InterviewG4E. Alain Giresse : “Être originaire de la région bordelaise est certainement ma plus grande fierté”

    Photo by FRANCK FIFE / AFP

    593 matches sous le maillot bordelais, 181 buts (toujours meilleur buteur de l’histoire du club), deux titres de Champion de France, une Coupe, une deuxième place au Ballon d’Or 1982. Oui, ces stats sont exceptionnelles et font rêver. C’est normal, elles appartiennent à une véritable légende vivante de notre club, l’idole de toute une génération (voire beaucoup plus) et un symbole à lui tout seul. Nous voulons bien entendu parler d’Alain Giresse, que nous avons eu l’honneur et la chance d’interviewer en marge de Marseille-Bordeaux. Du coup, non, cette phrase ne marche plus. Juste pour le plaisir ? Avec grand plaisir. Bref, interview.

     

    Ca y est, le club est enfin officiellement racheté. Quel bilan pouvons-nous faire de l’ère M6, après 19 ans… ?

    « C’est toujours un peu délicat de relier le coté sportif au coté administratif directionnel. Bien sûr qu’il y a un lien car c’est eux qui amènent les moyens pour permettre à un club de rivaliser avec les meilleurs. Ils ont pérennisé le club, et en même temps je trouve qu’ils ont conservé l’âme des Girondins. Ce qu’il est, ce qu’il représente, son identité. Sportivement, il y a eu de bonnes choses, dont des titres. Un titre en 2009, des participations en Coupe d’Europe, un quart de finale de Ligue des Champions. En tout cas, les Girondins ont été là. On n’a pas eu de périodes, comme nous l’avons connu par le passé, où nous avions vraiment une domination des Girondins sur le football français. C’était plus épisodiquement, mais il y a eu une certaine tenue sur le plan sportif des Girondins ».

     

    Vous avez déclaré que les Girondins doivent garder maintenant leur identité. Qu’est-ce qui pour vous ne collerait pas avec notre club ? Quels sont pour vous les axes essentiels et obligatoires que doivent conserver les américains ?

    « Dans l’absolu, on ne peut pas empêcher le départ d’M6 et que des repreneurs viennent. C’est vrai pour Bordeaux, cela l’a été pour d’autres comme Marseille, Monaco et le Paris Saint-Germain. Cela fait partie du football de maintenant et des occasions qui viennent de se présenter. Derrière, lorsque qu’un club est repris, les investisseurs doivent donner leurs objectifs ainsi que les moyens qu’ils vont avoir pour Bordeaux, qui ne l’oublions pas, reste un club qui fait partie de ceux qui ont un palmarès dans le football français. Il a eu ces grands moments, et peut-être qu’il pourra les retrouver. Certes, pas au plus haut niveau actuellement, pas plus Bordeaux qu’un autre club de toute manière par rapport au PSG. Ce sera très compliqué de les déloger. Aucun club n’a les moyens de rivaliser, c’est une réalité. Mais être dans la course pour se bagarrer pour la seconde, la troisième ou la quatrième place, la Ligue des Champions ou l’Europa League donc. Dans leur histoire, les Girondins ont toujours été une équipe qui a eu cette possibilité, il faut qu’elle existe toujours. Et cela dépend des moyens injectés par les américains et ce qu’ils mettront en place en termes d’objectifs et de stratégie pour le club. Tout en conservant l’âme du club, comme les marseillais le font, ou les stéphanois, les nantais. Chacun a sa propre identité. Derrière, il ne faudra pas faire comme Monaco, et de vouloir rentabiliser par des ventes de joueurs qui affaiblissent. Eux, qui permettent à l’équipe d’avoir des objectifs plus élevés ».

     

    Joseph DaGrosa

     

    Vous êtes aussi attaché au côté populaire du club, même si aujourd’hui – et la venue des américains en est l’exemple – l’on se dirige beaucoup plus vers du foot business…

    « Le problème du business, ce n’est pas comment on l’interprète ni comment on l’applique. Si vous venez en espérant à tout prix avoir des retombées… C’est pour cela que j’ai cité Monaco. Ils ont vendu combien ? 300-400 millions d’euros ? Sauf que maintenant, on voit le résultat. La perte de tous ces joueurs, et non des moindres, a quand même affaibli cette équipe, c’est une réalité. On sait que c’est difficile de venir et de gagner de l’argent dans le football. On peut avoir un club en bonne santé et de maintenir le niveau de l’équipe et ne pas rentrer dans le business à tout prix ».

