InterviewG4E. Patrice Ferri : “Le projet, il est d’essayer de corriger ce souci d’inconstance”

    (Copyright : PANORAMIC) Patrice FERRI, consultant beIN SPORTS sur la Ligue 1 et notamment l’émission « LE DÉCRASSAGE DE LUIS » (chaque lundi à 19h sur beIN SPORTS 1).
    A l’occasion de cette rencontre entre les Girondins de Bordeaux et l’AS Saint-Etienne dimanche (15 heures), un match retransmis en intégralité et en exclusivité sur beIN Sports, nous nous sommes entretenus avec le consultant et commentateur de la chaîne, Patrice Ferri. Formé à Saint-Etienne, ayant effectué la majorité de sa carrière chez les Verts, Patrice donne souvent son avis sur les Girondins de Bordeaux que ce soit lors des matches qu’il commente, ou lors des émissions hebdomadaires de beIN comme “Le Décrassage de Luis”. De son image du club au scapulaire, en passant par le projet bordelais, la tactique de Paulo Sousa, Olivier Giroud, ou encore la rencontre de dimanche, tous les sujets ont été abordés. Entretien.

     

     

    Quelle est votre image des Girondins de Bordeaux aujourd’hui ? Vous qui avez connu de grandes époques du club…

    Je ne vais pas être très original, il est toujours difficile de comparer les époques. Les Girondins dont on parle, étaient comme tous les autres grands clubs français, des valeurs sûres, et des clubs qui ne changeaient pas beaucoup, aussi bien sur les compositions d’équipes que sur les effectifs. Il y a eu le cycle avec Yoann Gourcuff, Laurent Blanc, des cycles précédents, etc. Aujourd’hui, on a beaucoup moins ça. Automatiquement, c’est plus difficile pour certains clubs, qui ont été déstabilisés. On le voit avec Marseille, Saint-Etienne, Rennes… Beaucoup de nos clubs qui étaient nos clubs références – à part Paris – Monaco a été beaucoup déstabilisé aussi, Lille a eu son trou d’air très important alors qu’ils ont fait des campagnes européennes… On a eu des vagues qui ne sont pas terminées, on le voit avec les clubs que je viens de citer, qui nagent et qui sont dans de la totale inconstance. Ce qui fait la grande différence entre le Bordeaux que les gens et les supporters souhaiteraient revoir, et l’actuel, c’est le Bordeaux constant, celui dont on est capables de se dire qu’on a un minimum garanti. Un tarif syndical garanti. Et ce sont des choses que l’on n’a pas. Quand vous allez au stade en tant que supporters, nous aussi en tant que diffuseur ou commentateurs, on ne sait absolument pas sur quel type de match on peut compter. C’est ça la grande différence, et ça ne concerne pas que Bordeaux. Ça vous concerne en priorité parce que ce n’est pas désagréable de vivre dans ce club ou dans cette région, donc il faut déjà un peu lutter contre ça pour arriver à trouver de l’énergie, de la motivation, et ainsi de suite. Quand on est avec des joueurs qui sont issus du club comme l’ont été les Alain Giresse et compagnie, c’est un rapport au maillot qui est différent. Mais aujourd’hui, avec les rotations de joueurs dans les effectifs… C’est comme Monaco, c’est difficile de secouer ce genre de club parce qu’il y a aussi l’environnement qui compte beaucoup. Quand on va au stade, quand nous commentateurs nous y allons, on ne sait absolument pas à quoi nous attendre. C’est pour moi la différence fondamentale. Après, le jeu en lui-même, on est soumis à : ‘un coup ça joue bien avec un certain système’, et une autre fois, le match d’après, ‘on a l’impression qu’ils ne savent plus comment ils ont joué le match précédent’. Et puis si ça ne va pas, on change de système au bout d’une demi-heure. Je suis aussi extrêmement surpris de voir combien de joueurs sont perdus sur le terrain parce qu’ils ne savent plus quel poste ils ont, ils ne savent plus trop ce qu’on attend d’eux au niveau du jeu, et je pense que ça perturbe les équipes, et notamment les équipes références de notre Ligue 1. Cela permet cependant, et ça c’est tant mieux, qu’il y ait une sorte de régénération de certains clubs comme Angers pour faire de très bonnes saisons, comme Reims aujourd’hui… Ils cultivent quelque chose de différent, même si les attentes sont différentes, mais ils arrivent à installer comme ça un rapport club-joueurs, avec plus de proximité et d’échanges. Aujourd’hui, je pense que l’interrogation est là, comment on arrive à corriger. Vous savez très bien comment on surnomme votre club, ‘la Belle Endormie’, cela veut bien dire ce que cela veut dire.

