[Interview G4E] Luc Davaillon (Stade Poitevin) : “Bordeaux est malgré tout une des rares équipes de la poule qui a annoncé jouer l’accession en Ligue 3”

    Avant la rencontre entre le club du Stade Poitevin et celui des Girondins de Bordeaux, comptant pour la 7ème journée du championnat de National 2, nous nous sommes entretenus avec Luc Davaillon, entraîneur du club poitevin depuis 2023. Avec lui nous évoquons le maintien du club en National 2, les confrontations face aux Girondins, l’épisode de la DNCG, les recrutements, les Girondins, le match à venir et bien d’autres sujets… Interview. 

    Après une montée de National 3 à l’issue de la saison 2023/2024, vous vous êtes maintenu à la dernière journée la saison dernière. Pouvez-vous revenir sur cette première saison en N2 ?

    Elle a été très formatrice on va dire pour l’équipe puis pour le club puisqu’on a fait une très belle première partie de saison, où au mois de Décembre on devait être troisième. Puis malgré tout, on a eu un manque d’effectif en deuxième partie de saison et des difficultés qui ne nous ont pas permis d’être stables dans cette première partie de championnat. Du coup on a vu aussi, c’est là où je dis aussi que c’est formateur, c’est que c’est une poule qui est très dense, avec un niveau très homogène. Donc tout le monde peut battre tout le monde et des mauvaises séries peuvent arriver à tout le monde. C’est ce qui nous est arrivé malgré qu’on ait fait une bonne première partie de saison. On a eu une mauvaise série due à pas mal de choses et il a fallu qu’on aille chercher le maintien lors de cette dernière journée. On est très heureux d’avoir acquis ce maintien sur le terrain, parce que ça montrait aussi que le travail avait été fait aussi en partie. Malgré tout, ça nous a permis de tirer des leçons et des enseignements cette saison, et nous de structurer les choses différemment pour cette saison, qu’on ne se mette pas le feu comme l’an passé.    

    Vous avez croisé la route des Girondins très tôt, avec un match nul 1-1 et ce but du gardien Lassana Diabaté à la 95ème… Quand on y repense, c’est quand même un sacré scénario ?

    Je m’en souviens aussi (sourire). Oui, oui, c’est un sacré scénario, après c’est un peu particulier. Déjà, le match était à huis clos, c’était le premier ou le deuxième match des Girondins je crois, en tout cas c’était le premier match à domicile. C’était un match où il y avait peu de rythme, on menait 1-0 en début de deuxième mi-temps et on s’est un petit peu reposés sur ce but marqué. Tout le monde pensait que ce match était terminé et sur un coup-franc anodin en milieu de terrain c’est votre gardien qui fait l’exploit de ramener l’équipe et d’obtenir le match nul. C’était un mauvais moment pour nous (sourire) mais malgré tout, ça fait partie des choses sur lesquelles il faut s’appuyer pour tirer des enseignements et puis avancer.  

    (Photo by Loic Cousin/Icon Sport) – Photo by Icon Sport

    Au match retour à Poitiers, les Girondins s’étaient imposés 2-1 après que vous ayez ouvert le score dès la 3ème minute. Que vous a-t-il manqué pour tenir ce match ?

    Il nous avait manqué un peu de sérénité, un peu d’expérience. Ça fait partie des choses qu’on a retenu sur la saison passée. On avait beaucoup de joueurs qu’on avait conservé de la montée de National 3 en National 2 et peut-être qu’il nous a manqué un peu d’expérience justement pour gérer ces moments-là. Ce match-là était plutôt équilibré même si Bordeaux avait fait un bon match et nous avait fait reculer après l’ouverture du score. On menait au bout de trois minutes de jeu donc c’est toujours un peu particulier d’ouvrir rapidement le score parce qu’on rencontre une belle équipe. On ne sait pas trop si on doit essayer de conserver cet avantage ou l’aggraver. Au final, maintenant tout ça est passé (sourire) mais j’étais un petit peu agacé après l’arbitrage parce que j’avais trouvé que le penalty qui avait été accordé à Bordeaux était généreux. Ca fait partie des faits de jeu, et nous derrière, en deuxième mi-temps on aurait pu obtenir un penalty à un partout, qui n’a même pas été sifflé. Enfin bon, ça fait partie des choses et au final c’est Bordeaux qui avait poussé en fin de match et qui avait mis ce deuxième but.      

