Pascal Rigo dévoile son projet pour les Girondins de Bordeaux à Podcastine

    C’est dans Podcastine que Pascal Rigo a décidé de parler pour la première fois du projet de rachat des Girondins de Bordeaux, évoqué par Sud Ouest. Le quotidien régional annonçait que les relations avec King Street étaient à l’heure actuelle froides, et que Pascal Rigo accompagné d’un associé milliardaire auraient voulu dans un premier temps rentrer dans le capital du club, pour ensuite s’y engager pleinement et reprendre les parts de l’actuel propriétaire.

    Dans ce podcast long de près d’1h30, Pascal Rigo parle de ses réussites personnelles et professionnelles, mais nous allons évidemment vous rapporter, par nos retranscriptions, le contenu de son projet, ou plutôt le peu qu’il a souhaité en dire. Vous pourrez d’ailleurs retrouver l’intégralité de l’interview sur Podcastine, et sur le player que nous vous insérons ci-dessous, et en bas de page.

    Sachez tout d’abord que Pascal Rigo n’aurait, selon ses dire, pas qu’un seul associé mais plusieurs. Mais également qu’il a refusé de dire s’il avait fait une offre officielle à King Street. “Ce qui est important ce n’est pas vraiment une offre ou une conversation qu’on pourrait avoir en ce moment avec King Street, l’important c’est ce qui va advenir des Girondins dans les semaines, mois, et années à venir. On ne rentrera pas dans le détail, mais pouvoir discuter d’un projet, de ce qu’on pourrait imaginer ensemble autour des Girondins de Bordeaux, oui”.

    L’écosystème du football a changé depuis les première discussions avec King Street

    « Aujourd’hui, tous les clubs français sont en train de revoir leur budget. Il n’y a pas d’argent. Il y a des renégociations de droits TV. Si on a des droits qui ne sont pas très chers, il y a moins d’argent dans les clubs, donc il y a moins de moyens pour former ou acheter des nouveaux joueurs, donc le spectacle en pâtit. Si le spectacle en pâtit, il y a moins d’abonnés, et donc moins de moyens pour Canal+ pour payer les clubs. On est dans une espèce d’écosystème assez intéressant où il faut trouver le bon curseur. Le système est différent de celui où on a démarré les conversations avec les propriétaires des clubs […] Il y a une refonte totale du monde du football qui fait que c’est le bon moment aujourd’hui, d’après moi, pour imaginer un modèle qui ne tourne pas uniquement autour des droits TV et du transfert des joueurs, mais qui soit un modèle pérenne autour de culture, de clubs, de gens engagés. Un modèle qui ne serait pas unique, mais sur beaucoup d’autres choses. Nous, on a une ligne de remboursement de maillots ou de flocages gratuits… Je trouve extrêmement frustrant que le 20 septembre on ne connaisse pas l’équipe. Je ne sais pas qui va venir, j’ai pris mon abonnement mais je ne sais pas qui va jouer, il y a des mecs que j’adore qui vont se barrer… Et j’achète un maillot à 100€ à mon gamin, je lui floque Kamano derrière, et deux mois après il est parti. Si je l’aime uniquement parce qu’il joue aux Girondins, j’ai un peu l’air d’un con. On a une ligne qui dit, s’il y a un joueur qui s’en va, on vous rembourse le maillot floqué. Cela va nous forcer à développer la culture du club, la culture des gens qui veulent jouer pour un club, qui veulent donner à ce club. Ça nous oblige à raisonner de façon différente. Le sportif et l’administratif, pour nous, c’est impossible de les dissocier. C’est juste impossible d’embaucher un joueur uniquement pour son talent, il faut embaucher un joueur par ce qu’il représente, par son envie de donner à un club, sa mentalité, la façon dont il s’inscrit dans un projet. C’est crucial de mélanger des joueurs du centre de formation à des joueurs qui ont plus d’expérience […] Il ne faut jamais se couper de rien, il faut être positif, il y a toujours des bonnes idées qui viennent de tout le monde. Pour moi c’est très important, le collaboratif, et ce qu’on peut réinventer. On a échangé cette semaine avec des gens proches du club, que ce soit du côté administratif ou du côté ultra, sur la réinvention d’un modèle de socios à la bordelaise. Il y a à réinventer les halles, la bouffe autour du truc… »