     

    C’est quelque part donc un manque de stabilité que ce soit dans le sportif ou dans l’environnement ?

    C’est pour ça que là, vous m’interrogez sur les Girondins, et effectivement, ils en font partie. Mais je les englobe. C’est quand même quelque chose qui a tendance à se généraliser. Ça se généralise au niveau des joueurs, des entraîneurs, du staff, mais évidemment aussi au niveau des gouvernances. Nantes, il y a toujours un problème Kita. Rennes, c’est pareil, Pinault donne de l’argent sans avoir trop de retour. Marseille avec le Champions Project, on est quand même assez à côté de la plaque. A Saint-Etienne avec les deux Présidents… Si tu déroules comme ça l’ensemble, tu te rends compte que c’est une réalité qu’il faut affronter. Nice, on change de propriétaire au milieu de la saison… Et à Bordeaux, vous avez attendu combien de temps avant qu’il y ait une stabilité, et une vision claire de ce qu’était le nouvel organigramme ? Vous avez dû attendre six mois… Donc aujourd’hui tous ces éléments font qu’on se retrouve avec du flottement un peu à tous les niveaux. Alors, après, on peut rentrer dans tous les détails du jeu. Mais si on n’a pas ces paramètres-là en tête, il y a un problème. Chez vous, on nous parle de Paulo Sousa. L’idée était de le faire venir en avril pour que cela lui donne beaucoup de temps pour faire une sorte d’audit de l’effectif, savoir quelles étaient les priorités, les moyens qui pouvaient être mis en œuvre pour corriger ou aller dans le sens de ce que souhaitait l’entraîneur. Sauf que pendant toute la période du mercato, il n’y avait pas de gouvernance définie. Il s’est retrouvé à la mi-août à encore s’interroger sur le système, sur les joueurs éventuellement qu’on pouvait faire venir, alors qu’il était là depuis avril ! C’était une bonne idée de se dire que si on doit on changer, ça ne sert à rien d’attendre juin, changeons tout de suite parce que cela donnera du temps au nouvel entraîneur pour vraiment savoir. Résultat, on s’est retrouvé au mois d’août, on ne savait toujours pas quelle était le style de jeu des Girondins. Comme il a été présenté avec cette idée d’anticiper pour mieux préparer, forcément que les gens se demandent à quoi ça a servi… Le décalage il est dans ce sens.

     

    Joe DaGrosa et Paulo Sousa
    Photo by NICOLAS TUCAT / AFP)

     

    Vous avez souvent répété que le projet n’était pas clair pour vous, est-ce qu’il est un peu plus clair pour vous aujourd’hui ?

    Le projet, il est effectivement d’essayer de corriger ce souci d’inconstance, qui fait que c’était devenu difficile de se projeter. Aujourd’hui, ça ne tourne pas trop mal, ils ne sont pas trop mal situés. Mais on se reparle dans trois semaines, ils sont peut-être 12èmes ?! Le projet, pour moi, de l’extérieur, pour ce club, il est un peu là. De se dire que ce n’est pas possible d’être instable. Après, comment on le fait ? Est-ce que le jeu qui est primé aujourd’hui est celui qu’il faut pour cet effectif-là, dans le but de se stabiliser et avoir un minimum de résultats garantis, même si c’est toujours difficile de garantir les choses en sport et en foot en particulier. La manière de jouer, il n’y a que Paulo qui peut le sentir. Nous, de l’extérieur, on ne peut que constater les choses au moment du match. J’ai en mémoire la confusion qu’il y avait eu avec les déclarations de Benoit Costil, qui disait que l’entraîneur voulait un certain type de jeu mais que finalement, les joueurs avaient fait un autre type de jeu naturellement, sans se concerter (lire ICI). C’est-à-dire un jeu beaucoup plus rapide dans les transitions, d’essayer de récupérer le ballon rapidement pour vite aller de l’avant et avoir le moins de passes à faire. Alors que l’entraîneur, lui, semblait dire – et c’est Benoit Costil qui le disait – qu’il était plus favorable à une meilleure préparation, un peu plus longue, qui permettrait d’avoir un peu plus de confiance, dans la possession…

