InterviewG4E. Jonathan Ayité : « J’aurais bien voulu faire mes premiers pas à Bordeaux, mais je n’en ai pas eu l’opportunité »
Originaire de Bordeaux, où il est né, Jonathan Ayité a fait ses classes à Cenon, puis au Stade Bordelais, avant de rejoindre en 2006 la réserve des Girondins de Bordeaux. Il ne resta qu’une saison avec l’équipe B du club au scapulaire et ne signa malheureusement pas de contrat professionnel, comme il vous l’expliquera ci-dessous. Si son frère Floyd est un peu plus « connu » des supporters pour avoir lui, au contraire, signé pro avec son club formateur, Jonathan, aujourd’hui âgé de 34 ans, fit son petit bonhomme de chemin, que ce soit en France ou en Turquie. L’attaquant signa son premier contrat professionnel avec Brest, prochain adversaire des Girondins ce week-end, et connut également Nîmes en France. Puis, en 2014, il se dirigea vers la Turquie où il connut trois clubs : Alanyaspor, le Yeni Malatya, Samsünspor. En 2018-2019, il tenta l’aventure en Azerbaïdjan au Keshla Baku, pour être aujourd’hui à Chypre à l’Olympiakos, qui évolue en première division. Nous allons retracer avec lui son parcours, lui qui est évidemment un bordelais pure souche, mais qui a également un lien fort avec le Stade Brestois, avec qui il joua pendant cinq ans. Interview.
Tu viens de t’engager avec l’Olympiakos Nicosie, qui évolue en 1ère division Chypriote. Comment ça se passe pour toi ?
Ça se passe bien, je suis arrivé il y a 2-3 semaines. J’arrive dans un nouveau projet, un nouveau pays, un nouveau championnat. J’espère que ça va bien se passer tout simplement.
Ces dernières années, tu as testé différents championnats : La Turquie (3 clubs de 2014 à 2018), l’Azerbaïdjan (2018-2019) et Chypre aujourd’hui. Était-ce une volonté de ta part de découvrir ces championnats ?
Oui et non. J’arrive à un âge où je suis avide d’expériences. C’est vrai que j’ai bien aimé le championnat turc, maintenant j’ai eu cette opportunité de pouvoir venir à Chypre, dans un nouveau championnat avec des collègues que j’ai côtoyés quand j’étais en Azerbaïdjan. En fait, ça s’est fait comme ça, j’ai deux amis qui ont signé dans le même club, ils cherchaient un attaquant, ils m’ont proposé et ça s’est fait comme ça, assez rapidement.
Que t’ont apporté ces expériences ? Ca doit être riche au niveau sportif et humain.
Oui, c’est un nouveau pays à découvrir, c’est plutôt pas mal. Ca reste dans l’Union Européenne, ce qui était vraiment important pour moi. Je souhaitais revenir en France, mais je n’ai pas eu cette opportunité-là, Chypre s’est proposé donc voilà. Lundi, j’ai joué mon deuxième match de championnat, malheureusement on a perdu 3-2. Donc affaire à suivre…
Tu es titulaire ?
Oui, je suis titulaire, je suis là pour apporter mon expérience, pour compléter l’effectif. Le coach recherchait un attaquant d’expérience, car ils ont des ambitions…
Si on repart au début de ta carrière, tu venais à l’époque du Stade Bordelais, lorsque tu as rejoint le centre de formation des Girondins. Est-ce que tu te souviens qui t’avait fait venir et comment s’étaient déroulées les discussions ?
Oui, je m’en souviens. J’avais fait une belle saison avec le Stade Bordelais, après comment c’était venu… C’est Guy Dubois, à l’époque, qui m’avait contacté et il m’avait demandé si ça m’intéressait d’intégrer la CFA et j’ai dit oui.
Quel souvenir gardes-tu de ton année passée au centre de formation des Girondins de Bordeaux ?
Ca a été enrichissant, j’ai beaucoup appris, j’ai côtoyé aussi les pros en m’entraînant avec eux. J’avais un très bon feeling avec Patrick Battiston et Marius Trésor à l’époque. Ils m’ont beaucoup appris en peu de temps. Ca m’a vraiment permis de franchir ce cap entre le niveau amateur et professionnel et ça m’a permis de prendre conscience de pleins de choses.
Au bout d’une saison malheureusement, tu ne signes pas professionnel. Quelles sont les raisons d’après toi, pour lesquelles ça ne s’est pas fait ?
A l’époque, il y avait un embouteillage au niveau des attaquants, avec Marouane Chamakh et tout le reste… On m’a proposé de repartir sur le niveau amateur mais j’ai dit non, parce que j’avais des clubs de Ligue 2 qui étaient intéressés par moi. Donc dans ce contexte, j’ai opté pour signer plutôt un contrat professionnel, avec Brest qui s’est proposé. Après ce premier contrat professionnel à Brest, tout s’est goupillé derrière. J’y ai fait deux ans, je suis parti à Nîmes. J’ai découvert la Ligue 1 avec Brest aussi, c’est bien. Après, j’aurais bien voulu faire mes premiers pas à Bordeaux, mais je n’en ai pas eu l’opportunité, mais c’est comme ça…
Cette année-là, tu as été appelé pour la première fois avec le Togo, ta première sélection (il en compte 26, ndlr). Qu’est-ce que cela représentait pour toi, toi qui es né en France (Bordeaux) ?