     

    En parlant d’objectif, les américains ont annoncé un retour en Champions sous 3-4 ans… Un peu ambitieux comme projet, non ?

    « C’est très difficile de programmer avec certitude des résultats, en disant ce genre d’affirmations. C’est bien, car ça fait envie à tout le monde, personne ne va le contester. Par contre, il faut mettre en place des moyens pour y arriver. Pour ces places, il va falloir se bagarrer -en mettant Paris de coté- avec Marseille, Lyon, Monaco -plus pour le moment- Saint-Etienne, etc. Pour le moment, la saison est tant bien que mal. Sportivement, l’équipe va devoir prendre une autre dimension pour y arriver. Comment va-t-on faire ? C’est là qu’ils nous disent leur base. Ce qui est curieux, c’est que nous parlons que de finances mais c’est le nerf de la guerre. Cela permet d’avoir de bons joueurs, pas de grands joueurs, mais de bons joueurs. Ce qui est nécessaire pour franchir un palier, mais cela passe aussi par une constance et actuellement les Girondins ne l’ont pas tout à fait. Tant mieux pour l’objectif, mais il faut qu’ils soient conscients de ce qu’il faut faire pour y arriver ».

     

    Vous êtes un entraîneur français, avec vos diplômes à jour… Comment voyez-vous la situation de Ricardo, même si l’on sait que de ne pas se lever pendant les matches ne va pas changer grand-chose non plus…

    « On joue sur les mots, franchement. Toute la semaine, c’est lui qui dicte le programme, qui gère les séances, qui fait le onze, qui fait la causerie avant le match et dans les vestiaires à la mi-temps. Mais en toute honnêteté, quel est l’apport d’un entraîneur réellement lorsque le match est lancé ? Si, on l’appelle le coaching. Par rapport au match qui s’enclenche, le coach peut faire des systèmes, des changements de joueurs qui sont en dedans ce jour-là. Il est manager, et l’entraîneur déclaré est Eric Bédouet. Mais amusez-vous à regarder certaines équipes et vous verrez, moi je l’ai constaté, que certains adjoints se levaient et allaient parler à la place de l’entraîneur dans certaines situations. Et personne ne leur a dit d’aller s’asseoir. Lors d’un match que j’ai vu ici, à Toulouse, j’ai vu pendant 10-15 minutes, un adjoint debout. Le principal était assis, on ne lui a pas demandé de s’asseoir. Imaginez, Eric Bédouet annonce qu’il s’assoit et qu’il envoie son adjoint Ricardo, pourquoi l’entraîneur adjoint ne pourrait pas se lever ? Alors que l’autre adjoint était debout, lui. Pourquoi ? On va me dire que Ricardo n’est pas entraîneur, mais l’entraîneur adjoint que j’ai vu n’est pas entraîneur non plus, c’est l’adjoint. C’est un peu contraignant. De ne pas le voir venir, ne serait-ce qu’une fois ou deux, je ne vois pas pourquoi cette punition est mise en place. Alors que le reste du temps, c’est lui qui fait tout. Un autre exemple, lorsqu’un entraîneur est suspendu, qu’il est en tribunes, et d’en-haut il effectue ses changements, et voilà, les joueurs bougent quand même. C’est un petit peu désagréable, mais foncièrement ce n’est pas dérangeant. C’est la réglementation qui est appliquée parfois de façon un peu particulière ».

     

    Ricardo et Eric Bédouet

     

    On s’attendait tous à voir Thierry Henry sur le banc, et finalement ce n’est pas le cas… Y a-t-il une pointe de déception chez vous ?

    « Cela aurait été plus facile pour lui, car il est allé dans un endroit où c’était une grosse galère. Avec un effectif complètement liquéfié et des joueurs en dehors de leur sujet, c’est compliqué pour lui. Il y avait plus de stabilité chez les Girondins. Les objectifs n’étaient pas les mêmes forcément, mais les perspectives étaient plus rassurantes à Bordeaux qu’à Monaco ».

     

    Une nouvelle fois, l’intersaison n’a pas été de tout repos à Bordeaux… Quel bilan pouvons-nous faire, à quelques semaines de la mi-saison ? On a l’impression que l’histoire se répète année après année…

    « C’est un petit peu comme la saison dernière, mais il n’y a pas que Bordeaux. Il y a beaucoup d’inconstance chez les autres équipes. L’an dernier, il y a un premier qui se baladait, puis trois autres équipes qui se bagarraient, et il y avait encore 15 points d’écart avec le 5ème. Derrière, il y a eu des équipes qui faisaient le yo-yo. Un peu moins cette année. Bordeaux est sur une bonne période actuellement en termes de résultats. Même la performance contre Paris, elle est de haut niveau. Entre guillemets, c’est plus facile de jouer contre Paris, même si ça n’a pas de sens, que contre d’autres équipes. A l’arrivée, ce sont les trois points qui comptent. Il ne vaut mieux pas se rater face aux autres plutôt que contre Paris. Les Girondins ne font pas le même championnat que Paris ».

