Interview Girondins4Ever. Entretien avec Frédéric Reculeau, entraîneur de La Roche Vendée Football
Avant la rencontre entre le club de La Roche Vendée Football et les Girondins de Bordeaux, comptant pour la 13ème journée du championnat de National 2, nous nous sommes entretenus avec Frédéric Reculeau, entraîneur de cette équipe. Un échange très agréable avec une personne qui veut aider le club à représenter fièrement la Vendée. Son projet, l’histoire du club, l’ambition cette saison, son groupe, les Girondins, les clés du match… Nous évoquons tout cela durant cet entretien.
Vous êtes originaire de Fontenay et avez été à la tête de Luçon (2005/2016), des Herbiers (2016/2018), d’Avranches en Normandie (2018/2022) et donc de La Roche Vendée depuis l’été 2022. On peut donc dire que vous êtes un gars du coin.
(sourire) Ouais, ouais je suis vendéen donc je suis revenu pour un projet justement lié au club et à la Vendée. C’est vrai que ça fait un petit moment qu’il n’y a pas eu de club de haut ou bon niveau en Vendée. Il y a beaucoup de bons clubs, ça va jusqu’en National. Il y a eu Le Poirée, il y a eu Fontenay, il y a eu Luçon. Toutes ces équipes se sont éteintes les unes après les autres. Il y a eu Les Herbiers… L’idée était de revenir à La Roche et de recréer un engouement sportif, que ce soit au niveau des jeunes puis après, surtout au niveau de l’équipe première. C’est un projet qui peut mettre du temps mais c’est un projet qui me tenait à cœur en tant que vendéen.
Pouvez-vous nous présenter le club de La Roche Vendée ?
Le club de La Roche Vendée Football, il y a très longtemps, il y avait deux clubs, l’AEP Bourg et le FC Yonnais. Les deux clubs ont connu la D2 professionnelle à l’époque. De ce fait là, il y a eu un club unique qui a été créé il y a quelques années. Ils sont descendus de D2 en National, puis il y a eu des descentes jusqu’en DH. Après, ils sont remontés en N3 puis ça faisait de nombreuses années que ce club voulait repartir et retrouver un petit peu un allant qui pouvait correspondre à la ville phare du département. C’est pour ça que quand le président m’a appelé il y a deux ans pour venir accompagner son projet, j’ai répondu parce qu’il y a un vrai potentiel dans ce département. On est limitrophe avec Angers et le FC Nantes. C’est vrai que ça a toujours été une culture foot dans la région et je me dis que ce club doit être à la hauteur de ce que peuvent attendre les vendéens. On a maintenant ce projet. On est montés la première année, il y a deux ans, de N3 en N2 donc c’était très vite. Puis l’année dernière on a loupé la montée d’un but donc c’est vrai qu’on aurait pu faire deux années extraordinaires et retrouver la N1 plus rapidement que prévu. Cette année c’est un peu plus compliqué. Due à notre grosse saison l’année dernière, on a été un peu pillés des joueurs qu’on voulait conserver, pour rebondir sur une deuxième année et confirmer la première. On a perdu des hommes forts à des postes clés. […] On vacille un petit peu, on n’est pas à la hauteur de ce qu’on pouvait espérer mais les deux premières années étaient très bonnes. C’est vrai que cette troisième l’est moins mais c’est comme ça. Ça fait partie du sport. Ce serait trop simple sinon.
Quelle est l’ambition première de l’équipe cette saison ?
Forcément que l’ambition est revue à la baisse. On était très ambitieux en début de saison. Malgré toutes les pertes qu’on a eu, on avait de l’ambition. C’est vrai qu’on s’est quand même dit qu’on repartait avec un effectif fortement remanié, comme on ne le voulait pas. On s’est dit qu’on allait avoir des ambitions mais aussi, du fait de ce mouvement important, que ça n’aille pas dans le sens qu’on le veuille et qu’on le voudrait. C’est ce qui s’est passé. C’est vrai que sur l’année dernière on a surfé sur la montée. On avait créé un groupe qui était en capacité de grandir, et c’est vrai que le fait de l’avoir un petit peu cassé cette année, ça nous met à mal. On le paye cash sur les résultats sportifs. Il faut reprendre un peu d’allant, il faut retrouver un équilibre, une stabilité, pour essayer de recréer quelque chose.