    Il ne sert à rien de pointer du doigt des responsables

    « Je pense que ça ne sert à rien de mettre la tête sous l’eau à des gens qui, à un moment ou à un autre, ont été impliqué dans un truc, n’ont pas véritablement compris dans quoi ils s’impliquaient, et qui sont aujourd’hui en train de patauger dans un espèce d’énorme merdier qu’ils n’ont pas véritablement créer eux-mêmes. Après, on peut toujours donner des responsabilités individuelles sur tout, ça ne sert à rien… Ce qu’il faut essayer d’imaginer, c’est le futur, comment on se met ensemble en fonction d’une situation qui existe aujourd’hui, pour s’en sortir dans un premier temps, et pour créer une dynamique incroyablement positive et sportive. Un club de foot ne vit et ne meurt que par le sport. C’est aussi simple que ça. C’est l’encadrement sportif, de l’investissement dans les joueurs, du partage… On ne va pas voir un match de foot pour se faire chier, on y va pour voir du spectacle et voir les Girondins gagner. C’est aussi simple que ça. Il faut revenir à des fondamentaux, et pour ça, c’est extrêmement difficile quand on est dans le rouge, quand on a une dette à Fortress… Ce n’était pas prévu que ça se passe comme ça, donc ces mecs-là, il faut bien qu’ils trouvent des solutions »

    Un autre modèle, mais le changement de logo n’est pas forcément la priorité

    « Tout ce qu’on attend c’est qu’un mec avec une entreprise, avec une grosse poche bien profonde, un portefeuille bien épais, fasse un chèque. On est là avec toutes nos idées de supporters, de citoyens, mais à la fin du compte, on veut qu’il y ait un mec qui nous fasse un gros chèque. Si c’est ça le modèle, d’accord, mais nous, on a une autre envie. On a envie que ce soit un vrai sport populaire, dirigé par des gens qui sont des passionnés, qui vont ouvrir des dialogues, écouter ce qu’on leur dit. Si je prends l’exemple du logo… Moi, aujourd’hui, le logo il est ce qu’il est. Les Girondins sont en or, mais ils sont plus petits que Bordeaux. On peut comprendre pourquoi ils ont fait ça. Ils se disaient qu’ils allaient avoir une aura incroyable à l’international, et ça va se passer tout seul en mettant Bordeaux en gros sur le logo. Ce n’est pas comme ça que ça se passe, il faut d’abord avoir un beau club, une infrastructure, l’équipe qui fonctionne, et après on peut essayer d’imaginer d’aller à l’export. Est-ce qu’aujourd’hui la priorité serait de changer le logo et de redépenser 3-4M€ pour réimprimer les trucs ? Je n’en suis pas persuadé. Je préfère garder 3-4M€ pour un joueur, pour garder quelqu’un qui pourrait partir… Il faut réfléchir ensemble aux priorités, où est-ce qu’on dépense notre argent… ça c’est intéressant et une vraie conversation. Et s’il faut réfléchir ensemble sur un an ou deux ans, ou avoir un changement immédiat de logo sur les maillots mais pas sur le reste parce que ça va coûter trop cher, et bien réfléchissons ensemble. Mais la collaboration avec des gens passionnés, il n’y a que ça qui marche »

    La passion est-elle absente à la tête des Girondins ? En tout cas, même avec une “banqueroute”, Bordeaux ne descendrait pas forcément