    Cet été le club a dû batailler pour se maintenir administrativement en National 2. Comment avez-vous vécu cette situation ?

    Quand on est coach et qu’on doit préparer son effectif pour la saison suivante, être dans des conditions comme celles-là c’est toujours délicat. Mais on est un club qui est sur des valeurs assez importantes et du coup notre président, dès la première décision de la DNCG, avait donné sa parole qu’il ferait tout, qu’on n’avait pas de questions à se poser, que le club serait en National 2. Qu’il ferait ce qu’il fallait pour passer devant la DNCG en deuxième instance. Il a respecté ce qu’il a dit donc du coup, par rapport à ça c’est aussi une question de confiance Effectivement c’était délicat parce que l’appel était assez proche de la fin des transferts, donc c’était délicat pour constituer l’effectif. Mais on a travaillé en amont avec le président pour avoir des joueurs. Ils attendaient uniquement la confirmation en appel, qu’on soit en N2. C’est ce qu’il s’est passé donc du coup, derrière il n’y avait plus que des validations à faire avec des joueurs. On n’a pas cherché de joueurs après la validation de la DNCG. 

    Ce maintien en appel a dû être un soulagement, mais le coach que vous êtes à dû se faire du souci par rapport au retard dans le recrutement ?

    Si c’est une bonne chose que les joueurs aient donné leur parole ? Exactement, c’est ce qu’il s’est passé. C’est toujours délicat. Déjà que la période du mercato n’est jamais simple (sourire) parce qu’il faut déjà trouver des joueurs qui correspondent au projet, trouver des joueurs qui rentrent dans nos capacités financières, et en plus, avoir des joueurs qui donnent leur parole et qui s’engagent ce n’est pas toujours évident à trouver. Du coup on a réussi à faire ça pendant la période où le club n’était pas sûr d’être en N2. Puis dès que ça a été validé à à DNCG, on a juste eu besoin de valider les joueurs, ils ont tous respecté leurs paroles, c’était très bien.  

    De son côté Bordeaux a changé une bonne partie de l’effectif en recrutant notamment plus de joueurs estampillés N2 ?  Avez-vous pu suivre celui-ci ?

    J’ai suivi, un peu comme toutes les autres équipes pour savoir un petit peu (sourire) quels seraient les effectifs dans notre poule. Donc oui, oui, j’ai vu que l’effectif avait été beaucoup remanié à Bordeaux. Après, ça fait partie de la vie de certaines équipes. Est-ce que c’est un gage de réussite ou non ? Parfois on se dit que c’est ce qui fait que c’est difficile pour que la sauce et la mayonnaise prennent comme on dit. Mais malgré tout ce n’est pas forcément un non gage de réussite. Je prends l’exemple du Puy, qui est monté l’an passé de National 2 en National 3. Pour avoir suivi un petit peu, c’est une équipe qui avait presque remanié tout son effectif. Ce qui est important c’est d’avoir un cadre fort. Je pense qu’à Bordeaux ils l‘ont parce que c’est une institution et une entité forte. Après, c’est plus aux joueurs de rentrer dans le moule et d’apporter ce qu’ils savent faire, au projet de jeu de l’entraîneur et aux valeurs du club.

    Bordeaux a pourtant axé son recrutement sur un peu plus de joueurs connaissant le niveau, mais ça a du mal à prendre. Etes-vous surpris ? 

