[Exclu] T. Genoux : « Je m’étais attaché à cette région, à mon groupe et aux supporters »
Pour nous, il est incontestablement l’une des clés de la réussite et de la montée de l’équipe féminine des Girondins de Bordeaux en première division. Théodore Genoux n’est aujourd’hui malheureusement plus lié au club au scapulaire pour une histoire de diplômes, qu’il n’avait pas en intégralité. Comme quoi, le talent et l’énergie ne sont pas que sur un bout de papier, mais aussi dans le ressenti, le don de soi, et la manière de gérer un groupe. Car Théodore, au bord du terrain et dans ce qu’il fait, est un hyperactif. Remuant ses filles, les encourageant, les félicitant, il nous a semblé vraiment juste dans son coaching et surtout investi. Pour Girondins4ever, il revient sur cette saison à rebondissements, du jour où Anthony Vigneron l’a rejoint pour répondre aux exigences de la Fédé, en passant par le sacre des Girondines en D2, et en évoquant bien sûr sa fin d’aventure avec Bordeaux et son avenir qu’on lui souhaite radieux… Mais nous n’avons aucun doute là-dessus. Interview.
Tu pars comme l’entraineur numéro 1 et très vite, on te
met Anthony Vigneron avec toi… Comment as-tu vécu cette arrivée
?
On a appris subitement que je n’avais pas les diplômes requis pour
entraîner la D2 et son arrivée était primordiale pour me couvrir
sur le banc de touche. Au début, il y a eu un temps d’adaptation,
le temps d’apprendre à se connaître. Mais ensuite tout s’est bien
passé. Je ne l’ai pas trop mal vécu.
Ça ne doit pas être si évident à gérer de partir avec un
groupe, et d’ensuite se partager les rôles… Y avait-il une sorte de
hiérarchie ?
Non, il n’y a eu aucun problème car chacun avait son rôle : Anthony
intervenait en tant que préparateur physique avec le groupe et moi
je restais l’entraîneur principal qui animait toutes les séances
d’entraînement, je restais donc décisionnaire. Le changement était
administratif pour répondre aux exigences de la FFF. Donc pour le
groupe rien n’avait changé, on avait seulement un staff renforcé
avec l’arrivée d’un préparateur physique.
Vous ne semblez pas du tout avoir les mêmes caractères,
la même expression, etc…
En effet, Anthony est quelqu’un de très calme et sur la retenue,
moi contrairement à lui je suis quelqu’un qui vit les matches, qui
vit les séances d’entraînement dans la passion que j’essaie de
transmettre aux filles. J’ai une vision « espagnole » du
foot. Mes modèles sont Diego Simeone et Marcelo Bielsa, deux
entraîneurs très actifs lors des séances d’entraînement et lors des
matches.
As-tu senti que les filles perturbées par cette arrivée
? Même si au final, ça ne s’est pas du tout ressenti sur le
terrain…
Non, pas du tout car en interne rien n’avait changé. Ma relation
avec les filles était la même. En termes de décisions
notamment.
Malgré tout cela, vous voilà champions au terme de la
dernière journée… Comment as-tu vécu la dernière semaine
d’entrainements ?
Moi, je savais que j’avais un groupe extraordinaire en ce qui
concerne la personnalité et le don de soi. Dès le lundi de la
dernière semaine je leur avais dit que j’avais entièrement
confiance en elles pour gagner ce match. J’étais persuadé que
j’allais gagner ce match. J’avais fait une préparation identique à
tous les autres rencontres de championnat, avec une semaine de
travail intensive avec quatre séances d’entraînement, avec un gros
travail tactique sur l’adversaire, sur les points faibles et points
forts.
Arrive le jour J. Peux-tu nous raconter ta journée
jusqu’au coup de sifflet final ?
J’ai décidé de ne rien changer à nos habitudes. Le réveil s’est
fait à 7 heures du matin, avec un petit déjeuner à 8 h 30, une
promenade à 9 h 15 et j’en profite pour donner mes dernières
consignes tactiques individuelles aux joueuses. Une collation à 11
h 15. Départ pour le stade, de l’hôtel à 12 h 30. Arrivée au stade
à 13h, puis reconnaissance du terrain, les filles se changent, on
passe à la causerie d’avant match, à l’échauffement et à 15h c’est
le début du match.
Coup de sifflet final avec la victoire, qu’est-ce qu’il
te passe par la tête ?
Beaucoup d’émotion et une grande satisfaction après un travail
acharné avec les joueuses pendant un an, c’est la récompense après
beaucoup de sacrifices. Une grande fierté pour mes filles qui ont
été extraordinaires et fidèles à mes idées toute l’année.