    « C’est difficile à dire. A la tête des Girondins de Bordeaux, il y a des gens passionnés, des gens qui ont été parachutés, des gens qui n’avaient jamais imaginé se retrouver dans une situation comme ça… C’est difficile de reprocher à qui que ce soit de s’accrocher à un fauteuil bien payé, bien rémunéré, pour faire une action, et pour répondre à la volonté d’un patron. Les patrons, c’est King Street, ils font ce qu’ils veulent, ils parlent à qui ils veulent, quand ils veulent, et ils font de ce club ce qu’ils veulent. Quoi qu’on dise. C’est eux les patrons. On a une chance extraordinaire c’est que si aujourd’hui ils décidaient de déclarer banqueroute pour une raison ou pour une autre, il y a des nouveaux articles de la Ligue qui font qu’on ne sera pas automatiquement relégués et on pourra imaginer une restructuration du club. Ça c’est très important. Avant, on était automatiquement relégué et si on n’avait pas le plan qui tenait la route, on était relégués de la division de la réserve. De dire qu’il n’y a pas cette passion-là, je n’en suis pas persuadé. Il y a des gens passionnés à l’intérieur du club, des groupes de supporters qui sont uniques en France, un patrimoine de folie, un stade qui est ce qu’il est »

    Un idée pour le stade et réduire la voilure

    « Il est trop grand, Juppé a fait des choses extraordinaires pour la ville, et a voulu que ce stade puisse accueillir une fois tous les 20 ans un quart de finale de Coupe d’Europe… Ce n’était pas ça le bon calcul, mais ils l’ont fait. Nous, on a une idée sur ce projet-là en particulier, architectural, très viable, qui permet d’avoir une géométrie variable du stade pour un investissement qui est conséquent mais pas non plus extraordinaire sur des matches un peu plus petits, qui permettrait d’avoir l’illusion que ce stade est un stade de 25000 personnes. C’est couillon, ça peut paraitre utopique, mais c’est pour ça qu’on a fait l’étude. Il y a un énorme parapet en béton. Il suffit d’y avoir une structure légère qui puisse se déplier, qui laisse passer la lumière des projecteurs qui est en phase dans la partie supérieure, et on crée un toit dans le stade, un stade dans le stade en structure hyper flexible. Le champ des possibles de quelque chose comme ça, nous permet de projeter contre cette structure, de créer une ambiance dans ce stade, qui est une atmosphère qui peut répondre à une question : ‘putain, je vais voir le match à la télé, j’ai les ralentis, je ne vais pas me les refroidir avec ¾ d’heure de bouchon’… Mais si l’expérience au stade est exceptionnelle, si on arrive à pouvoir être dans les vestiaires, à la sortie, l’entrée des joueurs, revoir les actions au ralenti, recréer quelque chose à l’intérieur du stade qui vaille la peine d’être vécue, d’avoir une expérience, de l’émotion, là, on arrive à faire quelque chose de très poignant. Et si en plus les résultats sont bons, si en plus on a de la bouffe locale, marrante, pas très chère, avec la possibilité de se mélanger quand on va bouffer, et pas d’avoir du super VIP… On arrive à créer quelque chose d’unique ».

    Sera t-il prêt si King Street se désengage ?

    « Ce n’est pas à nous de dire à King Street ce qu’ils ont envie de faire ou pas. Les mecs font ce qu’ils veulent. Après, n’importe quelle entreprise est à vendre, à n’importe quel moment. Il suffit de mettre le prix, que quelqu’un soit prêt à le mettre. Nous, à titre très personnel, on n’est de toute façon pas prêts à mettre le prix qui a été annoncé dans la presse. Ce n’est juste pas ça. On ne connait pas les convenants autour de l’emprunt, on ne sait pas si c’est King Street le propriétaire ou Fortress, je suis incapable de vous le dire. Après, s’il y a une volonté avec King Street de bâtir quelque chose, de préparer de la transition, d’avancer sur un projet où on pourrait être les maitres d’œuvre et être incroyablement impliqués sur ça… C’est ce qu’on veut faire ».