    Je ne connais pas suffisamment… Je vais être honnête avec vous, je ne connais pas suffisamment la valeur des joueurs de Bordeaux qui ont été recrutés, pour savoir si c’est une surprise ou pas. Ce qui ne me surprend pas par contre c’est le niveau assez homogène de notre poule. On voit depuis le début de la saison que comme l’an passé, il y a très peu d’équipes qui vont pouvoir… faire des séries, oui, mais par contre de rester en haut et d’être constant en haut c’est vraiment très compliqué parce que tout le monde est capable de battre tout le monde. Même des équipes qu’on pensait en difficulté au début… Je prends un exemple comme Dinan, chez qui on est allé gagner 1-0 en début de saison, ils ont réussi à faire des très bons résultats derrière parce que ce sont des équipes et des clubs qui sont habitués à ces joutes de National 2. Après avoir travaillé sur leurs effectifs, ils sont capables de proposer quelque chose d’intéressant et d’embêter n’importe quelle équipe de la poule.      

      

    Finalement le Stade Poitevin fait une bonne entame de saison avec une 4ème place et 11 points au compteur ?

    Sur les six premiers matchs de la saison on est à trois victoires, deux nuls et une défaite. On a un petit peu en travers de la gorge (sourire) le fait d’avoir pris 4-0 lors du dernier match de championnat. Ça fait partie de la vie d’une équipe et d’une saison, mais malgré tout on est satisfaits de notre entame de championnat. Après avoir vécu une deuxième partie de saison compliquée l’an passé, il fallait qu’on inverse la tendance et qu’on reprenne de la confiance pour se dire qu’on était au niveau et qu’on était capables d’avoir notre mot à dire dans cette poule. 

    L’objectif est-il malgré tout le maintien en National 2 ou est-ce qu’on revoit celui-ci à la hausse ?

    Non, notre objectif sportif on l’a annoncé au départ, c’est-à-dire que l’an passé on s’est maintenu à la dernière journée. On a une année de plus d’expérience. Dans notre recrutement on a cherché à faire venir des joueurs expérimentés justement à ce niveau-là de National 2, pour mieux gérer les événements que l’an passé. Notre objectif sportif est d’évoluer et donc du coup une évolution pour nous ce serait de finir dans la première partie du championnat. Il y a une expression dans le sport qui dit “Quand on n’avance pas, on recule” (sourire) donc du coup notre objectif c’est d’essayer d’avancer. On y arrivera ou on n’y arrivera pas mais en tout cas on a cet objectif commun au sein du club et avec notre effectif de National 2. 

    Les bordelais sont derrière à trois points avant de venir à Poitiers. Comment on aborde cette rencontre ?

    On l’aborde… On est en construction au niveau de notre équipe puisqu’il y a eu beaucoup de changements, il y a beaucoup de nouveaux joueurs. On se focalise surtout sur notre jeu, sur ce qu’on doit améliorer. On n’est vraiment pas satisfaits de la dernière prestation contre Avranches et on veut surtout rectifier ça avant de penser au fait qu’on joue les Girondins de Bordeaux et ce n’est pas de la langue de bois. On jouerait une autre équipe, on serait aussi dans cette dynamique. On ne veut vraiment pas faire de fixette sur Bordeaux même si on est tous conscients que c’est un match différent. C’est un match différent dans notre poule parce qu’il y a plus de supporters, parce qu’il y a une ferveur autour des Girondins de Bordeaux, et c’est tout à fait normal, qu’il n’y a pas autour des autres équipes de notre poule. Malgré tout je pense qu’il ne faut pas se tromper de combat, notre objectif est vraiment de se focaliser sur notre façon de jouer au foot et comment on va aborder les événements samedi soir pour faire la meilleure performance possible.

    Est-ce que le match de Coupe de France et cette victoire 3-1 à Aubusson vous a permis de préparer ce match de championnat ?

    C’est particulier, c’est différent. Là on était sur un match complètement différent, avec des conditions de jeu complètement différentes. C’est important de passer puis de rester dans cette compétition parce que c’est une compétition, vous le savez très bien, qui peut valoriser un club, une équipe. Si elle fait une grosse performance ou qu’elle peut attirer une grosse affiche dans son stade, pour tous les clubs c’est une compétition à part. Mais ce n’était pas l’objectif prioritaire de préparer Bordeaux contre Aubusson, non.

