Cédric Carrasso : “Il a été horrible avec moi toute la saison. Horrible. A la fin, pendant 4h, il m’a expliqué pourquoi…”

    Photo Iconsport

    Sur Colinterview, l’ancien gardien des Girondins de Bordeaux, Cédric Carrasso, est longuement revenu sur sa saison passée en tant que numéro 2 de Fabien Barthez, à Marseille.

    « Il te met à l’heure direct, le mec (rires). Moi, j’ai envie de continuer de jouer, et je m’éclate. Ça reste une dépendance de jouer dans des stades pleins quand tu aimes le foot. Tu es dépendant de ça, c’est addictif. Quand tu es dans un stade de 60000, que les gens t’acclament, que tu fais des super matches, que tu vis cette vie de groupe, ces scénarios de match… J’étais avec Ribéry, on avait un groupe de dingues… Ça se passait super bien. Donc tu as envie de continuer, les dents rayent le parquet. Sauf que Barthez vient te voir, il te tape à l’épaule – alors qu’il ne m’avait pas adressé spécialement la parole jusque là – et il te dit ‘bon écoute petit, tu vas aller t’asseoir sur le banc maintenant’. Là, tu le regardes, tu te demandes s’il blague… Et non, le mec ne rigole pas. Le mec reprend sa place, et il a été horrible avec moi toute la saison. Horrible. Un coup il avait mal quelque part, je m’échauffais tout le long du match, et à l’arrivait il restait sur le terrain. On jouait un match de Coupe de France contre Le Havre, il a un peu mal à la nuque, il dit qu’il ne peut pas jouer… Et finalement si. Que des trucs comme ça. J’étais admiratif, mais en même temps il était dur avec moi. Je ne comprenais pas pourquoi, je me demandais ce qu’il me voulait, ce qui se passait… Et c’est là où c’est quelqu’un que je respecterai toute ma vie, c’est un grand grand grand Fabien… J’avais une frustration tout au long de la saison, mais vraiment. Je n’arrivais pas à être proche de lui, je n’arrivais pas à ce que ça se passe bien, mais en même temps ça se passait bien… Je n’arrivais pas à comprendre cette situation. Il y avait un truc qui me dérangeait. Le dernier match de la saison, c’était à Bordeaux. Il m’appelle au téléphone à la fin du repas, et il me dit ‘tu peux descendre s’il te plait’. On s‘assoit, on boit un café, et là il me parle pendant quatre heures. Il m’explique pourquoi il a été comme ça avec moi toute la saison. Là je me dis ok… Il jouait sa dernière saison pour aller à la Coupe du Monde 2006, et lui, le monstre que c’est à tous les niveaux, il se retrouve avec un gamin dans les pattes qui va jouer 15-20 matches, qui bouscule un peu tout, qui met un peu la zizanie dans sa saison tranquille de préparation d’une Coupe du Monde… Il me dit qu’il a été obligé d’être comme ça avec moi, parce je l’ai obligé à aller un peu plus loin pour préparer sa Coupe du Monde. Il m’a remercié et il m’a dit ‘ce sera mon dernier match, et après c’est à toi’. Il me fait comprendre qu’il arrête. Ça a duré quatre heures… C’est quelque chose qui m’a marqué toute ma carrière, et encore aujourd’hui. Je ne serai jamais assez reconnaissant par rapport à Fabien parce qu’il m’a fait comprendre comment ça fonctionnait, et qu’il ne fallait jamais lâcher l’affaire quand tu es dans le foot. C’est grâce à lui que j’ai pu faire une carrière jusqu’à 37 balais. Il m’a fait tout fait comprendre en cinq minutes. Je l’ai recroisé en Equipe de France, il est venu nous entrainer quelques fois, et c’est quelqu’un que j’admire beaucoup, au-delà du footballeur ».

    Photo : Olivier Andrivon / Icon Sport

    L’ancien bordelais l’avait, en quelque sorte, sorti de sa zone de confort.

    « Je l’ai sorti de sa zone de confort, et je ne m’en rendais pas compte. J’étais jeune, ça se passait bien, il y a tout qui allait bien, et j’avais faim. En plus, c’était pour moi une revanche au niveau de Marseille… Je me disais que cette fois j’y étais, et que je ne lâchais pas l’affaire. Il était vraiment fort. J’étais jeune, il avait quand même 36 ans à cette époque, je ne lâchais rien, mais il ne lâchait rien non plus. C’était un monstre physique. Mentalement, il était largement au-dessus au niveau de tout, mais au niveau physique, voilà… J’avais 24 ans, et lui 36. On s’est tiré la bourre tout le long, c’était incroyable. Pour moi, ça reste un souvenir fantastique. C’est le premier gros tournant de ma carrière en tant que titulaire ».

    Retranscription Girondins4Ever