     

    C’est effectivement ça, c’est un jeu de possession qui est demandé à la base, et on constate que c’est plus un jeu direct en zone de finition… Cependant, par rapport à ça, lorsqu’on regarde le pourcentage de possession moyen des Girondins à 9 journées, Bordeaux est 6ème avec 53% de possession de balle (Bordeaux 6eme équipe possession avec 53% – Dans le détail : 53% à Angers, 63% contre Montpellier, 52% à Dijon, 53% à Lyon, 45% contre Metz, 54% contre Brest, 55% à Amiens, 38% contre Paris, et 65% à Toulouse). Au final, nos buts sont inscrits dans le registre d’attaques rapides…

    C’est ça qu’il faut retenir ! Quand tu me parles de chiffres, aujourd’hui il y en a tellement qu’on peut leur faire dire n’importe quoi… Ce qu’il faudrait avoir comme statistique c’est de savoir à partir d’une possession courte, des actions plutôt directes sur les buts marqués, combien le sont par un jeu de possession très long à la Barça entre guillemets, et combien de buts le sont avec des phases de jeu rapides… Sixièmes en termes de possession, c’est plutôt très bien en Ligue 1, mais tu as marqué 22% de tes buts avec une possession longue, et 40% avec une possession courte, il faut faire ce qui marche ! Si tu as le style court qui marche, c’est celui qu’il faut utiliser tant qu’il marchera. Je comprends assez mal le débat qu’il y a autour de cette volonté. Il faut d’abord aujourd’hui privilégier ce qui marche ! Si c’est la possession courte, à la place de la possession longue, quand bien même on est plus fan au niveau du staff d’une possession longue plus maîtrisée parce que cela donne plus d’assurance à l’équipe, oui, mais si ce n’est pas ce qui marche et qui amène les buts, je suis désolé, mais il faut aller aujourd’hui vers ce qui marche. A mon sens, de l’extérieur, cela veut dire que les joueurs arrivent facilement à appliquer ça, et qu’ils se sentent à l’aise pour jouer ce type de football, et c’est quand même ça qui compte. Le but est de mettre les joueurs dans les meilleures dispositions pour pouvoir aborder les compétitions et être à l’aise sur le terrain. Tant pis si ce n’est pas exactement le style de jeu qu’on avait peut-être imaginé, mais si c’est ce qui leur convient, c’est ce qu’il faut faire. Ça, c’est l’audit de l’effectif, et il faut être avec les joueurs tous les jours. Et Paulo Sousa, n’oublions pas que depuis qu’il est arrivé, il n’a pas choisi énormément de joueurs. L’effectif a quand même bougé, mais il n’y a pas eu de grandes révélations à part Laurent Koscielny.

     

    Au niveau du dernier mercato, c’est vrai, on a attendu, et on a surtout eu l’impression qu’au niveau des nouveaux propriétaires, il n’y avait pas forcément l’argent qui coïncidait avec le projet…

    C’est pour ça qu’il est difficile d’avoir ces débats de fond. Il nous manque trop d’éléments. On a trop peu d’éléments d’information. En plus, moi, de l’extérieur, je pense qu’il y a un gros problème, ce sont les effets d’annonce. Et les effets d’annonce, c’est terrible. Je pense que ce n’est pas une bonne chose d’annoncer des chiffres, des projets, des choses comme ça qu’on ne maîtrise pas. Les gens, les supporters, les partenaires, une fois que vous leur avez dit ça, que fait-on si jamais ça ne réussit pas ? Celui qui a une très bonne approche, c’est celui qui vient de racheter Nice. J’ai lu ses déclarations sur les questions qui lui sont posées, parce que c’est la grande mode, tout le monde est plein de projets de travail, de jeu… sauf qu’ils sont très peu à pouvoir les appliquer, et donc derrière ils prennent le retour de manivelle. Il est milliardaire en plus, donc il est à l’aise, il va certainement mettre une partie de son argent. Il a dit ; ‘ne commencez pas à venir me poser des questions sur la Ligue des Champions, si on va casser le marché du mercato. Nous, ce qu’on veut, c’est essayer de devenir un des clubs références de la Ligue 1, un club stable sur le plan financier et sportif, tout en essayant de s’améliorer à chaque match, chaque saison, pour redevenir une référence de la Ligue 1’. Moi, je trouve que ça, c’est une discours intéressant à entendre. On n’est pas en train de nous dire que dans les trois ans on va gagner la Ligue 1, qu’on fera une demi-finale de Ligue des Champions, non…