     

    D’après vous, ce problème est-il d’ordre structurel ? Puisque les joueurs changent chaque année, et que cela se reproduit encore et encore…

    « Oui, à quelque chose près. Maintenant, je pense que les joueurs changent, mais on ne peut pas dire que l’équipe a trouvé une stabilité et une ossature. Si on devait sortir une équipe type, on partirait sur Palencia-Koundé-Pablo et Sabaly en défense. Il y a Otávio ensuite, qui tient bien le milieu devant la défense. Devant, il y a du monde avec Kamano, Karamoh, ou encore Cornelius et Briand. Malheureusement, on ne peut pas tous les faire jouer. C’est Briand qui joue, puis vous faites rentrer Cornelius, et c’est lui qui marque. En valeur joueur, ils ont tous leur place. Ils sont interchangeables. On n’a pas de joueurs avec une constance énorme avec un nombre de matches important. C’est aussi une caractéristique que l’on retrouve dans d’autres clubs. Je ne vais pas dire d’être bon sur 38 matches, c’est impossible, mais il y a un certain niveau qui permet de donner un niveau global à l’équipe sur un championnat ».

     

    Groupe, équipe

     

    On a l’habitude de dire qu’il n’y a pas de « pression » à Bordeaux. Est-ce vrai selon vous, y a-t-il une sorte d’air, de climat, qui fait qu’on se relâche un peu plus ?

    «  Cela n’a pas empêché Bordeaux de gagner des titres. Si vous mettez le PSG à Bordeaux, vous verrez si vous n’allez pas avoir de résultats. Cocon ou pas cocon, c’est aussi ça notre génération. Avec les joueurs qui sont passés, on n’a jamais considéré que ce soit un cocon. Il y avait des exigences, le public réclamait, on était là. Bordeaux c’est Bordeaux, ça n’a pas la ferveur de Marseille ou de Saint-Etienne. Le joueur et l’équipe ne doivent pas rechercher à coté ce qu’ils doivent apporter eux-mêmes et ce que l’équipe dit produire. C’est avant tout cela. On parlait des Ultras, mais il y a un Virage Sud qui est en France, un virage marquant de supporters et assez présent. Tout le monde n’en a pas un comme eux. C’est déjà pas mal. Je suis basé à Toulouse, ce n’est pas le cas ici. Monaco, ils sont champions il y a deux ans, demi-finaliste de la Coupe d’Europe, vous connaissez la ferveur à Monaco ? ».

     

    Et que dire de l’affluence…

    « C’est encore autre chose. Le stade n’arrive pas à trouver son rythme de croisière. Retrouver quelque chose, une âme. Un changement de stade, ce n’est pas évident. Il faut se refaire, refaire son âme au stade, se resituer. Il y a aussi ces problèmes d’accès et de sortie. Si Bordeaux caracole dans les trois premiers, le stade se rempliera plus facilement. Pour Paris c’était archi plein, Marseille ce sera plein. En même temps, lorsque vous êtes les Girondins, ce sont vous qui créez les grands matches, ce ne sont pas les autres. Pour le moment, il faut se rapprocher, être présent et le stade suivra la courbe de performances de l’équipe ».

     

    Vous avez déclaré qu’il manquait selon vous un créateur au milieu de terrain, et vous êtes assez bien placé pour le savoir. Selon les derniers échos, c’est aussi ce qu’a identifié Ricardo. Quel joueur verriez-vous renforcer Bordeaux à ce poste cet hiver ?

    « Au-delà d’en faire un cas particulier sur les Girondins, c’est un cas général en France. Est-ce que l’Equipe de France possède beaucoup de créateurs ? Non. Au milieu, vous n’avez pas de créateur selon moi. Il y a de très bons récupérateurs qui impulsent, mais ce ne sont pas des joueurs qui sortent des ballons, qui permettent d’alimenter. Quand vous voyez Neymar contre Belgrade, en termes de création c’est autre chose. Vous allez me dire que je choisis le plus haut niveau, c’est sûr. Bordeaux en manque. Il faut faire avec, sans ça, et arriver à faire exprimer cette équipe. Il y a de la qualité devant. Il faut arriver à les mettre dans les meilleures conditions, pour qu’ils soient eux capables –une ligne de trois attaquants- de créer du danger. Avec de la capacité de percussion, de dribbles, d’élimination, ce sont les atouts que possèdent Bordeaux ».

