Interview Girondins4Ever. Entretien avec Guillaume Allanou, président et entraîneur du Stade Briochin
Avant la rencontre entre les Girondins de Bordeaux et le Stade Briochin, comptant pour la 12ème journée du championnat de National 2, nous nous sommes entretenus avec Guillaume Allanou, président et entraîneur de cette équipe. Un échange très sympa avec une personne qui cumule les fonctions et qui est au club depuis 16 ans. Ses différentes casquettes, l’histoire du club, son vécu, sa saison, son équipe, Christian Konan, la Coupe de France, les Girondins, le Matmut Atlantique… Guillaume Allanou se livre sans filtre et avec bienveillance dans cet entretien.
Vous êtes au club du Stade Briochin depuis 16 années. Vous avez combiné entre le rôle de manager, Président et entraîneur. Mais vous êtes aussi dans l’immobilier. Comment on gère tout ça au quotidien ?
Les journées sont longues ou pas assez longues, je ne sais pas dans quel sens je dois le prendre. C’est une histoire d’organisation, c’est de répartir mes tâches en fonction de mes différentes casquettes, en privilégiant celle d’entraîneur. C’est-à-dire que c’est celle-là qui est au centre de mon organisation. Puis après je gère mes affaires ou la gestion du club au quotidien sur le temps qu’il reste.
Est-ce que vous êtes en recherche d’un entraîneur voire d’un président pour vous concentrer sur un seul rôle ?
Non. J’ai un staff avec moi qui m’épaule bien au quotidien. On est quatre. Pour l’instant ce n’est pas d’actualité. J’ai repris la direction de l’équipe au mois de Janvier l’année dernière, ça va faire un an, quand notre entraîneur de l’époque est parti un peu soudainement. On a fait une bonne deuxième partie de saison, et pour avoir de la stabilité, on a convenu en interne et collectivement, joueurs, staff, dirigeants, que le plus simple était, pour éviter d’avoir à rechanger encore, que je continue avec l’équipe. C’était une décision collégiale.
Pouvez-vous nous présenter le club du Stade Briochin ?
On est un club qui a fêté ses 120 ans l’année dernière, donc un club assez ancien, né en 1904. On a connu une petite période de professionnalisme dans le courant des années 90. A l’époque j’étais joueur, j’étais plus jeune. On vient de vivre trois saisons en National, qui est quasiment du professionnalisme également.
Un championnat dont vous êtes descendu et qui pourrait devenir une Ligue 3.
Après c’est toujours pareil, Ligue 3 c’est du marketing, c’est un nom. La conséquence derrière, c’est est-ce qu’il y aura des moyens financiers en conséquence ? Puisque c’est un championnat qui est très exigeant financièrement déjà, pour pouvoir tenir. Il y a des dépenses professionnelles et peu de recettes. Il n’y a pas de droits télés. Il y a des recettes publiques mais ce n’est pas un championnat qui est des plus attractifs. Donc c’est le modèle économique qui est compliqué en fait en National. Ils en parlent, mais au-delà du nom Ligue 3, qu’est-ce qu’il y aura derrière en termes de moyens mis à disposition des clubs ? Est-ce qu’ils vont rentrer dans le giron de la LFP avec une répartition des droits télés ou pas ? C’est un peu ce qui se cachera derrière l’effet d’annonce. Le nom Ligue 3, si c’est juste pour avoir le même fonctionnement et juste changer le nom, finalement ça ne changera pas grand-chose.
Quel est l’objectif du club cette saison ?
Se stabiliser en National 2 ? C’est ça. Déjà, de digérer la descente, ce n’est pas simple. Et ensuite, l’objectif suivant c’est de se pérenniser à ce niveau-là parce qu’avec la refonte et le fait qu’il n’y ait plus que trois groupes, ça devient très exigeant aussi en termes de fonctionnement. C’est du semi-professionnalisme, on va appeler ça comme ça. Donc notre objectif est de se stabiliser, d’être un bon club de N2, capable de sortir des jeunes. On a aussi une partie du projet sportif qui est basé sur la formation des 17 ans au championnat national. On aspire à emmener nos U18 en championnat national également. Puis d’être capable de naviguer sereinement dans cette division-là et de sortir des jeunes. C’est à peu près notre projet à terme parce qu’aujourd’hui, le National on n’en a pas les moyens économiques ni forcément les infrastructures pour pouvoir re-exister ou retourner dans ce championnat-là tout de suite. Pour la saison, l’objectif c’est justement de redonner un peu de transition avec un maintien le plus serein possible. Donc le premier objectif va être d’aller chercher les dix victoires nécessaires pour obtenir ce maintien. On n’est qu’à quatre donc il reste du chemin à parcourir. Puis on a la chance d’être encore en Coupe de France donc en parallèle, de vivre une aventure en Coupe de France le plus longtemps possible (sourire). On a un gros morceau aussi avec une Ligue 1 également. C’est ce qui doit animer notre saison et préparer l’avenir si on arrive à obtenir rapidement ces dix victoires. De pouvoir aussi aguerrir et lancer des jeunes pour gagner du temps pour la suite.