Vous avez plusieurs joueurs d’expérience dans votre groupe comme Anthony Civet, Jason Buaillon, Jonathan Beaulieu, Olivier Boissy et Alexis De Araujo. Qu’apportent-ils au-delà de leur vécu, à votre groupe ?
Je suis allé les chercher justement par rapport à ça, ayant perdu des joueurs peut-être moins glorieux sur leurs CV mais qui nous apportaient cet équilibre des deux années passées ensemble. Je me suis dit que l’expérience pouvait peut-être combler cette stabilité, avoir des ambitions en cherchant des joueurs expérimentés. Que ça pourrait peut-être prendre un peu plus vite. Il n’y a pas de mystère, ça ne se fait pas comme ça, il n’y a pas de baguette magique. Il faut du temps donc ces gens-là nous apportent leurs expériences. Mais ça reste beaucoup de nouveaux joueurs qui se découvrent donc ce n’est pas si simple que ça. C’est un projet avec une ambition élevée par rapport au recrutement mais c’est vrai que c’est revu à la baisse au vu de nos résultats. Ce n’est pas que les joueurs ne donnent pas ce qu’il faut, ce n’est pas que les joueurs ne sont pas à la hauteur. C’est un contexte, le ballon ne tourne pas dans notre sens, un poteau sortant, un carton pas donné, des penaltys non sifflés… Ce sont plein d’aléas qui font que la saison ne va pas dans le bon sens alors que l’année dernière ça tournait un peu mieux. C’est comme ça. Comme on leur dit, on essaye de leur redonner confiance, de les rassurer mais c’est vrai que ce n’est jamais simple.
Vous allez recevoir les Girondins de Bordeaux. Comment organise-t-on ce type d’événement ?
Au niveau du club, forcément qu’il y a un engouement fort au vu de la réception des Girondins. D’habitude on recevait la réserve (sourire), là c’est l’équipe première donc c’est un changement radical. Mais c’est plus au niveau de l’engouement et de la capacité. Le gros souci ou le gros questionnement du club depuis quelques semaines c’est est-ce qu’on va jouer à huis clos ? Est-ce qu’on va pouvoir avoir des spectateurs ? C’était un peu ça quand on voyait un petit peu les matchs autour de chez nous et tous les retours médiatiques qu’il y avait. Le club s’inquiétait de ne pas pouvoir mettre du monde dans son stade et faire de ce match un match de gala. C’était ça. Maintenant ils ont été rassurés il n’y a pas si longtemps que ça, pour leur dire qu’il y aurait des spectateurs. Avec les préfectures on ne sait jamais quelles orientations elles peuvent prendre. Après, nous, sportivement, la semaine reste identique, la projection reste identique. On ne pouvait pas espérer mieux […] On va essayer d’être à la hauteur sur ce match et sur le prochain. Mais sur ce premier match, on l’a préparé de façon traditionnelle. Il n’y a pas de préparation particulière, on les étudie de la même façon. On va mettre autant d’espoir que sur les autres matchs pour aller chercher des points. […] Qu’on soit en capacité d’offrir un bon spectacle de la part des deux équipes.
On a vu certains dirigeants être ravis d’avoir Bordeaux dans le groupe, d’autres méfiants pour une question d’équité. Quelle est votre position depuis la confirmation que les Girondins seraient dans ce groupe B de National 2 ?