C’est une grande fierté de pouvoir côtoyer des joueurs aguerris, qui jouent déjà en première division et partout en Europe. J’ai côtoyé Emmanuel Adebayor. Ca m’a permis d’engranger pas mal d’expérience…
Comme tu en parlais tout à l’heure, tu as joué plusieurs saisons à Brest. On imagine que ce doit être un club particulier pour toi ?
Oui, Brest, au total, j’y ai évolué cinq ans là-bas. J’ai fait d’abord un an et demi, puis trois ans et demi. C’est un club qui m’a marqué parce qu’ils m’ont fait confiance. Je me suis familiarisé avec la ville. J’ai eu des hauts et des bas aussi là-bas, notamment à cause de certaines blessures, mais je garde toujours un super souvenir de mon passage à Brest. D’ailleurs, je continue de suivre le club, j’ai encore des amis qui travaillent là-bas.
Tu as aujourd’hui 34 ans. Est-ce que tu te sens en forme pour jouer encore quelques saisons ou tu commences à réfléchir à ton après carrière ?
Je dis toujours que tant que j’ai les cannes, je vais continuer, surtout que moi j’ai commencé un peu sur le tard, donc on ne peut pas dire que j’ai été usé par des années de formation. Après, bien sûr, je pense à mon après carrière, je prépare certaines formations, mais pas dans le monde du foot, mais plutôt dans le commerce international. Après, si en parallèle, je peux avoir une influence dans le milieu du sport, j’ai des amis qui y sont, notamment dans le management, ça me plairait bien.
Ton frère, Floyd, a lui signé professionnel Bordeaux. On imagine que ça a dû être une fierté, d’autant qu’il a fait une belle carrière (Reims, Bastia, Fulham et aujourd’hui en Turquie), même s’il a dû se battre.
Exactement. Vous savez la vie, elle ne nous fait pas de cadeaux donc si tu n’as pas le mental, tu n’arrives à rien. Mon frère aussi, il a du talent. Malheureusement, il a eu quelques coups d’arrêt. Lui aussi, il aurait bien voulu pouvoir s’imposer dans son club formateur, malheureusement, il y a eu des hauts, des bas, des coachs qui ne lui ont pas fait confiance. C’est comme ça, c’est le foot. Maintenant, il a fait son petit bonhomme de chemin, il a fait sa carrière, il a joué en Angleterre, maintenant il est arrivé en Turquie. Je pense qu’il peut être plutôt satisfait de sa carrière.
A l’époque aux Girondins, il ne compte que 14 matches… Penses-tu que le problème était que l’on ne donnait pas assez la chance aux jeunes ?
Ah oui, ça, c’est une certitude. Aujourd’hui, dès qu’il y a un jeune de 19 ans ou plus jeune même, qui fait quelques bons matchs en CFA, on lui donne sa chance avec les pros. A l’époque, ce n’était pas comme ça, c’était vraiment difficile pour nous de pouvoir émerger au sein de l’équipe première. Maintenant, on a l’impression que c’est beaucoup plus facile. Après, je ne sais pas si c’est la nouvelle génération Mbappé, si on veut laisser plus la chance aux jeunes. Je peux vous garantir qu’à l’époque, il y avait de sacrés joueurs, malheureusement, ils n’ont pas eu l’opportunité de pouvoir évoluer avec l’équipe première ou de pouvoir progresser, franchir cette étape-là.
Revenons aux Girondins de Bordeaux. Est-ce-que tu suis l’actualité du club ?
Oui, bien sûr, attends, je suis originaire de Bordeaux (rires), je garde toujours un œil averti concernant les résultats des Girondins. Il y a les nouveaux actionnaires qui sont arrivés, tout a changé. Ils essaient de repartir sur un nouveau projet, notamment en s’appuyant sur quelques jeunes et quelques vieux briscards bien sûr. Espérons que la mayonnaise prenne… Après le coach, Paulo Sousa, c’est un très bon technicien. J’ai évolué avec des joueurs qui l’ont eu comme coach lorsqu’il était au Maccabi Tel-Aviv. J’ai eu de très bons retours, tout comme son passage en Italie. Apparemment, c’est un super coach donc j’espère qu’il va avoir assez de pouvoir afin de mettre en place ce qu’il a l’intention de faire.
Le club a été racheté par un fonds d’investissement américain. Qu’est-ce que cela t’inspire ?
Aujourd’hui, on sait très bien que c’est difficile de concurrencer les clubs anglais, espagnols ou italiens, parce qu’il faut un minimum mis en place pour pouvoir attirer des noms. Ça donne un certain pouvoir financier au sein du club. Ca fait du bien. Et si ça peut permettre de ramener des joueurs de qualité, c’est super pour Bordeaux. Parce que Bordeaux, c’est un grand club français et tout le monde espère voir Bordeaux jouer le TOP6 du championnat. Et si ces gens-là peuvent permettre cela, c’est vraiment bien.
Enfin pour conclure, il y a Bordeaux-Brest ce week-end comme tu le sais. Comment tu le sens ce match ?
Brest, ça reste toujours un grand club Français, ça me fait plaisir de les voir là, parce que j’ai évolué là-bas, j’espère que ça va être un match ouvert, car Brest a fait une bonne saison l’année dernière et ils sont restés sur la même dynamique. Ils ont fait quelques bons résultats. Bordeaux aussi est sur une bonne dynamique, donc on va voir ce que ça va donner. Maintenant, tant que vous ne me demandez pas de choisir entre Bordeaux et Brest (rires)… Que le meilleur gagne !
Un grand merci à Jonathan pour le temps qu’il nous a accordé. Bonne saison, et à bientôt ! 🙂