Gustavo Poyet : “Je n’ai pas de regrets. Vous savez pourquoi ? Parce qu’il y a des fois où il faut arrêter les conneries qui se passent dans une équipe”

    (Photo by Manuel Blondeau/Icon Sport)

    Sur Girondins inside TV, Gustavo Poyet est très longuement revenu sur ce qui l’a poussé à avoir cette conférence de presse mythique, qui a causé sa perte et son départ des Girondins de Bordeaux. Plusieurs choses ont amené à ça durant l’été, et notamment le manque de recrues.

    « Première chose importante, les deux mois les plus importants dans l’année, pour une équipe de foot, c’est l’été. Si tu fais bien le recrutement, tu peux avoir de bonnes chances de faire une bonne saison. La semaine après Metz (dernier match de la saison), on s’est mis d’accord, sur les joueurs et les caractéristiques dont on avait besoin pour l’année suivante. Ce mois de juin-juillet, on jouait les qualifications à la Ligue Europa. ‘Oui oui pas de problème’. Je pars en vacances, on téléphone tous les jours, mais avant de partir en stage, il n’y avait pas un seul nouveau joueur. On a recommencé l’entrainement sans un seul nouveau joueur. La fille de la presse vient me dire qu’il faut faire une conférence de presse de rentrée, je dis non car il n’y avait pas de nouveaux joueurs, on jouait ensuite à Ventspils, je ne connaissais rien de cette équipe, et il n’y avait que 17 joueurs… Bon, j’essaye de la faire, et on commence à sentir que… Je ne suis pas content, j’arrive à trouver une solution pour cette conférence de presse, et il y a beaucoup de choses qui se passent. On était allés en Ukraine avec trois avions différents, c’était incroyable… Bref. On gagne chez nous face à Ventspils, et le lendemain on regarde les avions qu’on doit prendre. On en choisit un, et finalement on me dit qu’on a perdu cet avion donc on va en prendre un autre. Samedi, on me dit qu’il n’y a pas d’avion, et qu’on va y aller à trois petits avions… Ce n’est pas possible… C’était 4h30 de vol. Ce n’est pas un club ça, c’est plus un groupe scolaire qui part en voyage… On a gagné quand même. Mais c’était quelque chose de bizarre quand même… Il y a des choses où il faut fermer les yeux. Mais quand tu as une, deux, trois, quatre, cinq choses qui se passent… C’est l’explosion. On a joué quatre matches de Ligue Europa sans un nouveau joueur. Kalu et Basic se sont entrainés à la fin… Et vous vous rappelez que Toma Basic n’était pas dans la liste une fois que je suis parti ?! Ils ont fait une erreur d’inscription, mais ce n’est pas professionnel. Tu ne peux pas faire une erreur comme ça à ce niveau. Cette erreur peut coûter des millions… Aujourd’hui, il est à la Lazio. C’était un été vraiment difficile ».

    Arrive alors cette conférence de presse où selon lui rien n’était prémédité.

    « Je gagne le match, on est contents. La semaine d’avant, l’analyste vidéo me donne toutes les informations de l’équipe qu’on va jouer. Je pars chez moi, je commence à tout regarder, là où on peut gagner le match, etc. Il y a une chose que je ne fais jamais, c’est de regarder le match d’après. On jouait jeudi soir, c’était difficile parce qu’ensuite on jouait le dimanche. Je suis dans le vestiaire, on me donne toutes les informations pour le match du dimanche. Je vais en conférence de presse tranquille… Mais la vérité, c’est qu’il y a une question… Le journaliste a fait sa meilleure question au moment le plus important. Là, je suis parti… Tout ce qui s’est passé dans l’été est revenu dans ma tête à ce moment-là. Il m’a demandé, malgré le fait qu’on ait gagné, pourquoi je n’étais pas content. Et là… Et il y avait un journaliste qui savait plus de choses que moi, mais sans dire de noms. Il y avait des informations dont je n’avais pas la connaissance, mais il y avait quelqu’un en face de moi qui les avait. Je me suis dit que ce n’était pas possible… Laborde était dans le onze contre Marioupol. On était chez nous, à Bordeaux, je n’avais appelé que 17 joueurs et non pas 18. C’était une décision que j’avais prise […] Au final, je n’ai pas de regrets. Vous savez pourquoi ? Parce qu’il y a des fois où il faut arrêter les conneries qui se passent dans une équipe. S’il y a personne qui arrête ça, tu ne sais pas où tu vas finir… Je sais que ce n’est pas bon pour moi. Je sais qu’en France, ce sera difficile de me rappeler après ce que j’ai fait à Bordeaux (en conf’ de presse). Je n’ai pas demandé 4-5 joueurs quand je suis arrivé en janvier : un numéro 9 (Braithwaite). Martin n’a pas joué beaucoup lors des 3-4 premiers matches, puis il a compris sa position, etc, et il est devenu important ».