Vous avez des joueurs expérimentés également de votre côté avec Franck L’Hostis, Christophe Kerbrat, Benjamin Angoua, Julien Benhaim, Christian Konan. Est-ce qu’ils apportent beaucoup à la vie de groupe avec leurs expériences ?
Ouais. En fait c’est une question d’homogénéité donc on a besoin et on a des joueurs expérimentés qui doivent jouer leur rôle de cadre et apporter leur expérience aux plus jeunes pour les aider à franchir les paliers. Donc oui, ils sont évidemment très importants dans la gestion collective.
Revenons sur Christian Konan. C’est un joueur qui est passé par les Girondins de Bordeaux et que vous avez fait venir de Suisse. Comment l’avez-vous recruté ?
En fait, au départ par l’intermédiaire de son agent que je connais bien et en qui j’ai confiance. On a une relation de confiance. Christian est venu, il avait besoin de se relancer. Il sortait d’une année difficile en Suisse où il n’avait pas joué, ou quasiment peu joué, pas assez en tout cas. Je l’ai fait venir à l’essai au moment de la reprise. Je savais que le marché allait être très calme donc je m’étais gardé une ou deux places pour des joueurs que j’aurais mis à l’essai. Pour pouvoir se donner le temps de les voir à l’entraînement. C’est ce que j’ai fait avec Christian et l’essai s’est avéré concluant donc il est resté. Il apporte sa pierre à l’édifice et il donne satisfaction.
Est-ce que vous avez échangé avec lui avant ce match qui risque d’être particulier ?
Oui un petit peu, forcément. Comme pour chaque joueur qui rejoue contre un de ses anciens clubs, il y a toujours une saveur particulière. Là, ça va être son cas à lui. Mais après, l’idée va être de rester focus sur ce que l’on fait. Il y aura déjà un contexte pour beaucoup de nos joueurs qui vont découvrir le Matmut et qui vont vivre entre guillemets un match un peu particulier parce qu’on n’a jamais autant de spectateurs dans un match de National 2 que ce qu’on aura là (sourire). Il ne faut pas que le contexte nous inhibe non plus et l’objectif pour moi va être justement de garder les garçons concentrés sur ce qu’on doit faire sur le terrain. De ne pas être juste là en découverte. S’il y aura un moment pour les photos et un moment pour le match ? C’est exactement ça ! Ok on profite, on découvre l’enceinte puis une fois que la découverte du terrain est faite et qu’on est retournés au vestiaire, on est focus sur ce qu’on doit faire avec évidemment un gros match à jouer et un gros adversaire en face.
Vous affrontez les Girondins de Bordeaux, club qui n’était pas prévu pour le championnat de N2. Comment avez-vous pris cette nouvelle ?
Un peu comme tout le monde. On a suivi le feuilleton estival qui a traîné en longueur. De toute façon je n’ai pas de jugement à avoir sur la décision des instances, puis ça ne change rien quoi que je dise. J’y vois une opportunité pour mettre un coup de projecteur sur nos championnats de National 2. Plutôt que de se dire ‘Ce n’est pas normal, ils ne devraient pas être là, ils faussent le championnat, etc…’, je le vois plutôt comme une opportunité de mettre en avant les championnats nationaux, de montrer que ce sont des championnats avec de la qualité et de bons joueurs. Puis pour nous, de vivre une expérience comme celle qu’on va vivre au Matmut, puis aussi au match retour l’occasion de recevoir un club historique. C’est plutôt bien.
Certains dirigeants sont mitigés sur leur présence, d’autres sont ravis mais il y a aussi ceux qui pensent que cela fausse le championnat…
C’est un peu vrai aussi parce que d’abord, Bordeaux a des moyens et un effectif… C’est tout le paradoxe. Si je reprends ma casquette de président c’est un paradoxe quand même car un club qui est endetté à la hauteur des Girondins (sourire), alors que nous, on passe devant la DNCG tous les ans et qu’on doit absolument rendre des comptes. Donc oui, si je me place du point de vue du président que je suis, je trouve qu’il y a une forme de paradoxe et d’iniquité c’est une évidence. Après, pour l’entraîneur que je suis, ça permet d’avoir une équipe attractive aussi en face de nous. Je pense que l’appréhension de ces choses-là dépend des ambitions des différents clubs. Les clubs qui jouent la montée, le voient d’un mauvais œil. Nous on a une ambition de se maintenir sereinement donc je le vois comme une chance d’aller vivre un match particulier dans une ambiance particulière. Quand on va recevoir, on sait qu’on fera du monde aussi donc c’est bien aussi en termes d’attractivité et de recette pour le match retour. Même sur l’aspect sportif, il est évident que compte tenu du feuilleton estival, les équipes qui ont eu la chance de les jouer en tout début de saison, quand ils n’étaient pas rodés, ont pu les accrocher et prendre des points. Je pense à Dinan, à Poitiers et Châteaubriant notamment… Donc oui pour le championnat ça fausse un peu la donne parce que c’est sûr que le Bordeaux qui a affronté Dinan, Châteaubriant et Poitiers, n’est pas le même que celui que je vais affronter samedi. Il y a une part de chance et de hasard du calendrier entre guillemets, qui fait que certains ont eu la chance de les jouer à cette période-là et ont pu prendre des points. Ce ne sera pas forcément évident pour les autres à partir de maintenant (sourire) parce qu’ils sont en pleine bourre.
