Le processus de scouting dans une équipe de football, par Adrián Espárraga – Phase de direction et de planification (1/2)

    Ceci n’est pas une interview réalisée par Girondins4Ever, mais vous allez découvrir, par l’intermédiaire de l’un des recruteurs des Girondins de Bordeaux, Adrián Espárraga, la vision de notre nouvelle cellule de recrutement. Grâce à Fútbol Práctico, là où Adrián Espárraga s’est exprimé il y a quelques jours, le processus de scouting dans une équipe de football – et donc des Girondins de Bordeaux – vous sera décri avec de nombreux détails. Nous remercions chaleureusement Magali qui a traduit l’intégralité de cette conférence. Ainsi, cet article sera rédigé par l’intermédiaire du “Je”, en la personne d’Adrián. Voici la première partie :

    Le recruteur bordelais, en guise d’introduction, explique que “dans un premier temps, lorsque je débute mes conférences, je le fais toujours en clarifiant ce que l’on entend derrière le terme « Scouting ». D’après moi, le scouting concerne tout le processus qui consiste à reconnaître, enquêter et examiner le jeu du football. Le scouting peut être axé soit sur l’analyse du fonctionnement du football, qui est la branche que nous connaissons comme l’analyse tactique, soit sur l’analyse de l’ensemble des éléments qui lui permettent de se développer, comme par exemple le scouting de joueurs. Au sein d’un club, le secrétariat technique est en charge d’apporter au club des connaissances techniques spécifiques sur l’aspect sportif, sur :

    • l’analyse du jeu d’équipe,
    • la connaissance des joueurs et de leurs rendements,
    • le marché (marché, niveaux des championnats, …),
    • les compétitions”.

     

    PRESENTATION DU SCOUTING

    A – PHASE DE DIRECTION / PLANIFICATION

    Le processus de scouting est connu pour son cycle de connaissance. La clé fondamentale du scouting est de récupérer l’information, la transformer en connaissance afin que l’information soit réellement utile et bénéfique pour l’équipe.

    Le cycle de connaissance est très complexe mais il est possible de le résumer sous la forme suivante :

     

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    La première phase se divise en planification et organisation du travail. C’est la phase que nous réalisons quand nous rencontrons pour la première fois une équipe de football ou quand débute une saison. A partir de là, avec cette planification, nous allons obtenir des informations que nous transformons en connaissances et que nous exploitons à travers ce que l’on appelle le « cruising », c’est-à-dire, les transferts de joueurs.

    L’ensemble de ce processus s’articule autour de 4 principes basiques :

    • La coordination : elle assure l’efficacité de la stratégie, en optimisant les ressources disponibles (financiers, humains, matériels,…).
    • Le contrôle : c’est le travail qui permet d’évaluer l’efficacité de la stratégie selon les prévisions, et quand cela est nécessaire, réajuster les objectifs et/ou modifier la stratégie pour les atteindre.
    • La motivation : à travers laquelle tous les scouts puisent pour persister dans leurs travails et apporter le meilleur à l’atteinte des objectifs du club.
    • La commande : c’est la fonction où sont prises les décisions, qui répartit les instructions aux scouts afin de pouvoir être prêt à opérer, à travers une bonne communication.

     

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    Cette phase de direction / planification se divise en 6 phases :

     

    1. Analyse et évaluation

    En tant que scout, quand j’arrive dans un club, je dois faire une analyse sous différentes dimensions, à savoir politique, sociale, économique et sportive. Il est important de ne pas confondre cette analyse qui se fait uniquement au sein du secrétariat technique avec l’analyse faite au niveau du club qui inclut l’analyse sociologique, politique, des relations avec les institutions… Ici, nous nous concentrons uniquement sur la partie sportive du club.

    La partie sociale va nous sonner des informations sur la culture, l’environnement. Travailler pour une équipe comme peut l’être Barcelone, avec son histoire, sa culture particulière, son style de jeu, son entité… que de le faire par exemple pour un club comme Boca, River… Chaque club a son propre environnement qu’il faut savoir valoriser.

    La seconde dimension est économique où nous valorisons le budget que nous avons pour pouvoir nous organiser et investir dans le fonctionnement du secrétariat technique et ce que nous pouvons utiliser pour la construction de l’équipe.

    Enfin, la dimension sportive, qui est sûrement la plus importante, va nous permettre de connaître la réalité du club. Pour ma part, j’aime faire cette analyse de façon très simple, à l’aide du tableau suivant, qui nous permet de dégager différents profils de joueurs.