    L’ancien coach des Girondins de Bordeaux donne sa version concernant le départ Gaëtan Laborde à Montpellier.

    « C’est facile. On s’entraine mercredi, le match était vraiment tard dans la soirée. Je prends la décision de ne pas aller à l’hôtel mercredi soir. Il y avait la possibilité d’aller à l’hôtel directement le midi, puis tu avais la possibilité d’amener ta voiture au stade, et le bus t’amenait du stade à l’hôtel. J’étais avec mon adjoint, on est arrivé à l’hôtel juste avant midi. Le délégué m’a donné la clé, je suis parti dans ma chambre, tranquille. 12h15, quelqu’un arrive dans ma chambre, ce même délégué, et me dit qu’on a un problème : Gaëtan Laborde n’est pas là. Il est à Montpellier. Je ne pouvais pas le croire, jusqu’au moment où je l’appelle à 12h30. Il était à Montpellier. Il me dit ‘la direction m’a donné l’accord pour que j’y aille, je te passe mon agent’. Son agent m’explique que le club a donné l’accord le jour d’avant. Ils sont partis à 17-18h sur Montpellier pour faire la visite médicale. Je demande maintenant à tous les supporters : qu’est-ce qu’il faut faire dans ce cas présent ? On est tous différents, il y en a qui prennent leur sac et s’en vont, d’autres qui appellent le président, d’autres qui ne disent rien… Moi, j’ai dit ‘on va gagner ce soir’. Mon adjoint voulait partir, il était fou ! Il m’a dit qu’il n’y avait pas de respect, que c’était impossible à accepter, que c’était incroyable. Après l’appel, je parle avec le capitaine, je donne l’information qu’on a perdu Gaëtan Laborde, qu’il ne jouera pas : les mecs me regardent et me disent que ce n’est pas possible… Mais je leur dis qu’il faut oublier, qu’il faut gagner ce soir. Je prépare le match, on gagne. Je pars en conférence de presse vraiment tranquille, je n’ai rien préparé. C’est la vérité. Mais c’est la question de ce journaliste qui me fait tourner la tête. Là, j’ai décidé de dire la vérité. J’ai seulement demandé des citations. Tout le monde a dit que j’étais contre le propriétaire, le président, le directeur sportif… J’ai juste demandé, dix fois, que quelqu’un m’explique comment c’est possible qu’un joueur parte le jour d’un match de Ligue Europa, sans que l’entraineur ait connaissance de cette décision. Rien de plus. Après, le club avait deux-trois solutions. La première était de m’appeler et de me dire qu’ils ont fait ça, ça, et ça, ‘ta gueule, continue d’entrainer’. Ou une mise à pied. Mais qu’est-ce que vous allez faire après une semaine de mise à pied ? La conférence de presse est là, tout le monde sait la vérité, j’ai tous les textos dans le téléphone… C’est un problème d’égo ! Quand l’égo est devant le professionnalisme, c’est un problème. Moi, je n’ai pas d’égo. Je n’ai rien fait pour moi. A la fin, j’ai perdu, non ? Je n’ai plus Bordeaux, je ne peux pas trouver de possibilités d’entrainer en France, donc à la fin c’est moi qui ai perdu ».

    Retranscription Girondins4Ever