Et puis, on entend des interviewes de toi, faisant le
bilan de la saison, te projetant déjà vers l’avenir et la saison
prochaine en D1… On a entendu Ulrich Ramé démentir que tu ne serais
pas prolongé, et deux jours plus tard le club lance ce communiqué…
Comment as-tu appris la nouvelle ?
Dès le départ je me suis senti bien aux Girondins et je n’ai jamais
caché mon désir de continuer l’aventure. J’ai eu une grande
déception car je m’étais attaché à cette région, à mon groupe et
aux supporters avec qui j’avais une relation fusionnelle et qui ont
été incroyables lors de nos déplacements.
La raison, par voie officielle, est que tu n’as pas les
diplômes. Y’en a-t-il une autre selon toi ?
C’est l’unique raison qui m’a été donnée et je le crois.
Il y a vraisemblablement quelque chose qui t’a tout de
même été proposé par le club. Pourquoi avoir refusé ?
L’unique proposition qui m’a été faite c’est de travailler dans le
recrutement pour la section féminine. Cela ne m’intéressait pas car
mon truc c’est l’entraînement, animer une séance et avoir la
pression chaque dimanche. Je passerai mon BEF cette année et pour
ce diplôme je dois entraîner une équipe.
C’est quoi la suite, maintenant ?
Je vais commencer à suivre ma formation en réalisant les tests et
les oraux dans le Sud de la France. J’ai quelques touches et je
préfère prendre la bonne décision en prenant le temps de réflexion
nécessaire. Mes envies c’est d’essayer de rester dans le haut
niveau féminin. Je n’exclus pas un jour un retour aux Girondins de
Bordeaux car j’aime ce club et leurs supporters.
Revenons au groupe, qui va donc accéder en Ligue 1. Tu
disais qu’il y avait un très grand écart entre les deux premières
divisions…
Oui, pour moi l’équipe doit se renforcer avec deux filles par
ligne. Car un groupe a besoin de se régénérer pour avancer. C’est
le projet que j’avais proposé à ma direction.
Quels devront être les changements à faire par rapport à la D2, à effectuer pour avoir une chance de se maintenir ?
Comme je l’avais fait cette année, continuer d’augmenter le niveau d’exigence dans le discours et dans la forme. Il faudra donc passer à 5 séances en intégrant une séance de musculation ce qui est primordiale à ce niveau. Il faudra également aménager les horaires de travail des filles en leur permettant de s’entraîner plus tôt car à ce niveau-là s’entraîner de 19h30 à 21h30 me paraît impossible. En ce qui concerne l’hygiène de vie il faudra surveiller leur alimentation. A l’avenir s’équiper de GPS sera primordial. Certains des clubs en sont équipés. Il faut s’en inspirer. Bordeaux en a les capacités.
Deux joueuses dans l’effectif ont déjà connu la D1. Mais
combien sont-elles à avoir réellement le niveau ?
Certes il n’y a que deux joueuses qui ont connu la D1 mais d’autres
sont perfectibles. On a un groupe très jeune qui a un gros
potentiel avec une grosse marge de progression. Il ne faut
l’oublier.
Un mot sur Sarah Cambot qui finit meilleure buteuse du
championnat…
Très content d’avoir travaillé avec elle. Je pense avoir réussi à
lui faire passer un cap et c’est mérité car elle a beaucoup
travaillé.
Si tu devais ressortir un ou plusieurs moments de cette
aventure bordelaise, ce serait lesquels ?
Il y en a beaucoup mais je vais en sélectionner 3 : la
qualification aux tirs au but contre Soyaux en coupe de France où
les filles avaient fait un gros match tactique et avaient été
extraordinaires dans l’abnégation, le match nul 3-3 à Rouen avec
une force mentale des joueuses, menées 3-1 à 25 minutes de la fin
et quelle émotion avec nos supporters, et bien entendu le match
final de la montée, à Saint-Malo, récompense finale d’une saison
extraordinaire.
Que peut-on te souhaiter pour la suite ?
De continuer mon ascension en tant qu’entraîneur et de réussir mes
diplômes et d’entraîner en D1 dans les prochaines années.
Merci à Théodore de nous avoir donné de son temps. Nous lui souhaitons sincèrement que ses contacts se concrétisent pour la saison prochaine mais bien sûr, rien n’est figé pour l’instant. Alors, si son profil vous intéresse, n’hésitez pas à le contacter ou nous contacter, nous vous mettrons ainsi en relation avec lui.
Bonne continuation et qui sait, peut-être à bientôt !