    Le modèle

    « On ne réinvente rien, je ne vais pas vous dire des trucs que personne n’a dit avant. Il faut recréer cette culture, ce lien avec le territoire, mais de façon très forte. Il ne faut pas que ce soit des mots, il faut y être, il faut s’impliquer. Il faut que les mecs viennent au stade… C’est le club professionnel de la région qui doit être l’instigateur. Les Girondins de Bordeaux c’est le club phare, on ne peut pas se cacher derrière tout ça. Il faut y mettre les moyens, il faut y aller, trouver les bons jeunes, les encadrer, et il faut trouver des joueurs professionnels autour de tout ça, capables d’encadrer des jeunes, être performants, communiquer avec les différents groupes. C’est recréer ce lien qui n’existe plus aujourd’hui, plus du tout »

    La relation avec les supporters

    « Ils auraient toute la place. Je pense que quand on est passionnés, et qu’on est apolitique, chose la plus importante pour nous… Le sport n’a pas de couleur, pas d’étiquette. La place est extrêmement importante pour des gens capables de gérer leurs propres budgets, imprimer leurs propres banderoles, d’insuffler une énergie au stade… Je ne vois pas comment un groupe comme ça peut être mis à l’écart de décisions importantes, de choses qui peuvent avoir un impact direct sur la vie du club. Ce n’est pas possible »

    Une passerelle avec le foot américain et la MLS

    « Je n’ai pas qu’un associé américain, j’en ai plusieurs. Après, c’est en fonction du projet, qui on va voir, à savoir le fond, l’associé, l’équipe. On veut aussi créer une passerelle entre un club de MLS et la Ligue 1. Un club de MLS est en Ligue fermée donc ça ne descend jamais, il y a des revenus constants. Et cela permet de mitiger les risques sur des ligues ouvertes comme on a en France où effectivement, il y a l’épée de Damoclès de la descente, qui a toujours un énorme impact financier. L’idée d’impliquer un ou deux clubs de MLS est importante. L’idée d’impliquer de grosses universités américaines aussi, en particulier sur les échanges d’éducation, mais aussi sur le fait que l’équipe des Girondins de Bordeaux est extraordinaire. Des plateformes pour que nos féminines puissent venir aux Etats-Unis, de façon soit éphémère avec des tournées assez sympas, mais aussi par la possibilité pour des jeunes joueuses américaines de pouvoir intégrer l’équipe ».

    Plusieurs noms associés au projet, comme Stéphane Martin…

    « Je pense qu’un type comme Stéphane Martin, s’il y avait une transition à effectuer… Je ne sais pas comment ça va se passer. Je déteste déshabiller Paul pour habiller Jean. Je pense qu’il faut toujours essayer de se servir des forces en place pour essayer d’aller vite. Mais Stéphane, on parle au quotidien pratiquement, c’est un gars que j’apprécie énormément. Est-ce qu’il le ferait ? Je pense que oui, mais il a aussi d’autres possibilités. Il y a une chose qui est certaine, c’est qu’il adore les Girondins de Bordeaux plus que tout, il a déjà été Président du club. Je pense que les relations qu’il a avec la ville, Florian Brunet, sont des relations de respect total. C’est quand même des choses à prendre en compte. Il y a plein de gens qui veulent que ce club soit extraordinaire. Il faut mettre toutes ces bonnes volontés et ces compétences ensemble pour réussir ».

    …mais aussi Alain Roche, Alexis Gallice

    « Ce sont des gens qui ont compté pour le club, des gens qui ont le club en intraveineuse ».

    Le dernier mot, pour ls supporters

    « Je ne suis pas le gourou. Tout ce que je peux dire, c’est qu’il faut toujours avoir confiance en l’avenir. Je pense qu’on peut difficilement aller plus bas que là où on est aujourd’hui. Ce sera de toute façon les forces collectives qui vous nous permettre d’arriver à redorer le blason que les Girondins ont eu, et peut-être même plus. C’est très bien d’arriver à redevenir ce qu’on était, mais je pense que dans l’écosystème du football d’aujourd’hui qui est en train de complètement se restructurer… La réponse pour moi est locale, collaborative, et elle existe car il y a les volontés autour de ça. Je suis hyper optimiste sur ce qu’on va pouvoir faire tous ensemble autour des Girondins de Bordeaux, à nos échelles, avec nos moyens, mais surtout avec notre volonté indéfectible d’y arriver ».

    Le podcast intégral à retrouver ci-dessous, par Podcastine.