)
    • Ruben Pardo (Libre, ESP)

    * Yacine Adli, a été définitivement transféré au Milan AC, mais est prêté dans la foulée au club Girondin jusqu’à juin 2022.