Huard : « Diabaté n’a pas compris »
Interview aujourd’hui dans So Foot, de Gaëtan Huard. Voici ses propos avec notamment ce qui s’est passé à la mi-temps de Toulouse-Bordeaux.
Quelles sont les qualités requises pour être un bon
homme de terrain ?
Avoir été joueur de football. Pour être un bon homme de
terrain, il faut avoir été sur le terrain.
A la mi-temps et en fin de match, vous n’avez pas
beaucoup de temps pour interviewer les joueurs. A quel moment
choisissez-vous vos questions ?
Ce qui est compliqué, c’est qu’on ne peut rien prévoir, rien
anticiper. Le week-end dernier, par exemple, je travaillais sur
Toulouse-Bordeaux. J’avais calé avec le média manager les deux
joueurs que je voulais retenir, à savoir le jeune gardien bordelais
Abdou Keita et Franck Tabanou qui avait raté son penalty, parce que
je pensais que cela avait été le moment crucial du match. Le but
d’Emmanuel Rivière en toute fin de partie a tout fait tomber à
l’eau. Hormis les questions d’avant match qui sont orientées selon
la ligne éditoriale choisie par le journaliste, tout le reste c’est
de l’improvisation. Il faut sentir le jeu et connaître le football,
c’est pour cela qu’il faut avoir été joueur. Selon les
circonstances, il y a également des choses qu’on ne peut pas
demander. Tous les moments ne sont pas propices à n’importe quelle
question.
Justement, à la mi-temps de Toulouse-Bordeaux, vous
avez eu un petit moment de tension avec le Bordelais Cheick
Diabaté…
Il n’a pas du tout compris ma question. Je suis allé le voir
après, là-dessus il n’y a rien qui me dérange. Ce genre de
quiproquo m’est déjà arrivé, notamment avec Jacques Santini.
Généralement, je perce l’abcès (sic) dans les dix minutes qui
suivent. Là j’ai attendu que Diabaté sorte des vestiaires, et je
lui ai dit qu’il ne m’avait pas compris. Certes, je suis un
journaliste/consultant, mais je suis avant tout un homme de
terrain, un joueur de football. Je ne suis pas là pour trahir ou
blesser qui que ce soit. Ma question à Cheick Diabaté était toute
simple, je faisais référence ironiquement aux joueurs que Francis
Gillot avait envoyés en réserve (Henri Saivet, Anthony Modeste et
Fahid Ben Khalfallah, ndlr). Mais il y a des gens à qui il ne faut
pas poser trop de questions parce qu’ils ne comprennent pas
forcément tout.
Est-ce qu’il y a des joueurs qui demandent à être
interrogés au bord du terrain ?
Un grand joueur, c’est un joueur qui est capable en toutes
circonstances de répondre intelligemment à un journaliste, de
manière simple et posée. Il n’y a aucune honte à dire « je ne
suis pas dans mon match, je ne suis pas bon, j’ai raté telle ou
telle chose… ». Ce n’est jamais moi qui irait le voir en lui disant
« t’as les pieds carrés aujourd’hui, tu fais pas une passe,
etc.. ». C’est à moi de savoir ce que jeux demander ou pas. Pour en
revenir à votre question, aujourd’hui il y a plus de joueurs qui
refusent que de joueurs qui acceptent de se faire interroger. Nous,
les médias, cherchons de plus en plus à faire du sensationnel, à
aller droit au but. Au montage, la plupart du temps on ne garde pas
la question du journaliste. Et quand vous ne gardez que la réponse
du joueur, vous pouvez très bien la traiter hors-contexte. Les
joueurs se méfient beaucoup de cela. Je suis persuadé
qu’aujourd’hui, on est en train de tuer le journalisme de bord de
terrain. On veut de plus en plus rentrer dans les mecs et on a de
plus en plus de mal. Nous ne sommes pas toujours satisfait du
comportement de certains joueurs lorsque nous les sollicitons, mais
d’un autre côté il faudrait arrêter de sans cesse leur taper
dessus. Des mecs qui ont les pieds carrés, j’en vois beaucoup. Mais
est-ce qu’on est obligé de le dire ? Il faut mettre les
formes. On a choisi des gens comme moi pour être homme de terrain
parce qu’on est des anciens joueurs et qu’on peut ouvrir des
portes. Et aujourd’hui, on nous referme des portes parce qu’on
essaie qu’il y ait moins de relations entre les joueurs et l’homme
de terrain. Si j’ai des échos ou des choses intéressantes à dire,
c’est parce que je les ai obtenues en off et que j’ai appris à les
exploiter. Et ça, c’est de plus en plus compliqué. Je sais ce qu’on
recherche et ce qu’on demande. On reçoit des ordres de Paris pour
orienter les questions, ce qui est logique parce qu’on veut aller
tout de suite au coeur du problème, mais pour obtenir des réponses
qui peuvent déranger, il faut une certaine préparation. Je ne dis
pas qu’il ne faut pas dire les choses, de toute façon, à la
télévision, on ne peut pas dire le contraire de ce qu’il se passe à
l’image, contrairement à la presse écrite.
Vous n’avez jamais eu envie de monter en tribune de
presse pour commenter les matchs en entier ?
Cela m’arrive de temps en temps, par exemple ce soir je
commente Bordeaux-Lille
pour Gold FM, la radio officielle des Girondins.
Vous avez un pronostic pour ce
match ?
Je vais vous dire une expression que beaucoup n’aiment pas
entendre : j’espère que ce sera un match référence (pour
Bordeaux, ndlr). Ce serait bien que les Girondins gagnent et
reprennent confiance.
A vous entendre, vous êtes ouvertement supporter
bordelais.
Je suis le premier supporter des clubs dont j’ai défendu les
couleurs. A savoir Lens, Marseille et Bordeaux. Mais j’ai une
affection toute particulière pour les Girondins, étant donné que je
vis dans la région bordelaise et que je passe du temps avec
certains joueurs.
En dehors du journalisme, comment se passe votre
reconversion ?
J’ai monté un concept de kiosques, d’instituts d’ongles dans
les centres commerciaux en 2007.