… Je ne vais pas prendre parti parce que je serais partagé. Je pourrais avoir un pied dans un groupe et un pied dans l’autre parce que quand on voit la dureté que peut nous mettre la DNCG par rapport à certains règlements pour les clubs amateurs, pour des petites malfaçons, des petites malveillances et qu’on peut être sanctionné d’une façon assez importante. Et quand on voit, sans manquer de respect au club, comment ils ont fini et être en capacité de repartir à ce niveau-là avec l’investissement qu’ils peuvent mettre. Je pense qu’il y a malgré tout des investissements au niveau financier, moins importants qu’en Ligue 1 mais il y en a. Alors que nous, au moindre écart, on est sanctionné de façon violente. C’est pour ça que j’ai le pied dans cette partie-là. Puis de l’autre côté, forcément qu’en tant qu’entraîneur je me réjouis d’avoir un club comme Bordeaux dans le groupe et d’affronter ce type d’équipe. Mais c’est vrai qu’on est un petit peu dans la bouteille à moitié pleine, à moitié vide. Soit on se conforte de jouer ce type d’équipe parce que c’est pour ça qu’on fait du foot, soit on est un plus pragmatique et un peu plus dans la réalité des choses et on est un peu plus durs dans notre jugement. Je suis partagé mais il y a mon côté entraîneur aussi malgré tout, qui fait que je suis hyper heureux de rencontrer ce genre d’équipe.
Vous avez parlé de match de gala. Est-ce que ce match se prépare comme un autre ou plutôt comme un match de Coupe ?
Ouais, mais on ne va pas l’aborder comme un match de coupe. On va l’aborder comme un match de gala parce qu’on espère que le stade sera plein, que ce sera la fête. Mais le match en lui-même, je ne vais pas emmener les joueurs dans cet état d’esprit. On sait que c’est un match important et j’ai envie de vous dire que pour un entraîneur, ce type de match est facile à préparer. Quand on rencontre les Girondins, c’est plus facile pour moi de le préparer, que pour mon homologue, de rencontrer La Roche Vendée Football. Ce sera un match de foot, il y a trois points à prendre pour l’une ou pour l’autre équipe. C’est vrai que la particularité c’est qu’on affronte les Girondins de Bordeaux, mais pour moi ça reste facile à préparer.
On a vu que depuis le début de la saison, le club avait fait le choix de ne pas faire diffuser les matchs. Est-ce que vous en avez la ou les raisons ?
Non, non, je n’étais pas forcément au courant. Je ne savais pas que les clubs faisaient des matchs en direct. Je sais qu’on a une plateforme où on récupère nos matchs et où on étudie nos adversaires à partir de la plateforme. Par rapport aux plateformes qu’on a entre entraîneurs. Je sais qu’on a une télé locale, on a aussi un partenaire privé qui filme de temps en temps les matchs. Mais je n’ai pas du tout eu vent de cette histoire de programmation acceptée ou non.
Vous restez sur une belle qualification en Coupe de France à l’extérieur à Orléans (club de N1), puis un match nul à Bourges en championnat. Pourtant votre classement (14ème) ne reflète pas les derniers résultats. Comment l’expliquez-vous ?
C’est un mauvais départ, des blessés pas prévus, un effectif remanié. Il y a des joueurs qui ont quitté le groupe donc on a restructuré un peu le groupe, retrouvé un projet commun ce qui fait qu’on est reparti sur une nouvelle dynamique. Maintenant elle est fragile parce que notre classement fragilise un petit peu notre fonctionnement quotidien. Mais j’ai un groupe qui est studieux, qui est attentif, qui veut bosser, qui veut progresser. Donc à partir de là, on essaye d’avancer. On produit plus de jeu depuis un certain temps malheureusement on n’est pas assez performants dans notre animation offensive. C’est là-dessus qu’on a des manques et c’est là-dessus qu’on doit réellement avoir un vrai axe de progrès pour pouvoir aspirer à autre chose. Défendre c’est bien, jouer au foot c’est bien mais après la principale des choses c’est de marquer des buts et faire en sorte qu’on en est un de plus que l’adversaire. Actuellement c’est notre grande difficulté. Je suis malgré tout satisfait de ce qu’on produit, maintenant il nous manque les points. Sur de nombreux matchs on aurait mérité de prendre plus de points que ce que l’on a actuellement. Mais c’est un fait qu’on ait ce classement-là et qu’on ait eu aussi des défaillances pour ne pas prendre ces points-là. Donc à nous de bien les situer et surtout de faire en sorte qu’elles évoluent dans le bon sens.