     

    Il a surement tiré les leçons de ses prédécesseurs au niveau du rachat des clubs.

    En tout cas, de l’extérieur, j’ai l’impression que oui. Et si j’étais supporter aujourd’hui, je me dirais ‘enfin, il y en a un qui n’est pas là pour nous vendre quoi que ce soit, parce que ça ne sert à rien’. De toute manière il n’y aura pas plus de partenaires si vous essayez de leur vendre que vous allez jouer la Ligue des Champions tous les ans, il n’y aura pas plus d’abonnés… Les gens, s’ils aiment leur club, ils viennent au stade, ils achètent leur abonnement, et ils supportent. Les gens ne sont pas fous. Ils font leur propre lecture des effectifs, ça ne sert à rien d’aller leur vendre des projets et des objectifs. Quand on sait qu’on va finir dixième, ça ne sert à rien de leur dire qu’on va être sur le podium, ce n’est pas vrai.

     

    D’autant qu’il y a l’aléa sportif qui est, pour le coup, vraiment imprévisible…

    Evidemment. En plus, des exemples, on en a toutes les saisons. Rappelle-toi il y a deux ans, Lille 18ème, et l’année d’après deuxième… Et il n’y avait que deux joueurs de changés. Je trouve que c’est un bon exemple par rapport à ça. On a vendu le Champions Project en nous donnant des chiffres, ce n’est pas possible. Là, cela faisait longtemps avec Nice que je n’avais pas eu un discours comme ça. Pendant quand même pas mal de temps aux Girondins, on attendait qu’on nous explique l’organisation, vers quoi ils voulaient aller, quelle était l’idée. Et d’un coup on vient nous dire que la priorité était d’acheter un défenseur central, certes un garçon avec une top carrière, brillant, avec une belle personnalité, mais on nous parle d’un défenseur central de 34 ans… Et ça va se terminer par avoir été une très bonne affaire, certes, mais quand vous parlez de projet, et qu’un défenseur central de 34 ans est la priorité, inévitablement les gens ont un décalage. Ça se transforme en une bonne décision, mais on ne peut pas le placer comme une priorité.

     

    Laurent Koscielny

     

    On parle alors plus du factuel. On peut tout de même constater qu’on a une certaine colonne vertébrale, avec Benoit Costil, Laurent Koscielny, on peut parler aussi d’Otávio au milieu et devant des joueurs comme Jimmy Briand ou Nicolas De Préville. On part quand même sur une base plutôt propre et saine…

    Nicolas De Préville, tant mieux pour vous et évidemment tant mieux pour lui, il doit boire du petit lait tous les jours après les deux dernières saisons qu’il vient de traverser. Il faut bien se rendre compte que cela reste quand même un petit miracle ce qui est en train de se passer. Tant mieux, il a redressé incroyablement la barre. Maintenant, on est au mois d’octobre, et il va falloir tenir jusqu’au mois de juin. Tant mieux pour l’instant. Ensuite, Otávio, c’est pareil. On est bien obligé de raisonner en effectif, et qu’est-ce qu’il se passe si jamais un de ces deux garçons devait se retrouver en méforme, ou avec une blessure ? C’est difficile de donner trois noms comme ça… Même à Paris. On s’est aperçu avec Cavani et Mbappé absents, que le troisième attaquant d’un club qui veut gagner la Coupe d’Europe était Choupo-Moting. Pourtant, c’est le PSG, donc on se retrouver à aller chercher Icardi, un grand attaquant… On ne peut pas se dire ça, encore moins quand on est Bordeaux. Aujourd’hui, cette colonne vertébrale n’existe plus véritablement. Les colonnes vertébrales doivent exister dans toutes les lignes. On ne peut pas se dire qu’on a untel ou untel, c’est insuffisant. Jimmy Briand, ce n’est pas non plus… Tant mieux de nouveau, il donne tout ce qu’il a, il est totalement irréprochable. Mais ce n’est pas non plus une idée d’avenir entre guillemets.