    (Photo by Anthony Dibon/Icon Sport) – Photo by Icon Sport

    Vous sortez d’une lourde défaite 4-0 à Avranches lors de la précédente journée. Que s’est-il passé pour avoir eu ce trou ?

    Ce trou, je ne sais pas. Je n’avais pas fait énormément tourné parce que les cinq premiers matchs de championnat nous avaient donné des garanties sur la prestation et les performances du niveau des joueurs qui avaient été alignés. Donc peut-être que nos joueurs ont eu un petit coup de fatigue. On est aussi tombés sur une très belle équipe d’Avranches qui a bien joué au foot et qui nous a mis en difficulté. Puis il y a un joueur qui nous a mis un triplé, je pense qu’il était en totale réussite (sourire) ce jour-là. Nous on a eu du mal à se trouver, on a eu du mal à enchaîner techniquement dans le camp de l’adversaire. C’est une combinaison de choses qui font qu’on est passés à côté et qu’Avranches a totalement mérité sa victoire. 

    Les Girondins ont du mal en ce début de saison. Est-ce qu’on part confiant ou méfiant ?

    On est toujours un petit peu méfiants (rires). On est toujours méfiants. Bordeaux, malgré le classement aujourd’hui qui n’est pas forcément significatif parce qu’il y a très peu de journées de jouées, c’est malgré tout une des rares équipes de la poule qui a annoncé jouer l’accession en Ligue 3. Donc du coup on serait un peu innocents, présomptueux, de ne pas se méfier des Girondins de Bordeaux quand même ! Ce n’est pas de la crainte, on va les étudier, on les étudie d’ailleurs déjà (rires), de la même façon que les autres équipes. Puis on va être professionnels et consciencieux pour la préparation de notre match, comme toutes les autres équipes. Ce n’est pas de la méfiance, ce n’est pas le terme que j’emploierais, c’est le fait d’être sérieux et de prendre les choses comme elles viennent, avec le plus de rigueur possible parce qu’on sait très bien que Bordeaux a de très bons joueurs. On ne peut pas annoncer une montée en Ligue 3 sans avoir de la qualité dans l’effectif.

    Les Girondins semblent évoluer dans un 3-5-2 cette saison, est-ce que c’est également votre style de jeu ou avez-vous plutôt un système hybride qui s’adapte en fonction des adversaires ?

    Ca, vous verrez samedi soir (rires). Je ne veux pas vous embêter mais vous verrez ça samedi soir. En tout cas ce qui est sûr c’est qu’on a bien regardé Bordeaux, comment ils jouaient puis on n’essaye pas que de s’adapter parce qu’on a aussi envie d’imposer notre façon de jouer. Mais oui, on est capables en fonction de notre adversaire, de faire évoluer certains joueurs de façon différente.

    Quelles seront les clés du match selon vous ?

    Je pense la réussite et l’efficacité. J’espère ne pas me tromper mais je pense que ça va être un match serré avec, comme beaucoup dans ces matchs-là, très peu d’occasions. En tout cas je parle pour nous, je ne sais pour les Girondins (rires). Je pense que l‘efficacité et parfois la réussite font sans doute la différence. Pour moi, l’efficacité et la réussite viennent aussi avec un conditionnement mental qui fait qu’on est sur le terrain sans se poser de questions, en ayant envie de prendre du plaisir, en ayant envie de faire mal à l’adversaire avec le ballon. C’est un état d’esprit global. La réussite, c’est ce qu’on va chercher en général. Si cela risque aussi être une bataille du milieu ? C’est possible… C’est possible qu’il y ait une bataille au milieu de terrain. Après, comme tous les matchs aussi dans notre poule. Mais ce qui est agréable c’est qu’on va jouer dans de bonnes conditions, on a le terrain qui a été refait cet été. Nous aussi on a eu une maladie, c’est pour ça qu’on a dû jouer à l’extérieur. Là ça va être le deuxième match à domicile, il va y avoir des très bonnes conditions de jeu donc c’est déjà un point important pour que les deux équipes et les spectateurs passent un bon moment.

    Un GRAND Merci à Luc Davaillon pour sa disponibilité et sa gentillesse.