    « Au mercato (hivernal), vous ne trouverez jamais l’oiseau idéal. Ce sera quelqu’un qui ne joue pas dans son club, c’est un peu faussé. Vous prenez quelqu’un car vous en avez besoin pour densifier votre effectif. Dans ce cas là, non. Le problème c’est que vous avez besoin d’avoir une connaissance de joueurs peu connus, car avec vos moyens, ce n’est même pas la peine de se mettre sur des joueurs connus. On a parlé de créateurs de haut niveau, mais ce n’est pas la peine, vous ne pourrez pas vous approcher de ces joueurs-là. Je pense déjà que l’équipe a suffisamment d’arguments offensifs pour faire face toutes les saisons à donner les possibilités à l’équipe, c’est évident. Il y a une stabilité qui se met en place sur le plan défensif, ainsi que le milieu devant, pour ainsi stabiliser le bloc et permettre aux offensifs de pouvoir s’exprimer ».

     

    Giresse joueur Bordeaux

     

    Les Marseille-Bordeaux ont forcément une saveur particulière pour vous qui avez joué dans les deux clubs. Quel regard portez-vous sur cette rencontre à venir ? On dit que Bordeaux va mieux, et que Marseille est proche de la crise… ? (nldr : le match n’était pas encore reporté au moment de l’interview)

    « Il y a quelque chose à faire. Un Bordeaux bien en place et bien solide comme il est capable de le faire peut poser de gros problèmes à Marseille, c’est une certitude. Il y a des possibilités. La première des choses est de ne pas partir la fleur au fusil, mais aussi d’être bien en place et organisé. Après, il faut utiliser tous les atouts offensifs. Il y a un compromis à trouver, être bien en place, organisé et après de jouer derrière. Donner la possibilité aux offensifs de s’exprimer ».

     

    On ne peut pas ne pas vous parler de cette rencontre face à Gernot Rohr… Comment sont vos relations aujourd’hui, et pensez-vous qu’un jour on puisse parler de réconciliation ? Même si vraisemblablement de son côté, il a juste « appliqué les consignes »…

    « On ne va pas parler de ces choses là. Cela a existé, c’est terminé, je ne veux pas en parler. Aucun intérêt pour moi, c’est un goût tellement amer et désagréable, que je n’ai pas envie de m’attarder sur ça ».

     

    L’invincibilité, à Bordeaux (même si là évidemment il s’agit d’un match à Marseille), est toujours en cours depuis 40 ans… Comment est-ce qu’on peut expliquer cela ?

    « Pourtant, il y a eu cette belle période des marseillais, lorsqu’ils ont gagné leur Coupe d’Europe. Ils faisaient des matches nuls mais ils ne gagnaient pas quand même. Bordeaux arrive à bien maîtriser cette équipe de Marseille. Un Bordeaux-Marseille a toujours été une affiche de ce championnat. Il y a toujours une ferveur particulière autour de ce match. A domicile, Bordeaux sait très bien appréhender les marseillais, la preuve, cela fera 42 ans l’année prochaine […] Au final, je n’ai pas tant joué que ça face à Marseille. Vous savez pourquoi ? Ils étaient souvent en deuxième division. Il ne doit pas y avoir beaucoup d’équipes que j’ai rencontrées toutes les années durant mes 18 années de Ligue 1. On allait gagner à Marseille à l’époque. Sur les périodes les plus glorieuses, on ne craignait pas les autres, ce sont les autres qui nous craignaient. C’était une réalité. Durant la période la plus faste, ce n’était pas de savoir si nous allions gagner à Bordeaux, mais de combien nous allions gagner. C’est véridique ».

     

    Giresse joueur Bordeaux Coupe 1986

     

    Vous êtes le joueur de champ ayant disputé le plus de matches en France. Comment expliquez-vous cette longévité au plus haut niveau ?

    « La passion, le plaisir, le sérieux dans la préparation et dans la récupération et aussi la chance de ne pas avoir eu de graves blessures. Malheureusement, une blessure est imprévisible, cela peut arriver. Nous ne sommes pas dans le rugby mais cela existe malheureusement ».