     

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    Par exemple, voici le détail pour analyser une phase offensive :

     

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    Pour illustrer cette analyse, on peut prendre la situation suivante : si je sais que mon équipe débute le jeu par des phases courtes, il faut que l’on ait :

    • des centraux qui aient une bonne gestion du jeu à la sortie du ballon, qui peuvent jouer avec un pressing,
    • des latéraux qui soient capables de proposer des sorties de balle,
    • un milieu de terrain qui communique bien et qui joue long,
    • un avant-centre qui se sent bien dans le face à face,
    • des joueurs autour de cet avant-centre qui soient à l’aise dans la récupération…

     

    Cette réflexion permet de définir le profil du joueur que je vais chercher, dont j’ai besoin.

    Ci-dessous vous trouverez l’analyse complète que nous faisons pour un latéral, d’un point de vue physique, tactique et psychologique. Cela nous permet de mieux planifier la phase d’observation et collecter les informations basées sur ces critères. Le profil du joueur présenté fluctue selon la saison, que nous réajustons quand cela est nécessaire mais c’est une bonne base de travail.

     

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    2. Définition des objectifs

    Une fois que cette analyse est faite, il faut définir les objectifs, basés sur les carences et les forces identifiées. Comme dans la gestion de projet, les objectifs doivent répondre à la règle SMART, c’est-à-dire, qu’il soit Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste et Temporel. Nous y ajoutons deux caractéristiques supplémentaires : être motivant, qu’il soit un défi pour tous les gens impliqués et reproductible, c’est-à-dire de pouvoir avoir les mêmes objectifs d’une saison à l’autre, selon les résultats précédents. L’exemple de Leicester explique bien ce dernier point : quand ils sont montés, les objectifs étaient le maintien et finalement, ils gagnent le titre. L’année qui suit, il serait irresponsable de leur part de définir comme objectif de gagner une nouvelle fois le titre, car cette probabilité est quasiment nulle.

     

    3. Plan d’action

    Pour définir le plan d’action, nous divisons la saison en plusieurs parties :

     

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    Nous allons également définir le niveau des championnats que nous allons observer :

    • Championnat Niveau A : Priorité maximale de suivi. Marché à fort potentiel.
    • Championnat Niveau B : Suivi continu. Marché à opportunités.
    • Championnat Niveau C : Suivi sporadique, quelques joueurs intéressants à recruter.

    Le classement des championnats est propre à chaque club. Faire ce classement dépend du club dans lequel vous êtes, de son économie, de nombreux critères. Chaque club, à un moment précis a un classement de championnat différent.

     

    4. Affectations des ressources

    Cette étape consiste à répartir les ressources, à déployer la stratégie définie grâce au suivi : identifier combien d’observateurs sont nécessaires, assigner les ressources financières que l’on a pour voyager, acquérir des programmes… Identifier les ressources matérielles disponibles et les répartir de façon à être capable de travailler avec la plus petite quantité de ressources tout en rendant le plan d’action le plus effectif possible. C’est le directeur sportif qui, à ce niveau, intervient pour donner la limite des ressources à utiliser et leurs répartitions.

     

    5. Exécution

    Dans un premier temps, en début de saison, nous faisons une réunion pour présenter les objectifs de la saison, la forme de travail qui sera utilisée, la répartition des responsabilités, comment rédiger les rapports, comment communiquer entre eux. Il est essentiel que chacun comprenne bien son positionnement au sein de ce secrétariat technique.

     

    6. Contrôle :

    Ce contrôle permet de mesurer l’impact des actions menées. Il y a deux formats pour faire ce contrôle :

    • au niveau de la stratégie: au niveau interne et externe. On peut voir comment on travaille au niveau externe, à savoir si on se rapproche d’une certaine réalité ou non. Par exemple, je ne vais pas suivre un joueur du Real Madrid si je ne peux pas par la suite recruter un joueur du Real Madrid. Il se peut donc que je fasse un bon travail au niveau interne mais qu’au niveau externe, ce soit un désastre car nous n’arriverons jamais à atteindre les objectifs définis.
    • au niveau des résultats : à ce niveau, on analyse si on a atteint les objectifs, phase par phase.

     

    Prochainement, découvrez la partie 2/2 contenant LA PHASE D’OBTENTION DE L’INFORMATION, et LA PHASE D’ELABORATION.