     

    Qu’est-ce qui manquerait à cet effectif bordelais ?

    Quand on me parle de possession de balle à Bordeaux, je te poserais une question. Dis-moi sur l’effectif bordelais, quel joueur peut te donner l’idée de faire beaucoup de passes, de gérer la possession ? Cela veut dire qu’il faut être très bon techniquement, qu’il faut avoir un très gros volume de jeu, il faut savoir gérer les temps forts et les temps faibles en fonction du scénario du match, il faut savoir gérer les équilibres ou les déséquilibres. Aujourd’hui, qui à Bordeaux peut te donner l’idée d’avoir des joueurs au milieu de terrain capables de gérer une possession totale de balle ?

     

    On les a peut-être, mais on ne le sait pas encore. Youssef Aït-Bennasser est arrivé hors de forme puis s’est blessé et n’a pas pu encore être titularisé. Et on a Yacine Adli mais qui n’a que 19 ans…

    Tu vois, en te laissant énumérer les joueurs, tu m’en as donné deux. Sur les deux, il y en a un qui est arrivé il y a deux mois et l’autre a 19 ans. Vous pensez réellement que vous pouvez définir un style de jeu de possession avec pour l’instant deux joueurs éventuels ? Ce n’est pas envisageable. C’est trop hypothétique. Donc par rapport à ça, tu vois bien qu’il y a peut-être – en tout cas de l’extérieur c’est ce qu’on ressent – un déséquilibre entre la volonté de Paulo Sousa de développer un football qu’il aimerait bien voir, et le fait de l’avoir avec ce profil de joueurs. Tu vois bien ce que ça veut dire avoir la possession de balle quand tu vois jouer le PSG, Nice… Là, on est sur des footballs de possession aboutis. On nous parle de possession de balle à Bordeaux, mais pour posséder le ballon il faut beaucoup de joueurs qui soient au minimum dans la moyenne, voire au-dessus de la moyenne pour pouvoir avoir ce type de jeu. C’est très exigeant ! Cela demande de la dépense physique pour être sûr de bien se déplacer, cela demande de la justesse technique pour être sûr que les actions puissent s’enchaîner, cela demande un véritable travail collectif ensemble sur des joueurs qui se connaissent au minimum sur deux-trois ans… Cela fait quand même beaucoup de paramètres que je ne vois pas aux Girondins.

     

    giroud chelsea

     

    Les propriétaires ont confirmé qu’au mercato d’hiver Bordeaux allait encore se renforcer. On pense notamment au poste d’attaquant où Bordeaux avait voulu faire un dernier coup cet été. Et là, un nom revient, Olivier Giroud. Que penseriez-vous de cette arrivée ?

    Comme très souvent, il faut savoir se mettre en accord et en cohérence entre le souhait et les opportunités qui s’ouvrent. Et Olivier Giroud, on a très bien compris, Didier Deschamps a été suffisamment clair, je pense que le message est passé auprès de lui… Je pense qu’Olivier Giroud n’a pas envie de quitter la Premier League, mais il sait très bien qu’il ne peut pas continuer de jouer en n’ayant que comme façon de survivre ses buts en équipe de France. S’il commence à ne plus marquer… Ce serait son dernier Euro l’été prochain. Je pense qu’il n’a pas spécialement envie de revenir en Ligue 1 mais pour être sûr, et avoir l’esprit tranquille… Il sait que s’il vient à Bordeaux, il aura l’esprit tranquille, il aura une grande reconnaissance parce qu’il fait une carrière totalement exceptionnelle, que lui-même n’aurait certainement pas imaginé. En général, on parle d’une transaction gagnant-gagnant. Là, ce serait triple gagnant ! Gagnant pour les Girondins, gagnant pour Olivier Giroud parce qu’il redeviendrait quelqu’un d’indispensable pour son club, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui à Chelsea. Et enfin gagnant pour l’équipe de France. Voilà le type de deal qui présente une opportunité. Les mercatos, ce ne sont pas des révolutions, mais des opportunités. Là cela en représente une opportunité gagnante si tout le monde se met d’accord.