Est-ce que vous avez une opération anti Andy Carroll ou pas du tout ?
Non, je pense que c’est un ensemble honnêtement. Il y a Andy Carroll qui fait beaucoup de bien à cette équipe mais je pense qu’il y a aussi des gens autour de lui qui permettent d’avoir une animation offensive qui reste intéressante. Maintenant, vous restez les Girondins de Bordeaux, vous restez une équipe qui crée le questionnement dans ce groupe-là, entre ceux qui sont contents de les avoir et ceux qui les détestent. Donc ça crée un engouement dans chaque équipe qui les rencontre et ça va devenir de plus en plus dur pour cette équipe-là de gagner 4-0 à chaque match. La N2 reste la N2, même si ce n’est pas le professionnalisme, mais on s’en rapproche. Ce ne sera pas simple, tout Andy Carroll qu’il est, tous Girondins de Bordeaux qu’ils sont. Je ne sais pas si c’est le terme que chaque club utilise mais je pense que c’est un match de coupe pour toutes les équipes qui rencontrent les Girondins. Peut-être que les équipes se subliment sur ces matchs-là, peut-être que tout le monde a envie de faire des Girondins son trophée, je n’en sais rien. Ce n’est pas simple d’être un cador, ce n’est pas simple d’être une équipe qui doit tout le temps réussir. Peut-être que les équipes se regroupent un peu plus, peut-être que les équipes laissent moins d’espaces sur le plan offensif pour les Girondins. Ce n’est pas simple le foot. Il y a un peu de leur part aussi, peut-être à faire évoluer les choses pour pouvoir contrecarrer les plans adverses. Mais je ne vous l’apprends pas, ce ne sera pas simple pour eux.
Quelles seront les clés pour réussir un grand match face aux Girondins ?
Je pense qu’il faudra qu’on les embête. Je pense que si on les embête on mettra à mal leur assise et leur sérénité, comme toute équipe. L’équipe qui pense avoir le match en gestion, c’est une force. Maintenant, si cette équipe qui pense avoir ce match en gestion, comme Bordeaux le fait souvent, est embêtée par les plans adverses ou par l’animation adverse, tous joueurs qu’ils sont et tout Bordeaux qu’ils sont, auront des moments de flottement. Ils auront des moments où ils seront mis en difficulté. Donc il faudra qu’on soit en capacité, au-delà d’être costaud défensivement face à Andy Carroll ou consorts, d’animer et de jouer notre football. Etre en capacité de les mettre à mal sur des situations de jeu en se créant des occasions tout simplement.
Que peut-on vous souhaiter pour la suite de la saison ?
Vous savez, on sait maintenant que notre saison est un peu galvaudée par ce départ. Donc qu’on finisse de la meilleure des façons, qu’on arrive à aller chercher du plaisir dans ce qu’on veut produire. Je suis un entraîneur qui aime voir son équipe jouer, sinon ce métier ne servirait pas à grand-chose si on était juste là pour des résultats. Je vais chercher autre chose, je vais chercher une équipe en capacité de vouloir jouer. C’est ce que j’ai envie de voir sur cette fin de championnat. Je suis convaincu que si on joue et si on arrive à mettre en place notre projet de jeu et notre jeu, on ira chercher des points et on ira chercher un maintien. Je ne dérogerai pas parce que je suis convaincu que c’est par là qu’on réussira.
Un GRAND MERCI à Frédéric Reculeau pour sa disponibilité et sa gentillesse.