     

    Vous êtes encore (et pour un moment) le meilleur buteur de notre club, avec deux titres de champions de France et une Coupe. Une véritable icone, un emblème, un symbole de toute une ville. Comment vivez-vous cela aujourd’hui encore, car la ferveur des supporters à votre égard ne baisse pas ? Un mélange de fierté et d’humilité ?

    « Etre originaire de la région est certainement ma plus grande fierté. Les Girondins, j‘y suis rentré très jeune, c’était le club de mon club de ma région. Quand je jouais, ce n’était pas un public, c’était mes amis d’enfance, du village, de l’école, du collège, de l’armée. C’est toute une toile de personnes que je connaissais, qui était là. On m’aurait cité les origines des gens présents dans les tribunes, il n’y aurait pas un village que je n’aurais pas connu. Lui de tel endroit, je sais où c’est, je suis de la région. En même temps, j’étais capitaine et j’étais l’intermédiaire entre les joueurs qui arrivaient et la région. Les ouvertures que j’ai pu leur faire, et notamment dans le vin dans la région, qui est notre belle spécialité ».

    « Cette ferveur, je la vis avec un petit peu d’étonnement, je dois le dire. En même temps, mon comportement au-delà du terrain a été apprécié. Les gens se sont rendus compte de l’attachement que j’avais pour le club et ce qu’il représente et toute l’histoire que j’ai pu avoir. Dernièrement, je suis passé à Rocquevielle, car c’est là où j’ai débuté étant tout jeune. J’y suis allé seul, comme un lieu de pèlerinage. Pour moi, ce sont des choses qui me tiennent à cœur. J’étais joueur de football professionnel, mais je le vivais comme ça, et c’était ma façon d’aborder ce métier ».

     

    C’est aussi pour cela que vous ne coacherez jamais les Girondins de Bordeaux ? De peur que la mayonnaise ne prenne pas et que cette belle image soit un peu écornée ?

    « Oui au début, mais non après car je me suis dis que j’aurais pu me faire virer, et cela m’aurait embêté que ce soit avec les Girondins. Cela laisse toujours des traces et les liens que je veux garder avec les Girondins ne sont pas ceux là ».

     

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    Depuis la sélection malienne (que vous avez quittée en 2017), vous n’avez pas retrouvé d’équipe ou plutôt de sélection, même si la presse africaine vous a annoncé un peu partout… Quelle est votre situation aujourd’hui et vos attentes ?

    « Je suis parti en Afrique, où j’ai trouvé mes marques là-bas sur le continent avec des complications mais aussi des moments humains extraordinaires. Je me suis épanoui dans ce métier-là dans tout ce que j’ai fait. Partout où je suis passé, j’ai mis des équipes en place et j’ai toujours laissé ces équipes nationales en bon état et non pas en ruines. J’estime avoir rempli ma mission d’avoir entraîné les équipes nationales dans ces pays. C’est une satisfaction car cela veut dire que j’ai respecté ces gens-là et ce pays. Je suis venu leur apporter ce qu’ils voulaient que je leur apporte. En ce qui concerne le fait de reprendre une autre équipe, cela ne s’est pas présenté. Il faut que le contexte vienne pour voir cela, j’espère que cela va arriver ». (le lendemain, Alain était officiellement intronisé sélectionneur de la Tunisie, ndlr).

     

    Vous donnez-vous encore du temps avant de raccrocher, ou est-ce que votre passion ne vous donne justement pas de limite de temps ?

    « Bien sûr, je n’ai pas été au bout encore de ce que j’ai envie de connaitre et de faire. Mais pas chez les Girondins, eux ils sont dans le cœur (rires). Je n’ai pas besoin de quoi que ce soit. Il y a des choses que l’on ne pourra pas m’enlever, il y a des choses qui sont dans le marbre. J’ai commencé jeune, il y a eu des mauvaises périodes, j’ai galéré et puis j’ai eu le bonheur de connaitre ça. Je ne me suis pas laissé griser par les grandes périodes car je savais pertinemment d’où je venais avec les Girondins. Vous savez, c’est facile de venir maintenant avec les installations et tout ce qu’il y a autour. J’ai connu autre chose moi. Quand vous avez connu ça avec un club, forcément ça reste. Mon meilleur souvenir reste le titre de 1984. Car ce titre, depuis 1950-1951, tout le club attendait cela. C’est une espèce de délivrance car Bordeaux finissait souvent second, d’y être arrivé ».

     

    Voici l’interview complète en vidéo :

     

    Nous remercions Alain Giresse d’avoir accepté de répondre à nos questions, ainsi que pour sa gentillesse lors de l’interview.