     

    Parlons du match de dimanche. Avec Saint-Etienne, un club que vous connaissez très bien… Ils viennent de changer d’entraîneur avec l’arrivée de Claude Puel. Est-ce qu’au bout de deux semaines et demie, cela peut être suffisant pour essayer d’inculquer quelque chose, ou jouer sur l’espèce de déclic des suites d’un changement d’entraîneur ?

    Ce qui est sûr, c’est qu’il y a déjà deux phénomènes très importants. On a été au bout de l’histoire et de la tentative Ghislain Printant, où tout le monde était en train de souffrir : joueurs, entraîneur et supporters. Ça, il fallait arrêter cette spirale négative. Derrière, le profil de Claude Puel, c’est exactement le profil dont ce club et cette équipe avaient besoin. Il y a une volonté sur la formation qui est une des clés de ce club. Il peut aussi retrouver l’ambiance qu’il a eue en Angleterre parce qu’on a toujours dit que Saint-Etienne était le 21ème club de la Premier League. Cette ambiance qui pue le football à tous les niveaux… Il a le profil de cette exigence, où il se rapproche de l’esprit que Saint-Etienne a connu avec Christophe Galtier. Et derrière, ce coup d’accélérateur incroyable, ce coup de turbo avec la victoire dans le derby… L’équipe qui rentre sur le terrain est 20ème, il a entraîné l’équipe d’en face avec qui ça s’était très mal terminé ; avec 24 heures de prise en main de l’équipe, et dans un derby ! Je ne suis pas loin de penser que ça a déjà été le tournant de la Ligue 1 pour Saint-Etienne.

     

    Comment voyez-vous cette rencontre face à Bordeaux ?

    L’équation du match nous est posée comme ça : on a un Bordeaux qui est sur une pente plutôt positive. Le succès a Toulouse a été clair et net, tout en laissant une image plus ambitieuse et offensive, mais avec toujours la possibilité d’avoir un gros trou d’air dans certains matches, de pouvoir pendant le match avoir des absences. On n’est jamais totalement rassurés et convaincus. En face, ils vont se retrouver avec une équipe qui a fait un gros coup d’accélérateur avec cette victoire à la 92ème en plus, un élément supplémentaire pour dire à quel point les joueurs avaient envie de réagir dans leur situation. Et il y a ce brassage habituel des cartes quand un nouvel entraîneur arrive, surtout avec un entraîneur avec cette personnalité, qui va être dans l’exigence. On l’a vu dans ses premiers choix, même s’il y avait eu la Coupe d’Europe au milieu et qu’il avait fallu reposer certains joueurs. Je pense qu’il sera dans une grande discipline de travail, en plus de l’exigence, et il le fallait car il y avait une forme d’usure au niveau mental pour ce groupe. N’oublions pas que quand Printant-Gasset arrivent, ils sont dans une très mauvaise position, ils viennent de prendre 4-0 à domicile contre Monaco avant la trêve… C’est de là qu’il y a le chamboulement total de l’effectif avec le mercato d’hiver. Depuis ce temps-là, ils ont sans cesse gratté, gratté, pour aller chercher à se retrouver en haut. Et une fois Gasset parti, il y avait quand même une forme d’usure de ce groupe. Là, les bordelais vont se retrouver face à un Saint-Etienne qui n’est pas celui qu’on a vu depuis deux-trois mois. Même s’ils reviennent de très loin, je pense que cela représente déjà un match référence pour les Girondins.

     

    Remerciements à Patrice Ferri pour le temps qu’il nous a accordé, ainsi que pour sa sympathie.

    Remerciements à Henri Galipon pour sa disponibilité et son professionnalisme.

    Bordeaux/Saint-Etienne, en intégralité et en exclusivité dimanche à 15 heures