Vous allez vous déplacer à Bordeaux, chez une équipe qui est en pleine confiance et qui monte en régime. Comment allez-vous aborder ce match ?
On va l’aborder avec la volonté de ne pas venir en victime. On sait très bien que ça va être un match très compliqué, en plus j’ai quelques absents de joueurs importants dans l’effectif. Donc on est un petit peu diminués qui plus est. Mais en se disant qu’on va essayer d’aller accrocher un résultat et tout ce qu’on pourra accrocher sera ça de pris par rapport à d’autres. On sait qu’ils ne vont pas laisser beaucoup de points en chemin (sourire). Donc on va y aller avec beaucoup d’humilité en sachant pertinemment que ça ne sera pas simple, mais aussi avec la volonté de jouer et puis essayer de ramener quelque chose tout simplement. Ça reste un match à jouer.
Est-ce que vous avez un plan pour faire déjouer Andy Carroll et Soufiane Bahassa, qui sont actuellement les deux meilleurs joueurs de l’effectif ? Ou est-ce que vous allez continuer à jouer votre jeu ?
On va évidemment tenir compte de leurs caractéristiques. On peut citer Yanis Merdji aussi qui vient de réaliser un doublé quand même (sourire). Il y a aussi l’arrivée de Djibril Diaw, je ne sais pas s’il jouera, mais en tout cas un effectif qui se renforce de semaine en semaine. Cet effectif est vraiment armé et je pense, même taillé, pour un championnat supérieur, au moins le National. Donc évidemment qu’on est obligés de tenir compte de ces caractéristiques-là. C’est une évidence. Quand vous avez Andy Carroll en face, l’importance qu’il a aussi sur le rendement de l’équipe… On l’a vu quand il était absent à Saint-Malo, ce n’était pas tout à fait le même rendement offensif. Donc oui on va en tenir compte mais je ne veux pas non plus qu’on déroge à nos principes parce que ce ne serait pas logique de juste faire de l’adaptation à l’adversaire. On va essayer de trouver un équilibre entre tout ça.
Que peut-on vous souhaiter à part un maintien assez aisé ? Un bon parcours en Coupe de France ?
Oui c’est ça ! C’est ce que j’ai dit aux joueurs. On a quelque part entre guillemets, la chance de jouer deux matchs de Coupe de France en trois semaines. Quelque part, venir jouer au Matmut c’est un peu comme un contexte Coupe de France. On n’est pas favoris, loin de là. On n’a rien à perdre finalement et tout à gagner. Ce sera la même chose en Coupe de France, pour la vraie compétition pour le coup, face au Havre. On a la chance de recevoir, c’est déjà un super point, ce sera une belle fête à la maison. Puis sur 90 minutes on essayera humblement encore une fois, de leur poser des problèmes. Puis on verra, il y a un match de foot à jouer. On n’a pas une grande chance mais on n’en a pas zéro non plus donc on va jouer notre chance à fond pour essayer de se qualifier. L’absence de prolongations à forcément une grosse incidence parce que ça favorise un peu le petit. C’est un bon match à jouer pour les garçons déjà, ça c’est le plus important, et l’objectif est de ne pas avoir de regrets. C’est dans l’approche, se dire qu’on aura tout donné face à un adversaire qui nous est de toute façon supérieur. Donc ce serait logique qu’il nous batte. C’est valable aussi pour ce week-end. Mais charge à nous d’aller un peu créer l’exploit ou en tout cas défier les grandes équipes.
En tout cas, on vous souhaite d’aller loin dans votre parcours en Coupe de France, de vous maintenir, même si on ne vous souhaite pas les trois points pour ce samedi (sourire)… De vivre une belle rencontre avec deux équipes qui produiront du jeu…
C’est sûr que Bordeaux, on sent que ça monte en puissance, que ça commence à être rodé en termes de cheminement, de préférentiel, de la façon de sortir les ballons avec des joueurs de qualité. Donc c’est bien aussi pour mes jeunes parce que j’ai pas mal de jeunes qui découvrent aussi la division. J’espère simplement qu’ils ne seront pas inhibés par le contexte, l’environnement.
Un Grand Merci à Guillaume Allanou pour sa disponibilité et sa sincérité.